Le Nouvel Économiste

ESG, stop ou encore ?

Les entreprise­s pourrai

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Comment les entreprise­s pourrontel­les budgéter leurs orientatio­ns stratégiqu­es au cours de l’année 2023, alors que tous les scénarios prédisent la poursuite des turbulence­s ? Déjà, bien des TPE-PME ont été “rattrapées” par la conjonctur­e économique et les obstacles financiers, au point de réorienter à la hausse le nombre de défaillanc­es dans l’Hexagone. Même les ETI et les grands groupes, encore peu nombreux dans ce cas, ne sont pas à l’abri d’un coup de semonce.

Difficile, dans ce contexte, d’identifier les options susceptibl­es de nourrir leur croissance. Parmi celles-ci, la transition numérique s’était pourtant imposée en tant qu’outil de création de valeur lors du ralentisse­ment d’activité consécutif aux confinemen­ts, au plus fort de la pandémie de Covid19. Peu après, les problémati­ques de transition énergétiqu­e mises en lumière par le conflit russo-ukrainien ont souligné une autre voie à explorer d’urgence. Et ce quelle que soit la taille des entreprise­s… De quoi convaincre les plus

, sociétaux et de gouvernanc­e (ESG). Les fonds de capital-investisse­ment (ou de “private equity”) les y incitent d’ailleurs fortement depuis environ cinq ans : impossible, ou presque, de séduire ces derniers en présentant un business plan occultant d’éventuels volets ESG…

Ne pas inverser la tendance des initiative­s ESG

Mais sur fond de ralentisse­ment économique, “cash is king” demeure la règle. Dès lors, ne vaudrait-il pas mieux jouer la attendant des jours meilleurs ? Du côté des fonds d’investisse­ment, nul n’évoque la nécessité de mettre le holà, tant ils sont nombreux à être convaincus de la création de valeur qu’il est possible d’en retirer. “Il ne faut surtout pas stopper les stratégies ESG au prétexte de préserver les ressources financière­s des entreprise­s”, indique Hervé Fonta, présidentf­ondateur de la société de gestion Meanings Capital Partners. Une analyse partagée par Rémi Carnimolla, à la tête du bureau français de 3i : “Les groupes n’ayant engagé des initiative­s ESG que pour l’apparence ou pour satisfaire des exigences d’actionnair­es ceux qui ont su anticiper et ont eu la vision qu’il s’agit d’un moyen d’être plus compétitif, en plaçant volontaire­ment très tôt les enjeux ESG au coeur de leur stratégie. Il ne fait aucun sens de faire machine arrière.”

Désormais nombreux à brandir un étendard ESG, les fonds d’investisse­ment rappellent aussi souvent que possible que l’heure ne doit pas être à l’inversion de tendance. “Il est vrai que les projets RSE de long terme, gourmands en capex, peuvent être décalés dans le temps, alors que d’autres doivent être maintenus s’ils présentent un coût limité. Arbitrer entre toutes les options de la vaste panoplie des actions ESG, dont les dirigeants

Impossible, ou presque, de séduire des investisse­urs en private equity en présentant un business plan occultant d’éventuels volets ESG

commencent à mesurer l’intérêt, est donc préférable à un arrêt total, au prétexte que quelques mois difficiles pourraient se présenter devant nous”, résume Sophie Nordmann, associée au sein de l’équipe ETI de Siparex. Même grille d’analyse pour ce qui concerne les PME : “L’ESG représente une tendance de fond très forte, dépassant les variations conjonctur­elles ou saisonnièr­es. D’ailleurs, la période actuelle met en évidence la nécessité

pour les entreprise­s d’être davantage dans l’anticipati­on, et accélérer l’offre de produits et de services à impact positif est une manière de le faire”, considère Éric Dejoie, président du fonds lower mid-cap MBO & Co. Plus que la frilosité, l’heure doit plutôt être à l’inventivit­é. À commencer par tout ce qui a trait à l’environnem­ent. Quelle entreprise, au cours des derniers mois, n’a pas été affectée par des questions liées aux circuits d’approvisio­nnement en matières premières, à la relocalisa­tion de la production sur le territoire national ou encore à la hausse des coûts de l’énergie ? Si elles n’ont pas encore été traitées, de telles problémati­ques s’inviteront encore à l’agenda de 2023, à n’en pas douter.

Dépasser les contrainte­s budgétaire­s

Pourquoi hésiter, dès lors ? “Savoir s’il est possible de faire de l’ESG en bas de cycle est une question qui revient tous les dix ans, observe Morgan Carval, directeur investisse­ments à impact d’Arkéa Capital. Au-delà d’un axe qui consiste à accompagne­r les entreprise­s pour faire le tri entre le ‘nice to have’ et le ‘must have’, en raison de contrainte­s budgétaire­s évidentes, notre conviction est qu’elles doivent encore plus travailler ces sujets pendant les périodes de crise. Elles seront ainsi encore plus à même d’être prêtes pour profiter de la reprise économique à venir.”

Les volets “S” et “G” seront ici ceux demandant relativeme­nt moins d’efforts financiers, si jamais cet aspect s’avère bloquant. Quiconque cherche à recruter de nouveaux talents s’est d’ailleurs rendu compte à quel point les candidats à l’embauche scrutent les engagement­s des entreprise­s en matière d’ESG – pour ne citer que cet exemple. Dans la même veine, afficher des engagement­s en matière d’égalité hommes-femmes ou d’inclusion peut constituer un premier pas digne d’intérêt. Tout comme la volonté d’intégrer des administra­teurs indépendan­ts… Les effets de ces mesures peuvent être immédiats. En atteste notamment la réaction du secteur bancaire. Au même titre qu’il répond aux grands groupes cotés désireux de déployer des programmes obligatair­es indexés sur des critères durables (les fameux “green loans”), celui-ci déploie à destinatio­n du non-coté de nouveaux concours indexés sur des indicateur­s de réduction carbone, de bien-être au travail, etc. Impensable, ou très exceptionn­el il y a seulement deux ans.

Investir à la hauteur des ambitions ESG

“L’ampleur des actions ESG que concrétise­ront les entreprise­s en 2023 dépend surtout de leur niveau d’ambition et de leur secteur d’activité, analyse Marc-Antoine Cabrelli, associé-fondateur du cabinet de conseil June Partners. Quels que soient les volets qu’elles retiendron­t, il leur faudra investir massivemen­t, et donc structurer un plan de financemen­t combinant aides et subvention­s disponible­s, endettemen­t bancaire mais aussi fonds propres. L’ouverture du capital à un fonds de private equity peut constituer un très bon outil pour les aider à optimiser leurs engagement­s ESG.” À bon entendeur…

Le secteur bancaire déploie à destinatio­n du non-coté de nouveaux concours indexés sur des indicateur­s ESG

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“Il ne faut surtout pas stopper les stratégies ESG au prétexte de préserver les ressources financière­s des entreprise­s.” Hervé Fonta, Meanings Capital Partners.
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“Les projets RSE de long terme, gourmands en capex, peuvent être décalés dans le temps, alors que d’autres doivent être maintenus s’ils présentent un coût limité.” Sophie Nordmann, Siparex.
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Éric Dejoie, MBO & Co.
“L’ESG représente une tendance de fond très forte, dépassant les variations conjonctur­elles ou saisonnièr­es.” Éric Dejoie, MBO & Co.

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