Le Nouvel Économiste

‘LA SOCIÉTÉ EST AU BORD DE L’ÉBULLITION’

Professeur de criminolog­ie au Conservato­ire national des arts et métiers (Cnam), à propos de la sécurité en France

- PROPOS RECUEILLIS PAR PHILIPPE PLASSART

Après ‘Les Guetteurs’, une série de témoignage­s des anciens directeurs des services français de renseignem­ent, Alain Bauer publie avec Marie-Christine Dupuis-Danon ‘Les Protecteur­s’ – la Gendarmeri­e nationale racontée de l’intérieur – l’occasion pour le célèbre criminolog­ueg de dresser ppour ‘Le nouvel Économiste’ un état des lieux de la sécurité en France. L’expert ne cache pas son inquiétude. “La société française est dans un état dangereux, au bord de l’ébullition et

parfois du débordemen­t”, diagnostiq­ue-t-il. Le péril vient de l’accumulati­on de risques de toutes natures, dont la sécurité n’est pas le moindre. Notre système sécuritair­e demeure – et pour longtemps encore – sous

La fonction régalienne de la sécurité est une mythologie. À l’origine, le régalien ne s’occupait que de la sécurité des institutio­ns, de la protection du roi, du président, du chef mais pas de la sécurité de tous. L’objectif était d’abord de protéger l’autorité supérieure de l’État, ensuite les frontières contre les invasions extérieure­s et enfin la monnaie, le reste étant secondaire. Ce n’est que progressiv­ement, et en particulie­r avec le Conseil national de la résistance, qu’a été instauré un droit à la sécurité, à côté d’un droit au logement, à la la pression de la menace terroriste dont le dernier attentat à la préfecture de police de Paris est venu rappeler les failles même si, rappelle Alain Bauer, près de soixante tentatives d’attentats ont été déjouées depuis 2016. La situation dans les quartiers où s’opposent, comme des “bandes” rivales, policiers et jeunes pour le contrôle des territoire­s constitue à ses yeux un autre abcès de fixation. Or pour répondre à ces défis et aux autres (atteintes aux biens, violences sur les personnes etc.), notre système est déresponsa­bilisant parce que trop centralisé et cloisonné. Une “incohérenc­e” qui se paie par un sentiment d’insécurité croissant. médecine, à la sécurité sociale et plus tard à l’environnem­ent, etc. Une autre caractéris­tique propre à la France est à prendre en considérat­ion : notre pays est le seul où l’État a construit la nation de façon centralisé­e, la plupart des autres pays étant fédéralisé­s, donc décentrali­sés. Résultat : l’État a décidé de tout faire, Paris organisant tout. Ainsi la police centralisé­e d’État a- t- elle tué les polices locales, qui n’ont commencé à réapparaît­re que dans les années 80-90 alors que dans tous les autres pays, la police reste sous contrôle et gestion locaux. La France est le seul pays où le maire est un agent de l’État en même temps qu’un élu et un officier d’état civil et un officier de police judiciaire. Cela illustre notre goût pour la complicati­on et la confusion. Le corollaire de cette situation est que l’État est comptable de cette offre de sécurité et tenu responsabl­e de ces manquement­s, faute d’intermédia­ire. Notre système sécuritair­e n’est pas à bout de souffle, il est incohérent. Si très bon chef de cuisine, vous décidez de vous autoprocla­mer pâtissier, ce n’est pas sûr que cela marche car ce n’est pas le même métier. Il y a une sorte d’arrogance naturelle dans le système étatique français qui prétend tout savoir, n’avoir besoin de personne, et qui s’étonne même quand on lui demande des comptes sur l’utilisatio­n des deniers publics ou sur l’efficacité des services rendus. La tradition nationale de l’État en France, c’est 1) négation ; 2) minoration ; 3) éjection. Dit en français courant, cela donne 1) ce n’est pas vrai ; 2) si c’est vrai, ce n’est pas grave ; 3) si c’est vrai que c’est grave, ce n’est sûrement pas de ma faute. Cela signe son incapacité à assumer une responsabi­lité quelconque sur ces questions

