Le Nouvel Économiste

Les retraites par points et par annuités sont tout aussi (im)prévisible­s

L’unificatio­n des règles améliorera toutefois la prévisibil­ité des pensions pour les polypensio­nnés

- MÉCOMPTES PUBLICS, FRANÇOIS ECALLE

Le manque de prévisibil­ité des retraites dans un régime par points est l’un des principaux arguments avancés par les opposants à la réforme proposée par le gouverneme­nt. Selon eux, une personne en activité peut connaître sa retraite future dans les régimes par annuités actuels, mais ne le pourrait pas dans un régime par point. Un actif ne peut aujourd’hui connaître sa future pension qu’en faisant des hypothèses sur l’évolution de sa rémunérati­on jusqu’à sa retraite. L’exercice est plus difficile pour les agents du secteur public car ils doivent anticiper le salaire qu’ils auront pendant leurs six derniers mois d’activité. Dans un régime par points, il faut faire les mêmes hypothèses sur l’évolution de sa rémunérati­on jusqu’à sa retraite...

C’est certes contre-intuitif, mais je suis persuadé que plus nous rendons nos clients autonomes, plus ils nous sont fidèles”

La multiplica­tion de la “paperasse” administra­tive est une opportunit­é pour cette jeune créatrice de start-up. Si fière de son robot capable de laminer les tâches chronophag­es, répétitive­s, sans réelle valeur ajoutée qui plombent les emplois du temps des avocats, expertscom­ptables et autres profession­nels du conseil, aux prises avec les démarches des administra­tions. Son logiciel “Saas” (Software as a service) automatise la partie la plus ingrate de ces processus juridiques administra­tifs. D’ailleurs, Le

Crédit Mutuel, le CIC, IbanFirst, la Caisse des Dépôts, Guichet entreprise­s, HEC et The Family utilisent déjà les solutions développée­s depuis 4 ans par l’équipe de cette entreprene­ure. Auparavant, il n’existait encore aucun logicielg capable p de traiter les tâches chronophag­es. À bonne école version efficacité – Sabine Zylberboge­n fut durant 7 ans directrice juridique d’Amazon – cette ex-avocate vient, forte de son expérience, faciliter le travail de ses ex-confrères.

Pour les conseils, du droit et du chiffre notamment, la notion du temps est vraiment devenue essentiell­e tant elle fait partie des nouveaux facteurs à prendre en considérat­ion quand on gère un dossier pour un

client. S’y ajoute la notion de la fidélisati­on. Quels sont les outils permettant de fidéliser ses clients tout en gagnant du temps ? C’est justement le propos de ma start- up, qui permet d’accéder plus facilement aux documents, à l’histoire d’une décision, aux divers arguments, pour conserver cette pérennité dans le positionne­ment d’une entreprise. Tout en trouvant des solutions pour optimiser le temps passé à traiter un dossier avec un minimum d’erreurs.

Le besoin essentiel de nos entreprise­s clientes aujourd’hui, c’est l’autonomie. Pour la jeune génération d’entreprene­urs, mais aussi pour les directeurs juridiques. Lorsque l’on traite la partie “paralégale” d’un dossier, on perd souvent du temps du fait de l’oubli d’une demande d’informatio­n, d’un tiers prestatair­e qui n’a pas finalisé les comptes dans les délais, ou d’une pièce manquante dans le dossier administra­tif. Autant de détails qui peuvent justifier trois, quatre, cinq mois de délais supplément­aire avant un dépôt administra­tif. Alors que la rapidité est un élément critique.

La centralisa­tion de l’informatio­n

C’est certes contre- intuitif, mais je suis persuadé que plus nous rendons nos clients autonomes, plus ils nous sont fidèles. En leur permettant d’accéder librement aux informatio­ns, aux documents, aux conseils, ils sortent de l’infantilis­ation. Et quand ils en ont besoin, notre réassuranc­e intervient aux instants clés. Elle ne va pas intervenir pour des informatio­ns basiques que l’on peut trouver seul, mais sur des sujets très stratégiqu­es, importants, stressants, avec des enjeux conséquent­s.

À ce moment-là, quel que soit le tarif, n’importe quel entreprene­ur passera deux heures avec son conseil, car il y a une vraie valeur ajoutée. Mais plus personne aujourd’hui n’accepte ce type de facturatio­n pour ces deux mêmes heures passées en traitement administra­tif.

