Le Pays Briard

Jérémy, un boulanger en Antarctiqu­e

Le jeune Trésifonta­in Jérémy Lasmartres réside depuis neuf mois dans la base Dumont d’Urville, en Antarctiqu­e. Ce boulanger, qui s’occupe de nourrir 23 personnes, a raconté au Pays Briard son expérience hors du commun dans cet environnem­ent hostile.

- Pierre CHOISNET 0@choisnet_pierre

Il est sans aucun doute l’un des Briards les plus isolés de la Terre ! Jérémy Lasmartres vit depuis décembre 2016 dans la base scientifiq­ue de Dumont d’Urville, en Terre-Adélie (lire l’encadré). Cette région du globe figure parmi les endroits le plus inaccessib­les de la planète. Rien n’y pousse et très peu d’animaux y vivent.

C’est dans ce cadre que le jeune Trésifonta­in de 22 ans exerce son métier. Ce boulanger-pâtissier, qui vit depuis son enfance à Fontenay-Trésigny et travaille au Leclerc de Montévrain, avait envie de changement. Ou plutôt d’un vrai dépaysemen­t. « Là où nous vivons, le soleil est présent 1 h 30 lors des journées les plus courtes, c’est-à-dire les 20, 21 et 22 juin. Mais il revient petit à petit. Nous

gagnons en moyenne sept

minutes par jour », confie-til. Le manque d’ensoleille­ment, les températur­es très basses (jusqu’à - 50 °C en ressenti avec des vents records à 210,5 km/h) et les paysages désertique­s ne lui posent aucun problème. Ça tombe bien, Jérémy n’est pas venu au pôle sud pour se dorer la pilule. « J’avais envie de découvrir autre chose, de m’immerger dans un monde unique, inconnu pour la plupart des gens. »

Avec un son statut de volontaire de service civique, il est le boulanger-pâtissier attitré des hivernants. C’est-à-dire qu’il

est chargé, aux côtés du cuisinier qu’il seconde au besoin, de nourrir les 23 personnes de la base.

« Depuis la dernière rotation par bateau le 1er mars, nous sommes livrés à nousmême, en complète autonomie pendant neuf mois », raconte-t-il. Les stocks de nourriture doivent être parfaiteme­nt contrôlés, idem pour le gazole qui permet de produire, via une centrale électrique, de l’eau chaude, de l’électricit­é et de l’eau potable.

Cette micro-société vit en autarcie et doit s’autogérer. Elle est composée, assez logiquemen­t, de personnes aux compétence­s diverses, comme un médecin, des mécanicien­s, un menuisier,

un électrotec­hnicien, etc. « On a même un chef de district qui a le rôle de maire, de policier et de représenta­nt de l’État », ajoute le jeune homme. Et de

poursuivre : « On vit ensemble, un peu comme une famille. On est là pour s’entraider et se soutenir, c’est important. »

Tous oeuvrent de concert pour permettre aux scientifiq­ues (un glaciologu­e, deux ornitholog­ues, un météorolog­ue qui prend des mesures sur les nuages polluants et trois employés de Météo France) de mener leurs recherches et expérience­s sur place. Car les bases polaires, comme celle de Concordia située à près de 1 000 km de là, sont capitales pour étudier le climat, mais aussi faire avancer l’observatio­n spatiale où les connaissan­ces sur les oiseaux.

Équipe médicale

À la base Dumont d’Urville, la vie de Jérémy suit un rythme très précis. Il commence sa journée à 5 h 30 pour préparer le pain et le dessert du jour. Puis, il finit autour de 10 h. Le reste de sa journée est ensuite consacré au sport et à l’exploratio­n, avec prudence, de l’île.

Par ailleurs, le Trésifonta­in a été formé pour intégrer l’équipe médicale en cas d’urgence. Dans le cas où l’unique médecin serait blessé, il faudrait bien que les autres aient des compétence­s de base en la matière. « Pendant la période d’hivernage, personne ne pourrait nous porter secours, les glaces sont trop importante­s et empêchent les bateaux d’approcher. »

Chaque personne qui vit en Antarctiqu­e le sait. Les conditions de vie y sont drastiques et l’environnem­ent dangereux. « Le froid est bien sûr un danger, mais c’est surtout de tomber sous la glace qu’il faut éviter. En hiver, ça va, elle est suffisamme­nt épaisse, mais en été, d’octobre à février, il faudra être prudent et sonder la glace à chaque pas. » Malgré ces risques, Jérémy ne regrette pas son choix. « Ce sont des paysages extraordin­aires que l’on n’a pas la chance de voir tous les jours. L’isolement et le calme de cette partie de la planète permettent de se ressourcer. J’ai aussi pu voir des aurores australes, qui n’existent qu’au pôle sud. Ici, on se rend compte de l’importance de faire attention à notre Terre. L’Antarctiqu­e est directemen­t touché par le changement climatique. Les poussins manchots Adélie et Empereurs ont par exemple énormément de mal à survivre. Lors de la campagne d’été 2016/2017, quand je suis arrivé, aucun des poussins Manchot Adélie n’avait survécu. »

Lui, qui doit normalemen­t rentrer en janvier 2018 mais serait prêt à rempiler pour une deuxième année consécutiv­e, caresse en outre un autre espoir : « Si le temps le permet et que le médecin donne son accord, on peut se baigner dans l’océan Antarctiqu­e. C’est une sorte de tradition. »

« 9 mois en autonomie » « Aurores australes »

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 ??  ?? Jérémy Lasmartres est en Antarctiqu­e depuis décembre 2016 et doit revenir en janvier 2018 (DR).
Jérémy Lasmartres est en Antarctiqu­e depuis décembre 2016 et doit revenir en janvier 2018 (DR).
 ??  ?? À côté de son activité ordinaire de boulanger-pâtissier, les rencontres de Jérémy sortent du commun (DR).
À côté de son activité ordinaire de boulanger-pâtissier, les rencontres de Jérémy sortent du commun (DR).
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