Une question sécuritair­e multiforme

La question de la sécurité, apparue brutalemen­t dans les années 80, s’est accentuée dans les années 90 pour atteindre un degré d’acuité très élevé aujourd’hui. Cela tient à la mutation de la criminalit­é nationale qui a évolué des atteintes aux biens vers les violences contre les personnes. On est passé de moins de 100 000 agressions par an à près de 450 000, alors que les atteintes en général sont restées à un niveau stable entre 3,5 et 4 millions. La perception entre ces deux types de phénomènes est différente car on se projette plus facilement dans les atteintes à la personne, qui génèrent aussi chez les victimes du stress post-traumatiqu­e. Cela tient essentiell­ement aux vols de portable et aux agressions aux distribute­urs de billets qui n’existaient pas par le passé. D’où une relation différente des citoyens à l’État et à la demande de sécurité.

La criminalit­é est extrêmemen­t adaptative. Quand on sanctuaris­e les logements avec des serrures NF A2P, des alarmes, de la télésurvei­llance, de la vidéosurve­illance et qu’on sécurise les véhicules avec des Neiman, des normes NF A2P et des autoradios non extractibl­es, la population devient alors vulnérable sur la voie publique ! Une victimisat­ion nouvelle et massive s’est développée dans laquelle tout à chacun peut s’identifier. Or l’État n’a pas su répondre à cette demande nouvelle de sécurité parce qu’il a été surpris par un processus qu’il n’a pas vu venir. Et parce qu’il met un temps infini à réagir. Il a fallu dix ans pour savoir qu’il y avait un numéro Imei dans les téléphones et qu’on pouvait les bloquer… De même les particulie­rs ne peuvent-ils toujours pas porter plainte pour un vol sur Internet, c’est à leur banque de le faire, l’État n’ayant de cesse d’essayer d’éviter l’augmentati­on des chiffres de la criminalit­é. Quant à la cybercrimi­nalité, elle est à 99 % de la bonne vieille escroqueri­e au chantage, qui requiert la complicité naïve des usagers, l’utilisatio­n d’outils très sophistiqu­és étant finalement assez rare. Dans ce type de délits, les victimes s’en veulent d’abord à euxmêmes de s’être fait avoir et ne se retournent en général pas contre l’État. Il y a peu de violence dans la cybercrimi­nalité…

Le registre du terrorisme, la communicat­ion et la violence

Le registre du terrorisme est le spectacula­ire. Le terrorisme, c’est de la communicat­ion et de la violence, mais c’est d’abord de la communicat­ion. On n’a jamais réussi à définir le mot terrorisme, il n’y a rien qui ressemble plus à un terroriste qu’un résistant, et à un résistant qu’un terroriste. Lorsque l’ETA politico-militaire fait sauter avec une bombe la voiture de l’amiral Carrero Blanco, Premier ministre du dictateur Franco, applaudiss­ements généraux. La même ETA fait sauter avec la même bombe

une caserne d’une ville en Pays basque après 1978 et le retour à la démocratie, applaudiss­ements plus modérés. La même ETA fait exploser une bombe dans un supermarch­é à Barcelone, réprobatio­n générale. Pourquoi ? La cible est illégitime. Lorsque la cible est la représenta­tion symbolique de l’État, les gens ne se sentent pas directemen­t concernés. Mais lorsque les victimes sont des personnes qui font leurs courses, le point de vue n’est plus le même. Là est le vrai terrorisme, lorsque tout le monde devient la cible et que cela influe massivemen­t sur le moral d’un pays.

Le gang terroriste hybride

Le lendemain du jour où l’Union soviétique s’est effondrée sur elle-même, nous avions perdu notre ennemi principal. Il a fallu se rabattre sur un ennemi de remplaceme­nt, la perte de l’ennemi étant très mauvais pour le moral et pour les budgets. De l’ennemi rouge, on a inventé un pseudo-ennemi jaune, mais rien n’a jamais pu être reproché à la République populaire de Chine en matière de terrorisme extérieur. Rien ne s’est passé par la suite comme prévu. La première organisati­on qui a vu le jour, le GIA (Groupe islamique armé), est liée à la guerre civile algérienne après l’interrupti­on du processus électoral. Le GIA recrute pour la première fois un criminel, Khaled Kelkal, le premier hybride de l’histoire, un prototype de chez nous, de Lyon, qui commettra les attentats de 95 à l’occasion desquels nous découvrons la passerelle entre les criminels et les terroriste­s, le gang terroriste hybride. Il va falloir attendre 17 ans pour avoir le premier de la série, avec Mohamed Merah. Entre-temps, rien ne s’étant passé, on a oublié, et donc perdu de la compétence et de l’expérience.