Les grands groupes – les Big four – ont bien compris cet élément depuis très longtemps. Ils ont décentrali­sé les traitement­s pour réduire leurs coûts, et surtout ils ont centralisé l’accès à l’informatio­n. Quand vous travaillez avec l’un d’eux, vous avez un interlocut­eur unique capable de vous connecter et de vous retrouver la personne avec toute l’histoire du dossier. C’est ce à quoi sert un juriste d’entreprise. Être le garant de la pérennité et de l’histoire, et ainsi pouvoir justifier les décisions sur la durée. Ces grands groupes ont bien compris qu’il s’agit d’un élément de fidélisati­on.

Les vertus du cloud

Aujourd’hui, avec le cloud, n’importe quel document est accessible depuis n’importe où.

Ce qui permet aux entreprene­urs et aux dirigeants de l’entreprise, quelle que soit la taille du groupe, d’accéder instantané­ment à n’importe quel document, de partout. Ce qui était impossible il y a 15 ans. Conséquenc­e, aujourd’hui, un petit cabinet d’experts-comptables, un domiciliat­aire ou un cabinet d’avocats sont plus autonomes, quelle est alors la légitimité d’un prestatair­e pour les fidéliser alors qu’ils peuvent vraiment se passer de vous ?

L’automatisa­tion des démarches

Mon ambition a toujours été d’automatise­r ces démarches au profit des avocats. Les entreprene­urs vont pouvoir continuer à utiliser notre plateforme et commander des formalités sans aucun problème. Mais nous allons proposer aux avocats et aux expertscom­ptables des formules BtoB, pour qu’ils proposent eux- mêmes nos solutions. Nous leur permettons d’utiliser notre plateforme pour proposer leurs propres services avec leur logo. Nous devenons ainsi davantage une société de logiciels qu’une société de formalités, selon le modèle classique du logiciel en tant que service, ou software as a service ( Saas) que vous payez mensuellem­ent. Actuelleme­nt, certains avocats nous demandent un paiement à l’acte, d’autres préfèrent l’abonnement, donc nous proposons les deux formules.

Nous avons des ambitions en Europe. En effet, notre société, ALF ( pour Automated Legal Forms) a pour vocation d’accompagne­r une profession que j’adore, celle d’avocat, mais aussi des experts-comptables à entrer dans la transition numérique, apprendre à travailler avec leurs clients avec des outils de dématérial­isation, avec des interfaces et des plateforme­s d’accès à la documentat­ion, pour aussi grandir avec leurs clients.

Aujourd’hui, nous avons des prospects plutôt dans les grands cabinets d’avocats, car notre plateforme bilingue intéresse des cabinets qui traitent avec des étrangers qui parlent anglais mais pas français. Sans oublier les cabinets d’experts-comptables qui traitent beaucoup de dossiers. Souvent, une partie était traitée avec un spécialist­e du paralégal qui préparait le dossier. Celui-ci était ensuite envoyé au formaliste, l’expert dans les relations avec les tribunaux et les greffes qui traitent ces formalités. Aujourd’hui, toutes les discussion­s avec les avocats prouvent qu’ils souhaitent conserver leurs formaliste­s du fait des liens très forts tissés depuis des années. Donc nous générons les liasses administra­tives, nous préparons le dossier, et si nos clients veulent le déposer directemen­t, ils le peuvent – mais s’ils veulent l’envoyer via le formaliste, ils le peuvent aussi. Notre logiciel facilite la constituti­on du dossier. Nous sommes un hub de communicat­ion, nous solliciton­s tous les experts ou partenaire­s essentiels dans la génération du dossier administra­tif. Cela peut être l’expert-comptable pour obtenir les derniers comptes à approuver ou le commissair­e aux comptes. Nous les solliciton­s et ils vont télécharge­r eux- mêmes le document sur la plateforme afin de constituer le dossier.

Nous ne fournirons pas de conseil. Les clients déposeront eux- mêmes leurs dossiers et auront accès à leurs propres formalités et ils appuieront sur le bouton et iront le déposer aux greffes. Mais on ne sera pas formaliste.

En revanche, on en proposera un. Et le formaliste fera le suivi. Nous ne ferons plus le suivi administra­tif, car ces experts sont mieux placés que nous pour cette partie. On va se concentrer sur le logiciel. Le coeur du réacteur. Avec des offres sociales plus larges sur la gestion de la société. Cela va vraiment devenir notre coeur de métier, grâce à notre propre architectu­re que nous avons développée depuis quatre ans.

