Le Pays Briard

Monique Delessard : « Pourquoi je passe le flambeau »

La maire PS a décidé de démissionn­er, passant la main à son 1er adjoint, Gilles Bord. Si ce dernier est élu par le conseil municipal du 22 janvier, il finira la mandature. Retour sur ce choix, les plus beaux moments de sa vie d’élue et ses difficulté­s. En

- ©LPB / P.Choisnet Propos recueillis par Pierre CHOISNET 0@ choisnet_pierre

Le Pays Briard : L’annonce de votre démission est prévue publiqueme­nt lors de vos voeux le 12 janvier mais a été révélée dans la presse (lire notre édition du 26 décembre 2017). Depuis quand y songez-vous ?

Monique Delessard : En 2014, déjà, quand mes collègues m’ont demandé d’être tête de liste. J’avais à cette époque dit que je passais la main et que je ne me présentais pas aux élections. Mais les élus m’ont demandé de revenir suite à la trahison de Cédric Pommot

(il a été désavoué en 2013, a quitté le PS en prenant la tête d’une liste de centre-gauche en 2014 avant de rejoindre le parti de La République En Marche récemment, N. D. L. R.).

Donc, j’ai accepté de repartir. Par contre, je leur avais dit que je ne ferai certaineme­nt pas l’ensemble de ce mandat. C’était en accord avec eux qui avaient besoin de moi pour être tête de liste. J’étais la plus connue et je n’avais pas préparé quelqu’un d’autre que Cédric Pommot qui s’est grillé lui-même.

Que répondez-vous à ceux qui pensent que votre élection, en 2014 puis en 2015, était un leurre pour préparer l’arrivée de Gilles Bord ?

J’assure simplement la continuité de la ville, comme j’étais moi-même dans la continuité de Jacques Heuclin

(maire PS de Pontault-Combault de 1977 au 31 octobre 2007, date de sa mort après une infection pulmonaire, N.D.L.R.).

C’est une décision raisonnabl­e. J’ai 70 ans et je pense qu’il est important de prévoir l’avenir. Je ne m’accroche pas à mon siège, comme cela a pu être dit dans le passé par mes opposants. Gilles Bord poursuivra le projet pour lequel nous avons été élus et que j’ai entamé en 2008.

Pourquoi ne pas avoir passé la main à la fin de votre mandat ?

On connaît bien la situation actuelle du Parti socialiste, qui traverse une période difficile comme d’autres partis. Je pense que le candidat qui assurera la continuité de Pontault-Combault doit être bien identifié auprès des électeurs. Et non pas balancé en 2020. En trois ans, Gilles Bord pourra donc s’appuyer sur son expérience en tant qu’adjoint puis en tant que maire.

Était-ce une décision difficile à prendre ?

Bien sûr, parce que je suis très attachée à mon rôle de maire. Je suis quelqu’un de très investi. Malgré le fait que je n’irai pas jusqu’au bout, à aucun moment je n’ai baissé les bras. Jusqu’à encore aujourd’hui, je suis dans la démarche d’être à la tête d’une ville de plus de 38 000 habitants. Mais j’estime que des gens comme moi appartienn­ent plus à l’histoire qu’au futur. Je ne suis plus l’avenir de Pontault-Combault. Ça me coûte de quitter tout ça, mais je pense que c’est important de le faire maintenant.

À partir de quand Gilles Bord s’est-il révélé être un digne successeur ?

C’est lui qui était venu me voir fin 2013 pour me dire que les élus ne souhaitaie­nt pas repartir derrière Cédric Pommot. Naturellem­ent, j’ai songé que c’était Gilles Bord le meilleur capitaine de l’équipe. C’est la raison pour laquelle dans le mandat actuel je l’ai mis au poste de 1er adjoint, chargé des finances, du personnel et des événements. Il était mis en avant dans toutes les manifestat­ions. Il gère maintenant les conseils municipaux. Il se dégage de lui une forte personnali­té. Il est très loyal. Il est au courant de tous les dossiers. Je lui ai laissé la main volontaire­ment sur plusieurs chantiers importants pour la ville. Voici pourquoi je lui passe le flambeau.

Comment a commencé votre vie d’élue ?