Les trois cultures du renseignem­ent

Le renseignem­ent recouvre en fait trois métiers et trois cultures. La première culture, c’est celle de l’espionnage. C’est une culture super simple dans laquelle tout est bon à prendre. Comme avec l’aspirateur Dyson, on aspire tout. La deuxième culture, c’est celle du contre-espionnage. C’est le règne du paranoïaqu­e, tout y est secret et lent. Chaque jour qui passe permet d’avoir un contact, une planque, un morceau du réseau supplément­aire, et on demande toujours un jour de plus pour continuer à remonter la filière, avec comme règle le secret absolu parce que la moindre fuite peut détruire l’édifice. La troisième culture, plus récente, et plus difficile parce qu’exactement l’inverse de la précédente, c’est l’antiterror­isme. L’antiterror­isme c’est le temps court. Le bon antiterror­isme, ce n’est pas quand vous arrêtez l’auteur d’un attentat, c’est quand il n’y a pas d’attentat. Le partage est nécessaire pour réussir. Le problème est que vous demandez au même service et aux mêmes agents de faire le matin du contre-espionnage, l’après-midi de l’antiterror­isme. À un moment, il faut choisir. Or on a longtemps privilégié ce qu’on savait faire, à savoir le contre-espionnage. Le top du top ? L’espion soviétique ! Le terroriste islamiste faisait un peu police de deuxième zone. Si bien que pendant très longtemps, la DST, qui avait la culture du contre-espionnage, n’a pas voulu s’occuper d’antiterror­isme, parce que cela l’ennuyait.

Les renseignem­ents généraux avaient une mission plutôt politique et sociale qu’antiterror­iste. Et le dispositif s’est peu à peu dissous. Comme les Américains, on a succombé au fétichisme technologi­que en croyant sérieuseme­nt que l’inspecteur Google allait lutter contre l’imam YouTube. Mais les résultats n’ont pas été au rendez-vous. On a eu l’illusion que cela marchait parce qu’entre 2001 et 2012, on connaissai­t les structures proches de ce qu’on croit devoir appeler Al-Qaïda, parce qu’on les avait formées, financées, aidées, développée­s. Les services algériens, palestinie­ns, israéliens, français avaient les moyens d’intervenir et de travailler par anticipati­on, si bien que tous les attentats en France ont échoué sauf deux opérations, dont celle de l’Airbus Alger. À partir de Kelkal, on sait qu’il va y avoir d’autres Kelkal, mais ils n’arrivent pas assez vite. Merah signe le moment où le renseignem­ent commence à être défaillant. L’individu est parfaiteme­nt détecté, le brave policier local l’identifie comme danger public. Par contre, la DCRI [désormais Direction générale de la Sécurité intérieure, ndlr] nationale veut le recruter comme indicateur/informateu­r et elle se fait “enfumer”. La police identifie les frères Kouachi, les suit, les écoute et les intercepte. Mais au moins elle a essayé. Koulibali est libéré sans être étiqueté terroriste, puis il disparaît et vadrouille pendant six mois avec vingt téléphones portables en changeant de ville tous les soirs pour être sûr qu’il n’est pas suivi. Or effectivem­ent, personne ne le suit, ce qui est un désastre majeur. Deux oreilles, pas de cerveau, le service des renseignem­ents n’a plus d’analystes.

Besoin criant d’analystes

Les analystes, il faut les former, ils ne s’achètent pas au supermarch­é. La situation s’est améliorée depuis 2015. Il y a désormais une école du renseignem­ent qui fait un travail considérab­le de très bonne qualité, mais le retard à rattraper est considérab­le. L’informatio­n est mieux traitée, on est sorti du tout technologi­que. On fait de l’hybride, du lien entre la technologi­e qui accélère les process, et le cerveau humain qui a l’intuition et valide. Et cela marche mieux.

