Un divorce à l’amiable et après ?
Theresa May doit encore convaincre les députés britanniques de voter l’accord scellé hier à Bruxelles.
L’UNION EUROPÉENNE et le Royaume-Uni ont franchi, hier, une étape décisive dans le long cheminement juridique pour défaire le complexe écheveau de relations élaborées au long de quarante ans de vie commune et pas toujours harmonieuse. Il aura fallu dix-sept mois de négociations ardues pour en arriver là et établir (en 500 pages) les conditions quasi notariales de ce divorce.
L’histoire aura donc finalement donné raison au général de Gaulle qui avait mis, à deux reprises, en 1961 et 1967, son veto à l’entrée des Britanniques dans la communauté européenne. Le chef de la France libre considérait que la perfide Albion, qui a toujours cultivé sa « relation spéciale » avec les Etats-Unis, serait pour ces derniers un « cheval de Troie ». Mais il redoutait surtout que le peu de foi européenne des insulaires britanniques ne se transforme en boulet pour ses partenaires dans leur projet politique. Bien vu.
Pas très au clair avec l’UE et surtout pas très au clair entre eux, les sujets de sa Gracieuse Majesté n’ont jamais réussi à choisir entre leur ancienne colonie américaine et leurs proches voisins continentaux. Ils ont décidé de tirer leur révérence le 23 juin 2016 au terme d’une campagne référendaire obscurcie par les arguments mensongers des « Brexiters », comme leur chef de file Nigel Farage en a fait l’aveu sans vergogne aussitôt après sa victoire.
UNE PÉRIODE DE TRANSITION QUI POURRAIT DURER
Le « traité de retrait » approuvé, hier, par les Vingt-Sept prévoit une « période de transition » à compter du 29 mars 2019 (date de sortie officielle du Royaume-Uni) qui expirera en principe le 31 décembre 2020. Le temps de mettre noir sur blanc les très complexes relations futures entre ex-partenaires.
Cette période devra sans doute être allongée car elle ne permettra pas de tout régler. Et pendant ce temps, le Royaume-Uni restera soumis à la réglementation européenne — en cours et à venir — sur laquelle il n’aura plus droit au chapitre puisque déjà officiellement plus membre de l’Union. C’est l’un des points qui fait déjà hurler à Londres les partisans d’un Brexit radical et immédiat. Mais la Première ministre, Theresa May, soutenue par des milieux économiques très inquiets, a répété que ce premier traité est « le meilleur possible ».
La locataire du 10 Downing Street devra aussi convaincre ses compatriotes, et en premier lieu ses alliés nord-irlandais unionistes, du statut particulier qui sera celui de l’Irlande du Nord à l’issue de la période de transition.
Pour obtenir le feu vert du parlement de Westminster lors du vote qui devrait avoir lieu le 10 décembre, May a déjà commencé à s’appuyer sur l’une des dispositions promise par le Brexit : la fin de la libre circulation des personnes, c’est-à-dire, théoriquement, la maîtrise de l’immigration.
Pour voter le traité, certains parlementaires britanniques vont exiger des amendements alors que les négociateurs européens ont clairement indiqué qu’il n’en était pas question. Theresa May, dont la majorité est mince, va donc devoir s’employer durement afin d’atteindre la barre nécessaire des 320 voix à la Chambre des communes.
Bruxelles (Belgique), hier. Les dirigeants européens (dont Emmanuel Macron et l’Autrichien Sebastian Kurz) se sont réunis pour valider le texte négocié par Michel Barnier (au centre) avec le Royaume-Uni.