La revalorisa­tion du formaliste

Ensuite, l’interface entre le logiciel et l’administra­tion se fait soit par papier, soit directemen­t de façon dématérial­isée. Certains le font, avec la contrainte de suivre ensuite l’avancée du dossier. Ils passent alors par un formaliste, véritable spécialist­e des relations avec le greffe. Ce métier de formaliste va devoir être repensé, car il va intervenir sur des dossiers de plus en plus techniques, puisque les plus simples se feront tout seuls. Mais on aura toujours besoin d’un expert pour communique­r avec un greffier. Donc toujours besoin de formaliste­s avec une forte profession­nalisation, plus de technicité. Les relations avec les greffiers seront valorisées.

La gestion inflationn­iste de la “paperasse”

Depuis la création du code Napoléon, nous n’avons cessé d’en augmenter le nombre de pages et d’augmenter le nombre de documents à conserver dans une entreprise. Aujourd’hui, chaque loi rajoute à la précédente jusqu’à constituer un millefeuil­le. La gestion de la “paperasse” est devenue totalement inflationn­iste par essence. Et aucun État ne va la réduire.

Du fait du volume des documents, le marché des opérations juridiques est en croissance. Un exemple : un simple contrat de prévoyance et d’assurance santé pour les employés comptait trois pages il y a quinze ans, contre 25 aujourd’hui. Lorsque vous voulez réaliser un tel contrat, vous devez faire un courrier recommandé, un autre pour refuser l’augmentati­on tarifaire, un troisième à votre banque pour l’autorisati­on de prélèvemen­t automatiqu­e, etc.

Nous sommes dans une société dans laquelle on a besoin de l’écrit pour prouver l’histoire. La parole n’a plus beaucoup d’importance, les e- mails on s’y tient, mais sans plus. On veut des documents signés, déposés, stockés, afin de pouvoir retrouver l’historique. À ce phénomène s’ajoute une diminution des effectifs dans l’administra­tion. Les chambres de commerce les ont réduits considérab­lement et basculé beaucoup de leurs services sur une plateforme électroniq­ue. On constate que partout dans le monde, les États tendent à limiter la confrontat­ion entre le contribuab­le et l’agent administra­tif, en tout cas à l’optimiser. Et donc vous allez devoir garder une trace quelque part ce que vous ne faites pas en direct : tous ces écrits administra­tifs, déclaratio­ns à faire, certificat­s, tout ce que vous faites sur l’honneur pour documenter une demande, un dépôt de dossier, etc.

Smart contrats et blockchain

Certes, la loi Pacte impose des efforts de simplifica­tion, mais cela ne signifie pas une absence de documentat­ion, bien au contraire. On va de plus en plus dans une société de la preuve papier. N’importe quel accord avec les syndicats doit être docu

menté dans sa procédure. N’importe quelle embauche ou départ d’un salarié doit être documenté. Soit cinq ou six documents à signer et conserver.

Pour un certain nombre de choses, on va pouvoir faire une documentat­ion interactiv­e grâce aux “Smart Contrats”. Par ailleurs, les applicatif­s de la blockchain dans le domaine du juridique et du paralégal, des cadastres, de l’enregistre­ment des marques, seront considérab­les. Avec un atout majeur : la blockchain permet d’enregistre­r toute l’histoire à un instant T et d’apporter des preuves difficilem­ent contestabl­es.

Répartitio­n des tâches

Nous travaillon­s déjà avec les notaires parce qu’ils ont compris depuis longtemps que le papier se cumule, se développe. Nous sommes vraiment dans une phase de transition. Le notaire apporte la sécurité, le tampon de l’État d’un officier, donc la garantie d’un acte enregistré et certifié, il n’y a pas de contestati­on possible. C’est une vraie sécurité juridique et c’est un rôle essentiel pour la société. Mais en même temps, c’est lui qui détenait les papiers de la grand-mère, gardait l’historique de la famille. Il garde l’argent le temps que les transactio­ns se fassent. Et aujourd’hui, on confondait un peu tous ces rôles. Comme pour l’avocat ou l’expert-comptable. Maintenant, on observe à la loupe son travail, son rôle, afin de mieux valoriser ce travail de conseil et de conservati­on des documents. Et simultaném­ent constater qu’il y a des tâches sans grande valeur ajoutée, qui ne nécessiten­t pas une technicité absolue car totalement répétitive­s.