L’attentat à la préfecture de police de Paris

Michel Rocard avait une phrase merveilleu­se : “en matière de grande catastroph­e administra­tive, il faut toujours privilégie­r la connerie au complot”. La connerie est à la portée de tous et elle est extrêmemen­t répandue. Le complot nécessite beaucoup d’intelligen­ce et d’organisati­on, c’est très rare. Dans ce cas précis, l’individu est repéré, signalé et l’intermédia­ire chargé du signalemen­t de la déradicali­sation demande à celui qui le signale s’il veut vraiment le signaler, un peu comme si une femme venait expliquer que son mari la battait, mais que surtout, il ne fallait pas déposer plainte, mais juste une main courante. À un moment donné, dans la procédure, le facteur humain est ce qui a toujours un effet majeur. C’est valable de tout temps, à Waterloo, à Azincourt, à Diên Biên Phu, et c’est valable partout, pour Snowden à la NSA. Depuis 50 ou 60 ans maintenant, il y a des commission­s d’enquête après les grandes catastroph­es industriel­les, écologique­s, policières, terroriste­s… Elles se terminent toutes par les trois mêmes constats. 1) on savait tout ou presque avant ; 2) on n’a pas compris ce qu’on savait ; 3) ce serait bien si cela ne se reproduisa­it pas. Pourquoi est-ce que ça se reproduit ? Parce qu’on ne mise pas sur la capacité du cerveau à fonctionne­r. Dans l’attentat de la préfecture de Paris, il y a une faille structurel­le qui tient à l’incapacité à dire les choses et à assumer la responsabi­lité du signalemen­t. À cela s’ajoute l’aspect routinier des tâches quotidienn­es qui fait baisser le niveau de responsabi­lité, de lucidité et de vigilance, jusqu’au jour où il se passe quelque chose.

Une institutio­n policière en crise

La police est dans une crise considérab­le, sociale, culturelle, matérielle, identitair­e. On y voit des mouvements sociaux comme on en a rarement eu, qui ne sont pas revendicat­ifs essentiell­ement sur les salaires, mais sur les moyens, les voitures, le papier, les commissari­ats, les peintures, les vestiaires. Il y a une

situation de paupérisat­ion invraisemb­lable dans le dispositif. Et puis deuxièmeme­nt, il y a un manque de reconnaiss­ance et de respect vécu par les policiers. Enfin, ils ne peuvent pas s’identifier, ils n’ont pas de héros. La gendarmeri­e fonctionne mieux. La structure tient à peu près le choc. On sent qu’il y a un corps derrière le chef, le général Richard Lizurey après le général Denis Favier, et que le corps fonctionne. Il leur manque toujours de l’essence au mois de novembre. Les logements de gendarmes sont dans un triste état, les casernes sont à rénover, etc., mais il y a eu une unité de corps. Et puis, ils ont un héros, Arnaud Beltrame, et ça change tout. La capacité à se projeter dans la figure du héros est une chose absolument essentiell­e. C’est un héros parce qu’il n’est pas qu’une victime. Le problème de la police est qu’elle a beaucoup de victimes sans arriver à imaginer un héros qui lui redonnerai­t confiance, courage, identité. Le directeur de la police nationale est quelqu’un de très bien mais il n’arrive pas à sublimer cette fonction. Les gendarmes ne sont pas dans une crise identitair­e, ni morale. Alors que les policiers vous parlent de beaucoup de sujets différents qui se concentren­t dans une espèce de crise identitair­e considérab­le. Il faut régler prioritair­ement la question des heures supplément­aires, les payer et puis arrêter. Ensuite créer les conditions d’un process véritable de gestion DRH et nommer un vrai DGPN [ directeur général de la Police nationale, ndlr] qui serait un “flic”, parce que c’est l’une des rares institutio­ns où des personnali­tés qui sont nommées à la direction n’y ont jamais exercé. Il y a aussi le sujet du service public rendu aux citoyens, car il ne s’agit pas seulement une question de bien-être des policiers. Il y a enfin des sujets qui doivent être résolus, notamment la légitimité des inspection­s générales quand elles concernent autre chose que des affaires internes de la police. La police sanctionne énormément, à elle seule la moitié de la fonction publique. Mais l’inspection n’est pas reconnue légitime quand elle s’occupe des relations entre la police et des citoyens. Je suis favorable à ce qu’on mette, à l’anglosaxon­ne ou à la canadienne, un représenta­nt du défenseur des droits dans chaque enquête de l’IGPN [Inspection générale de la Police nationale , ndlr] sur un drame ou une relation dure entre les policiers et les citoyens. Ce serait un progrès et cela répondrait à un souci moral.

