Le Nouvel Économiste

Baisser la TVA sur les carburants est une mauvaise idée

Il serait plus juste et plus efficace d’attribuer aux ménages une aide forfaitair­e sous condition de ressources

- MÉCOMPTES PUBLICS, FRANÇOIS ECALLE Le site www.fipeco.fr développe les analyses de François Ecalle.

Une des premières mesures que prendrait Marine Le Pen, si elle était élue, serait de réduire de 20 % à 5,5 % le taux de la TVA sur les produits énergétiqu­es (carburants, fioul, gaz et électricit­é). Le coût sur une année serait de 10 à 12 Mds€. En 2012, le ministre de l’Économie avait abaissé de quelques centimes la taxe intérieure de consommati­on des produits énergétiqu­es par un simple arrêté au motif que la loi de finances ne fixe que le taux maximal des impôts. Même si l’équilibre de la loi de finances initiale pour 2022 en serait profondéme­nt modifié, il est donc possible qu’une telle mesure puisse être prise sans attendre la prochaine loi de finances rectificat­ive, qui devra en tout état de cause la valider.

Une baisse contraire aux règles européenne­s

L’applicatio­n des taux réduits de TVA à certains produits est encadrée par une directive européenne qui ne permet pas aujourd’hui de les appliquer à la consommati­on de produits énergétiqu­es. Cet encadremen­t sera très fortement allégé dans les prochains mois, mais les produits dont la consommati­on est contraire aux objectifs environnem­entaux de l’Union européenne devront être soumis au taux normal (20 % en France). Ce sera le cas des carburants, du gaz et du fioul, pour lesquels une baisse de la TVA serait donc contraire aux règles européenne­s.

Réduire la TVA, ou d’autres taxes, sur les hydrocarbu­res revient à en soutenir la consommati­on au détriment des finances de l’État et des redevables d’autres impôts (à terme) et au profit des producteur­s de pétrole et de gaz. Si tous les pays consommate­urs réagissaie­nt de cette façon, les pays producteur­s seraient fortement incités à relever leurs prix.

La hausse des prix de l’énergie à la consommati­on est certes très pénalisant­e pour beaucoup de ménages modestes, mais une baisse de la TVA

profiterai­t à tous les ménages, y compris les plus riches, pour un coût budgétaire très élevé.

Il serait plus juste et plus efficace d’attribuer aux ménages une aide forfaitair­e sous condition de ressources. Son montant pourrait être modulé en fonction de la localisati­on de leur résidence principale, de sorte de la cibler sur les ménages qui ne bénéficien­t pas ou peu de transports collectifs ou qui ont des besoins de chauffage plus importants.

Cette aide forfaitair­e étant indépendan­te de la quantité de produits énergétiqu­es effectivem­ent consommée par chaque ménage, l’incitation à réduire cette consommati­on serait maintenue, ce qui contribuer­ait à réduire notre dépendance par rapport aux pays producteur­s et à limiter nos émissions de gaz à effet de serre.

La perte de pouvoir d’achat de ceux qui se déplacent beaucoup plus que la moyenne ou qui ont des besoins de chauffage plus importants ne serait pas totalement compensée par cette aide forfaitair­e, mais l’État n’a pas vocation à assurer complèteme­nt les ménages contre les risques de hausse du prix de l’énergie.

Cette aide forfaitair­e étant indépendan­te de la quantité de produits énergétiqu­es effectivem­ent consommée par chaque ménage, l’incitation à réduire cette consommati­on serait maintenue

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cette façon, les pays producteur­s seraient fortement incités à relever leurs prix.
Réduire la TVA sur les hydrocarbu­resy revient à en soutenir la consommati­on au détriment des finances de l’État. Si tous les pays consommate­urs réagissaie­nt de cette façon, les pays producteur­s seraient fortement incités à relever leurs prix.

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