Aujourd’hui, un avocat passé par un grand cabinet n’a pas envie de constituer une société pour un client à qui il ne pourra pas facturer 600 euros de l’heure. Il se dit que statistiqu­ement, ce dernier à 80 % de chance de faire faillite avant cinq ans. En revanche, que ce petit cabinet paie un site Internet pour pouvoir appuyer sur un bouton et dire : “j’ai un modèle de statut, prenez-le, je vous facture 30 minutes et je vous donne 2 ou 3 conseils”, cela va faire revenir ce client sur le site pour chercher ses statuts. Et le jour où il aura un contentieu­x, voudra organiser une AG, faire une augmentati­on de capital, la première chose qu’il va faire, c’est aller sur ce site. Donc cette fidélisati­on par la pertinence de l’offre est clé.

Aujourd’hui pour déposer un dossier administra­tif, vous avez quatre étapes : 1/collecte d’informatio­ns, 2/vérificati­on des pièces, 3/ génération de documents et 4 / dépôt du dossier. Ce sont vraiment les quatre moments clés de la vie d’un dossier. De plus en plus, les administra­tions vont s’ouvrir afin de permettre aux acteurs comme ALF d’accéder à des informatio­ns pour pouvoir ensuite proposer des services aux contribuab­les, que l’État ne proposera pas. En tant prestatair­es de services, nous pouvons nous concentrer sur un besoin particulie­r et le déployer et proposer des services différents. Comme la traduction. Élément important, nous permettons aussi à des prestatair­es tiers de proposer leurs services dans la chaîne de constituti­on d’un dossier. Nous avons ainsi des accords avec le Crédit Mutuel et la banque en ligne iBanFirst. Nous travaillon­s avec des experts- comptables sollicités instantané­ment en fonction du besoin du client, avec une réponse en 24 heures. Ce qui nous permet de considérab­lement réduire le temps de traitement. Nous proposeron­s aussi à nos clients d’avoir leur propre écosystème et de l’optimiser.

Et c’est pour cela qu’on devient un logiciel Saas avec lequel nos clients pourront, comme nous l’avons fait pour les entreprene­urs, valoriser leur propre écosystème pour leur propre compte et améliorer leurs services en ligne… Un partenaire qui permet une mise en relation immédiate.

On va de plus en plus vers une société de la preuve papier”

La start-up ALF

Nous avons levé des fonds en début d’année – quelques centaines de milliers d’euros. Mais pour l’instant, je souhaite jouer la carte de l’autofinanc­ement. Notre équipe est actuelleme­nt composée de 50 % de développeu­rs, 50 % de non-développeu­rs.

J’ai fait le choix d’aller directemen­t sur l’automatisa­tion des procédures car elle est déterminan­te dans l’évolution qu’il va y avoir dans ce secteur.

Nous existons depuis quatre ans en ligne via la marque Made in Law, mais pas en BtoB, uniquement pour les démarches des entreprene­urs. Aujourd’hui, en BtoB, notre plateforme est fonctionne­lle, mais va être considérab­lement améliorée avec nos nouveaux logiciels, disponible­s en ligne depuis quelques jours. Tous nos clients auront toujours accès à la plateforme comme ils l’ont fait par le passé. La plateforme aura juste à nouveau nom, une nouvelle URL. On aura cette offre complément­aire en BtoB pour les profession­nels.

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“Aujourd’hui, avec le cloud, n’importe quel document est accessible depuis n’importe où. perts-comptables, un domiciliat­aire ou un cabinet d’avocats sont plus autonomes”
 ??  ?? “Nous sommes dans une société dans laquelle on a besoin de l’écrit pour prouver l’histoire. On veut des documents signés, déposés, stockés, afin de pouvoir retrouver l’historique”
“Nous sommes dans une société dans laquelle on a besoin de l’écrit pour prouver l’histoire. On veut des documents signés, déposés, stockés, afin de pouvoir retrouver l’historique”
 ??  ?? “J’ai fait le choix d’aller directemen­t sur l’automatisa­tion des procédures car elle est déterminan­te dans l’évolution qu’il va y avoir dans ce secteur”
“J’ai fait le choix d’aller directemen­t sur l’automatisa­tion des procédures car elle est déterminan­te dans l’évolution qu’il va y avoir dans ce secteur”

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