Ordre contre autre ordre dans les quartiers

Les Français sont très majoritair­ement attachés à leur police ou à leur gendarmeri­e à qui ils font confiance. Le sujet, ce sont les relations avec la population la plus jeune. Les difficulté­s viennent des deux côtés. Les contrôles d’identité abusifs, l’incapacité à se venger de ce qu’on subit toute la journée comme quolibets, bras d’honneur et autres joyeusetés le soir dans les contrôles d’identité, tout cela existe. Paradoxale­ment, la police dans les quartiers forme une autre bande. Ce n’est pas la force de la loi, c’est l’ordre contre un autre ordre. Ils sont en concurrenc­e, en compétitio­n pour un territoire. Or cette reconquête territoria­le ne doit pas passer uniquement par la force pour réhabilite­r la présence de la police dans les quartiers. La question se pose aussi pour les pompiers ou le personnel médical, alors même qu’ils ne contrôlent pas les identités et qu’ils ne tutoient personne. Résultat : devant les difficulté­s, on est plutôt dans une dynamique de retrait pour éviter les ennuis. Alors qu’il faudrait au contraire assumer un processus de reconquête du territoire passant par la mobilisati­on des services publics. Pour des raisons budgétaire­s et comptables, les services publics se retirent mais du coup, on dépense plus pour réparer. Un mauvais calcul.

La situation très inquiétant­e de la société française

La société française est dans un état dangereux, au bord de l’ébullition et parfois du débordemen­t. La France est un moteur diesel qui met longtemps à chauffer mais quand il explose, il explose bien. Il faut toujours éviter les comparaiso­ns hâtives, mais je trouve que la situation ressemble beaucoup aux années 70 quand les ouvriers Fiat explosent le Parti communiste et les syndicats avec un mot d’ordre qui s’appelle “nous voulons tout”. Ce qui va créer les premières brigades rouges qui vont commettre des attentats. Il y a un moment où tout mouvement social accouche d’une génération politique et d’une avant- garde radicale. Nous avons eu un mouvement social, la génération politique n’est pas clairement identifiée, mais l’avant- garde radicale elle s’exprime de façon violente, notamment à travers les Black blocks. Les mouvements sont très contradict­oires. On se bat d’un côté contre le glyphosate et le même jour, Extinction Rebellion mène ses actions. La société est tiraillée et en général, quand on tire trop fort sur un tissu, il se déchire. La situation est inquiétant­e, plus inquiétant­e qu’elle n’a jamais été au cours des cinquante dernières années probableme­nt, parce que l’avenir n’est plus synonyme de progrès, parce que les risques s’accumulent – risque guerrier, nucléaire, terroriste, économique, intelligen­ce artificiel­le, climatique, désagrégat­ion de l’État. Tous ces éléments- là additionné­s amènent à l’hypothèse très forte d’une crise majeure avec phénomènes sociaux à la clé.

La société française est dans un état dangereux, au bord de l’ébullition et parfois du débordemen­t”

Bio express

Un guetteur

Professeur de criminolog­ie appliquée au Conservato­ire nationale des arts et métiers ainsi qu’à New York et à Shanghai, directeur de la chaire des sciences criminelle­s et policières à l’École des officiers de la Gendarmeri­e nationale, Alain Bauer est consultant en sécurité. Il a été également grand maître du Grand Orient de France de 2000 à 2003. Après ‘Les Guetteurs’, une série d’entretiens des anciens directeurs des services français de renseignem­ent, publié chez Odile Jacob (mars 2018), il publie cette rentrée, toujours avec Marie-Christine Dupuis-Danon et chez Odile Jacob, ‘Les Protecteur­s – la gendarmeri­e nationale racontée de l’intérieur’ dont on trouvera des bonnes feuilles sur le site du nouvel Économiste.

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“Notre système sécuritair­e n’est pas à bout de souffle, il est incohérent”
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Michel Rocard avait une phrase merveilleu­se : “en matière de grande catastroph­e administra­tive, il faut toujours privilégie­r la connerie au complot”
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“La police est dans une crise considérab­le, sociale, culturelle, matérielle, identitair­e. On y voit des mouvements sociaux comme on en a rarement eu”

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