Terrain miné Les universités n’ont d’autre solution que d’augmenter des droits d’inscription actuellement symboliques
Les études à l’université sont quasiment gratuites, héritage d’une époque où elles ne formaient qu’une proportion marginale de la population. Sous la poussée démographique, l’élévation du niveau d’études, une formidable massification, a transformé sa mission dans toutes les dimensions. L’Alma mater formait des profs et des chercheurs puis s’est intéressée aux débouchés professionnels pour un nombre croissant de métiers. Or son modèle économique est calé à plus de 80 % de ressources fournies par le contribuable. Est-ce désormais tenable, à l’heure où chaque université doit développer une stratégie internationale, donc se confronter à des concurrents beaucoup mieux argentés ? La Cour des comptes vient donc de proposer une hausse modique des tarifs des masters – 243 à 965 euros – proposition immédiatement écartée par le Premier ministre. Faire payer une modeste participation – 10 % du véritable coût – n’est-il pas le meilleur moyen de satisfaire ces besoins financiers ? À condition de la dédramatiser et de la préparer. Pour l’étudiant, c’est un investissement qui le rendrait justement solvable si un mécanisme de prêt défiscalisé, avec franchise, facilitait sa mise.
Les magistrats de la rue Cambon ne pouvaient choisir pire moment ! Inviter les universités à faire payer un prix raisonnable leurs programmes était pourtant calé sur une logique économique pertinente, tant leur situation financière est dégradée. Près d’une dizaine sont dans le rouge. Aussi les sages de la Cour des comptes, ayant fait leurs calculs, élaboré plusieurs scénarios, ont trouvé judicieux de faire passer le coût des études d’une quasigratuité – 171 euros pour une année de licence, 243 euros pour un master – à un niveau modéré, de 965 euros, mais uniquement pour le master. À titre de comparaison, les droits s’élèvent à 45 300 euros pour les trois années du master of management du programme grande école d’HEC. Et cette proposition ne représente jamais que moins de 10 % du prix de revient réel d’une année d’études à l’université (10 050 euros) – la différence étant réglée par le contribuable.
Ces propositions devaient être rendues publiques dans un rapport publié le 5 décembre dernier. Mais face aux réalités drues de l’économie et aux tumultes de la rue, le politique a toujours le dernier mot. Lundi 19 novembre, le Premier ministre a brutalement balayé cette “invitation” : “Le gouvernement ne donnera pas suite à cette préconisation” a réagig Édouard Philippe. On le comp prend certes, dans ce contexte hyper-sensible. En regardant le rétroviseur.
Faire payer une modeste participation – 10 % du véritable coût – n’est-il pas le meilleur moyen de satisfaire ces besoins financiers ?
Faire passer le coût des études d’une quasi-gratuité – 171 euros pour une année de licence, 243 euros pour un master – à un niveau modéré, de 965 euros, mais uniquement pour le master, ne représente jamais que moins de 10 % du prix de revient réel d’une année d’études à l’université (10 050 euros) – la différence étant réglée par le contribuable.
Pas besoin d’être passé par les bancs de l’université pour savoir que devant la colère des élèves et étudiants, tous les régimes politiques – de droite et de gauche – ont calé, voire reculé. Si cruel en est l’énuméré. Mitterrand et la loi Savary (1984), Chirac et la loi Devaquet (1986), de Villepin et le CPE (2006), Sarkozy et la loi Pécresse (2007) à propos de la sélection, sous la pression des syndicats étudiants.
Les redoutables colères estudiantines ritualisent en tabou toute perspective de changement. Elles ont un allié, ce dogme gravé dans le marbre du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 : “La Nation garantit l’égal accès de l’enfant et de l’adulte à l’instruction, à la formation professionnelle et à la culture. L’organisation de l’enseignement ppublic ggratuit et laïqueq à tous les degrés est un devoir de l’État”. Gratuité héritée d’une période où elle ne concernait qu’une proportion marginale de la population. Or depuis, sa massification, son internationalisation et le développement de l’offre de formation créent des besoins de financement croissants dans les établissements. Ce qui fait affirmer aux magistrats de la rue Cambon : “Les besoins financiers des établissements ne sont pas réellement pris en compte, leur financement ne reposant sur les droits
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