En 1976, ma fille avait quatre ans et j’étais représenta­nte des parents d’élèves FCPE à l’école Pablo Neruda. Très rapidement, je suis devenue présidente FCPE. C’est à ce moment que Jacques Heuclin m’a demandé de rentrer dans l’équipe municipale en 1983. À cette époque, j’étais seule avec mes deux filles donc je ne pouvais pas être autre chose que conseillèr­e municipale. En 1989, il m’a demandé d’être sa 1re adjointe, chargée de l’éducation. Je venais d’avoir mon 3e enfant par une deuxième union. J’ai donc accepté de changer de vie puisque j’ai quitté la Société générale où j’étais employée depuis 23 ans pour me consacrer entièremen­t à la mairie.

Quel est votre plus mauvais souvenir ?

Depuis 35 ans que je suis élue, la chose la plus difficile que j’ai eu à vivre c’est le décès de Jacques Heuclin. Je n’étais pas prête, à ce moment, à être maire de la Ville de Pontault-Combault. Je n’avais pas connaissan­ce des autres dossiers que le scolaire. Quand il est décédé, il a bien fallu endosser ce rôle et là ça a été difficile, surtout quand vous n’êtes pas préparés aux dossiers. C’est aussi la raison pour laquelle je tenais autant à préparer Gilles Bord.

Et votre plus grande fierté ?

Il y a tout ce qui est éducatif, dont l’air numérique qui est maintenant en place dans les écoles. Mais ce que je retiens avant tout c’est le Pôle de Santé de la Francilien­ne, situé avenue de la République. On nous reproche la fermeture de la clinique de la Francilien­ne. Or, c’est un établissem­ent privé, on avait aucun pouvoir. Mais je suis fière d’avoir réussi à le garder à Pontault-Combault grâce à la pression que j’ai pu faire et à la mobilisati­on que j’ai entraînée. Il y a quand même 40 spécialist­es, des urgences de 8 h à 22 h ou encore une IRM qui va s’installer dans les jours qui viennent. On a limité la casse, sans quoi ça aurait été catastroph­ique pour la ville.

Vous êtes en attente de votre procès aux assises où vous êtes poursuivie pour avoir signé un faux acte de mariage de Jacques Heuclin, alors que celui-ci était sur son lit d’hôpital, dans le coma. Où en est ce dossier ?

L’acte de mariage a été fait en 2007*. On est en 2017 et je n’ai toujours pas de date. Peut-être qu’un jour il aura lieu. Mais en tout cas, ma décision de démissionn­er n’est absolument pas liée à ce procès. Je n’avais pas hésité à me présenter en 2014 et en 2015 pour les municipale­s et en 2017 pour les législativ­es, donc si vraiment c’était ce problème qui me faisait arrêter, je n’aurais pas brigué d’autres mandats.

Dans votre avenir, cette épée de Damoclès vous inquiète-t-elle ?

Aux assises, chacun reconnaîtr­a l’erreur, en effet, que j’ai commise. Il n’y a eu aucune manipulati­on. J’ai signé à tort un document qui était présenté par le directeur de cabinet de Jacques Heuclin, Serge Crippa. J’ai signé ce document sans le lire, comme font tous les maires. Il ne m’a pas caché ce qu’était le document, il m’a dit que c’était l’acte de mariage de Jacques Heuclin. J’ai demandé si ses filles étaient d’accord sur le mariage, mais ensuite elles m’ont fait un procès car je pense qu’au moment de l’héritage elles se sont senties lésées. Je ne savais pas comment se présentait un acte de mariage in extremis. Sur cet acte, il est marqué que Jacques Heuclin était à son domicile, ce qui n’était bien sûr pas vrai puisqu’il était hospitalis­é à Paris. C’est une erreur de bonne foi, je le plaide depuis le départ. * Pour cela, Monique Delessard a été condamnée en 2010 par la cour d’appel de Paris à 15 mois de prison avec sursis et une inéligibil­ité de trois ans. Elle s’était alors pourvue en cassation. La juridictio­n suprême avait cassé le précédent jugement, sans toutefois trancher le fond de l’affaire. C’est pourquoi le dossier a été renvoyé aux assises, la Cour de cassation considéran­t que les accusation­s de faux en écriture n’auraient pas dû passer au tribunal correction­nel.

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 ??  ?? Monique Delessard est maire PS de Pontault-Combault depuis 2007, après être entrée dans la majorité de Jacques Heuclin en 1983.
Monique Delessard est maire PS de Pontault-Combault depuis 2007, après être entrée dans la majorité de Jacques Heuclin en 1983.

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