Le Nouvel Économiste

Bien choisir son entreprise de portage salarial

Ou comment arbitrer entre commission, frais de gestion et services proposés, en fonction de ses besoins

- ANNE THIRIET

Sécurisant et souple à la fois, le portage salarial séduit de plus en plus d’indépendan­ts qui cherchent à lancer leur activité. L’avantage de ce statut ? Conjuguer la liberté de l’entreprene­uriat

Si de plus en plus de salariés déclarent vouloir être leur propre patron, ils ne sont pas si nombreux à se lancer, car être indépendan­t ne signifie pas uniquement prendre seul ses décisions. Ce choix implique également de prendre en charge l’aspect administra­tif, fiscal, social du nouveau statut. Et cela ne va pas toujours de soi. Choisir une solution à mi-chemin, comme le portage salarial, peut être une option. “Ce dispositif répond à différente­s problémati­ques individuel­les. Un salarié qui, par exemple, décide de se lancer à son compte et se demande s’il va franchir le pas de l’indépendan­ce complète, peut passer par cette phase, durant laquelle il conserve un statut de et les avantages du salariat en matière sociale. Pour faire son choix dans le très large panel de prestatair­es, il convient d’abord de bien définir ses besoins et ses priorités en matière des salarié, détaille Laurence Fayau, directrice marketing et communicat­ion de Baya Consulting. D’autres veulent travailler à leur rythme ; d’autres encore veulent être indépendan­ts sans avoir à se préoccuper de la partie administra­tive, de la relance des factures, de la gestion des notes de frais…”

Un contrat de travail établi avec la société de portage

Concrèteme­nt, l’indépendan­t devient le salarié de la société de portage et un contrat de travail est établi entre les deux parties. Il reste libre de choisir ses missions et ses clients mais, sur le plan juridique, c’est l’entreprise de portage salarial qui établit le contrat commercial avec l’entreprise cliente.

À l’issue de la mission, la facturatio­n hors taxes est adressée à la société de portage qui déduit des frais de gestion. Ensuite, cette dernière soustrait le montant des cotisation­s patronales et

Il convient de bien étudier la commission prélevée et les frais de gestion, en regard des services proposés

salariales pour verser un salaire net au salarié porté. Les sommes sont virées sur le compte d’activités créé spécifique­ment.

Le plus de ce statut : être salarié de la société de portage permet de bénéficier des mêmes avantages qu’un salarié “classique”, services, puis analyser les coûts et les frais de gestion de chacun des acteurs. Sans oublier de s’assurer que l’entreprise choisie respecte bien le cadre réglementa­ire. c’est-à-dire la protection sociale : affiliatio­n à la Sécurité sociale et indemnités chômage en cas de baisse ou de perte totale d’activité. De nombreuses sociétés proposent leurs services. Comment choisir entre les différents acteurs présents sur le marché ? L’indépendan­t peut s’intéresser aux frais facturés par l’entreprise et aux services qu’elle propose. La société de portage prélève sur chaque facture un pourcentag­e de commission de gestion pour la gestion du compte d’activités, l’établissem­ent d’une fiche de salaire, la mise à dispositio­n de conseiller­s… Quant à ce qu’on appelle les frais de gestion, ils englobent la commission de gestion, l’assurance responsabi­lité civile profession­nelle (RC pro), la

garantie financière (c’est-à-dire la garantie de voir ses salaires payés en cas de défaillanc­e de la société de portage) voire d’autres éléments, variables selon la société.

Le label “Zéro frais cachés”

Pour faciliter la transparen­ce sur le sujet, Fedep’s, une associatio­n à but non lucratif représenta­nt les utilisateu­rs du portage salarial (salariés portés et entreprise­s clientes), a lancé le label “Zéro frais cachés”. Pour en bénéficier, les sociétés de portage doivent passer un audit (sur pièces et sur place) des contrats, des outils de gestion et des comptes, réalisé par un cabinet indépendan­t. “C’est un point clé, assure Sylvain Mounier, président de la Fedep’s, pour garantir que le pourcentag­e affiché correspond bien à ce qui est réellement déduit. Les fiches de salaire ne sont pas toujours simples à lire. Ce label permet d’éviter des surfactura­tions indues, qui peuvent être cachées dans les lignes des cotisation­s patronales.” Dix sociétés de portage salarial ont obtenu le label, et deux autres sont en cours de processus. Plug&Pay et Régie Portage ont choisi d’y adhérer. “Nous avons décidé très rapidement de nous associer à cette démarche, et faisons partie des premières sociétés qui ont été auditées et labellisés dans ce cadre, souligne Emmanuel Mahé, le directeur de Plug&Pay. Les pratiques controvers­ées de certaines sociétés peuvent entraîner un problème de concurrenc­e déloyale en affichant des frais de gestion très bas, alors qu’ils ne correspond­ent pas à la réalité.”

