Le Pays Briard

Un premier roman « L’homme craie » et un classique revisité « Carmen »

Comme très souvent, les choix de nos libraires sont très différents cette semaine… Quoi que ! L’une nous conseille de lire un premier roman voué à devenir un best-seller, tandis que l’autre s’est penchée sur un best-seller présenté sous un jour nouveau !

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de CJ Tudor

Nikita, de la librairie-maison de la presse « Les Deux Muses », à Coulommier­s, a lu pour nous le premier roman de la britanniqu­e C.J. Tudor, L’homme craie.

Tout le monde a des secrets… Et les enfants ne sont pas toujours innocents. Partant de ce postulat, C.J. Tudor a écrit son premier roman, publié simultaném­ent dans pas moins de vingt-sept pays ! C’est dire si les éditeurs misent beaucoup sur ce récit, qui nous conte l’histoire d’Eddie, 12 ans en 1986.

Il a un groupe d’amis avec qui il s’entend plus que bien. Ils ont même créé un code secret pour se faire passer des messages : « suivez les hommes craie ». Mais un jour, c’est en les suivant qu’il tombe sur une jeune fille. À partir de ce jour, leur amitié se termine… Mais plusieurs années plus tard, Eddie reçoit une lettre avec un morceau de craie et un dessin qui lui fait comprendre qu’il est temps de renouer avec ses anciens amis pour éviter que le cauchemar ne recommence voire empire ! « Aucun de nous n’était d’accord sur la façon dont cela avait réellement commencé. Était- ce lorsque nous nous étions mis à dessiner des bonshommes à la craie ? Ou lorsqu’ils sont apparus tout seul ? Était-ce à partir du terrible accident ? Ou quand ils ont découvert le premier corps ? »

« Au fil des pages, ce premier roman nous mène par le bout du nez, du début à la fin ! L’auteure démarre sa carrière d’écrivain avec un super premier thriller, plein de rebondisse­ments, et parfaiteme­nt addictif ! »

de Prosper Mérimée, nouvelle illustrée par Benjamin Lacombe

Paysage espagnol, narrateur de pacotille et passion vénéneuse ! Chloé, de la librairie Au Chapelier lettré, à Faremoutie­rs, nous fait partager une nouvelle édition de Carmen, illustré par Benjamin Lacombe. Sous le soleil aride d’Andalousie, la belle Carmen déchaîne les passions. Le narrateur, un archéologu­e français anonyme, est témoin de l’amour et de la chute de Don José, éperdument épris de la jeune gitane…

« La littératur­e compte nombre de relations désespérée­s, d’amants maudits, d’êtres dépassés par leur pas- sion. L’amour a pour tribu la vie, la mort et les sentiments étant irrémédiab­lement liés. Et les exemples sont nombreux : Roméo et Juliette, Heathcliff et Catherine, le Vicomte de Valmont et la présidente de Tourvel, Cyrano et Roxane, Chloé et Colin, Cécilia et Robbie… Sur le papier, plus encore que dans la vie, on aime se plaire, s’éprendre, se déchirer, se revenir. Et rarement mots ont été plus sensuels et cruels que ceux de Prosper Mérimée lorsqu’il dépeint la relation toxique de Carmen et Don José.

« Même sans jamais avoir lu sa nouvelle ou entendu le célèbre opéra de Bizet, tout le monde connaît cette (anti)héroïne culte. Carmen, c’est la tentation en jupons, symbole de la femme fatale, venimeuse et voluptueus­e. Carmen, c’est l’érotisme flamboyant, la beauté du Diable, la joueuse insatiable, l’amante versatile, l’insaisissa­ble personnali­té d’une manipulatr­ice. Cruelle, elle sait pourtant se montrer compatissa­nte et attentionn­ée, pour mieux trahir par la suite. Si elle est odieuse, détestable parfois, elle n’en reste pas moins, de sa propre affirmatio­n « toujours libre », libre de ses choix, de son corps, de sa vie ; avec elle, Mérimée a dressé l’un des portraits féminins les plus complexes et les plus sauvages qui soient.

Carmen mènera à sa perte Don José Lizarraben­goa, homme droit dont la volonté et l’intégrité vont s’émousser au contact de la belle gitane. Cette déchéance spirituell­e provoquera, irrémédiab­lement, la chute : soldat dégradé, fugitif, voleur, criminel, tueur… Jusqu’à commettre l’irréparabl­e.

La nouvelle de Mérimée n’est jamais si belle, si intense, si tragique que lorsque Don José conte son histoire au narrateur. L’amour et le désespoir y sont omniprésen­ts, de même que le désir et la passion destructeu­rs que la jeune femme fait naître en lui.

C’est là tout mon problème avec Carmen : la nouvelle est excellente oui, mais pas dans son ensemble. Elle est hélas entrecoupé­e par des parenthèse­s interminab­les, par ce narrateur absolument ennuyeux dont on se serait volontiers passé. S’il permet de retarder l’apparition de la belle gitane – suscitant du même coup la curiosité du lecteur – il nous empêche surtout de nous focaliser sur l’essentiel : Don José et Carmen… Tout comme Carmen obsède Don José, elle est la source de la fascinatio­n du lecteur, celle qui le pousse à poursuivre sa lecture dans cette vision fantasmée de l’Espagne, où errent des amants maudits et meurtriers façon Bonnie, Clyde & Castagnett­es. La nouvelle de Mérimée est souvent frustrante, cette tendance à digresser – particuliè­rement sur le dernier chapitre qui n’aurait jamais dû exister ! - casse le romanesque échevelé qu’il s’est employé à créer durant la moitié de son intrigue.

Pourquoi vous parler, dès lors, de cet ouvrage qui ne m’a pas spécialeme­nt conquise ? La raison est simple : après avoir laissé son empreinte sur les sublimes Notre-Dame de Paris, Alice au Pays des Merveilles et Les Contes Macabres, le prodige Benjamin Lacombe collabore une fois de plus avec les Éditions Soleil ! Ainsi, il nous offre, dans la collection Métamorpho­ses, une version sublimemen­t illustrée de l’histoire de Mérimée, où transperce­nt toute la passion, le désespoir et la cruauté propres à Carmen. Notre tentatrice n’est jamais aussi sublime et vénéneuse que sous le pinceau de Lacombe – exemple flagrant lorsqu’il illustre un canari (le surnom que donne Carmen à Don José) pris dans les toiles d’une araignée, métaphore de Don José captif des charmes de Carmen. Tout comme ce fut le cas pour sa vision des oeuvres de Poe et Hugo, les deux univers, où Thanatos et Éros sont déjà implicitem­ent liés, s’imbriquent à la perfection. Mérimée a écrit la passion la plus destructri­ce de tous les temps, Lacombe l’a transcendé­e. »

■ L’homme craie, de CJ Tudor, aux éditions Pygmalion. 384 pages. 20,90 €.

■ Prosper Mérimée & Benjamin Lacombe : Carmen aux Éditions Soleil. 174 pages. 32,50 €.

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XP Photo ©Studio Chloé de la libraire Au Chapelier lettré de Faremoutie­rs.
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Nikita, de la librairie-maison de la presse Les Deux Muses de Coulommier­s.

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