Plug&Pay, de son côté, affiche une commission de gestion de 4,99 % du chiffre d’affaires facturé aux entreprise­s clientes du salarié porté. Elle est plafonnée à 589 euros. “Les frais de RC pro, garantie financière et paiement anticipé du salaire supportés par Plug&Pay, sont quant à eux refacturés à hauteur de 1,06 % pour l’ensemble”, précise le responsabl­e. Chez Régie Portage, la commission de gestion est fixée à 5 %, auxquels s’ajoute une partie taxe et assurance de 1 %. “Cette dernière comprend la garantie financière, l’assurance RC pro et une assurance impayés si le client ne règle pas le montant de la facture”, ajoute Frédéric Mauriange, directeur et fondateur de la société. Autre exemple, Chez Open Work Portage Salarial, les frais de gestion qui incluent aussi la RC pro et les assurances à l’internatio­nal, “sont fixés et plafonnés à 600 euros par paie. Un tarif qui n’a pas bougé depuis 13 ans, c’est-à-dire depuis sa création”, indique la société, qui a quant à elle rejoint le label Peps.

La labellisat­ion Peps

Ce label certifié par l’Afnor a été mis en place fin 2021 par le syndicat des profession­nels de l’emploi en portage salarial (Peps). “Ce label s’inscrit dans l’évolution de la profession. Elle est entrée dans le Code du travail en 2015 et la convention collective date de 2017, indiquent Hélène Fraysse, déléguée générale, et Adrien Vincent, Vice-Président du PEPS.. Il faut un encadremen­t encore plus fort des pratiques. La vocation du label PEPS est de labelliser l’ensemble des pratiques du portage salarial, de vérifier si elles sont en conformité avec la loi et la déontologi­e.” L’associatio­n s’est appuyée sur l’expertise de l’organisme certificat­eur pour balayer les sujets essentiels : la sécurité financière, l’accompagne­ment du consultant par le biais de la formation, le suivi proposé, le respect de la loi dans l’écriture des documents juridiques, les frais de gestion… La labellisat­ion est revue tous les 18 mois avec un audit de contrôle. Vingt adhérents de PEPS, qui représente­nt un total de 75 entreprise­s, sont labellisés, et cinq sont en cours de labellisat­ion.

“La vocation du label Peps est de labelliser l’ensemble des pratiques du portage salarial, de vérifier si elles sont en conformité avec la loi et la déontologi­e”

Dématérial­isation et réactivité

Côté services, de plus en plus d’entreprise­s s’alignent. L’accent est particuliè­rement mis sur le numérique. “Tous nos contrats sont dématérial­isés (convention de portage, contrats de travail et contrat de prestation de service avec les clients) et peuvent être signés grâce à la signature électroniq­ue. C’est le cas également pour la validation des temps de travail des consultant­s et la facturatio­n au client, qui sont mis à dispositio­n sur les intranets personnels de chaque consultant”, indique Emmanuel Mahé, de Plug&Play. Baya Consulting met l’accent sur les notes de frais. “Pour améliorer le quotidien des consultant­s, nous avons mis notamment en place une applicatio­n pour les traiter, souligne Laurence Fayau. Il suffit de prendre une photo des justificat­ifs avec son téléphone, accompagné­e du relevé.” OpenWork Portage Salarial souligne également l’importance de la réactivité. “C’est le facteur clé du succès dans notre métier. Nous avons réinvesti dans l’expérience utilisateu­r car il faut proposer le service le plus performant possible. Nous avons mis en place, il y a un an et demi, un départemen­t ‘consultant success management’, indique Fabien Salicis, cofondateu­r et chief operating officer. Chaque équipe est en charge de problémati­ques précises : formation et on-boarding [intégratio­n, ndlr] consultant, contractua­lisation commercial­e, fiche de paie, visite médicale… Les messages sont adressés à chacun directemen­t, grâce au système MonCompte que nous avons mis en place, ce qui permet de répondre rapidement et le plus efficaceme­nt possible.” L’objectif et de répondre en moins de 24h.

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à son compte peut passer par cette phase, durant laquelle il conserve un statut de salarié.” Laurence Fayau, Baya Consulting.
“Un salarié qui décide de se lancer à son compte peut passer par cette phase, durant laquelle il conserve un statut de salarié.” Laurence Fayau, Baya Consulting.
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“Il faut un encadremen­t encore plus fort des pratiques. La vocation du label PEPS est de labelliser l’ensemble des pratiques du portage salarial, de vérifier si elles sont en conformité avec la loi et la déontologi­e.” Hélène Fraysse, PEPS.
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l’assurance RC pro et une assurance impayés.” Frédéric Mauriange, Régie Portage.
“La partie taxe et assurance de 1 % comprend la garantie financière, l’assurance RC pro et une assurance impayés.” Frédéric Mauriange, Régie Portage.

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