5 QUESTIONS À ERIC GOBARD
1. Pourquoi avez-vous décidé de rejoindre le mouvement des agriculteurs en colère ?
Depuis vendredi dernier, je suis aux côtés des agriculteurs sur le blocage de Jossigny. Nous sommes très attachés à ce mouvement européen qui traduit le malaise du monde paysan à une échelle internationale. Aujourd’hui, la politique agricole commune nous a permis de nous développer et de moderniser nos fermes, certes. Mais on subit de plein fouet la guerre entre la Russie et l’Ukraine. Tout a augmenté sur nos exploitations. On a laissé entrer les produits ukrainiens en France, notamment les viandes blanches. Résultat, ils inondent le marché et se développent. En leur ouvrant gratuitement nos portes, ce sont les producteurs français qui payent le coût de la guerre. Ça touche à nos revenus, on subit une concurrence déloyale. C’est comme si on jouait un match de foot et que l’équipe en face avait 14 joueurs sur le terrain, la partie est pliée d’avance. Poutine nous a mis à genou.
2. On a rarement vu un mouvement agricole d’une telle ampleur...
Les comptes sont tendus dans les exploitations. L’augmentation du GNR (Gazole non routier, ndlr) a été la goutte qui a fait tout exploser.
3. Les agriculteurs dénoncent des règles environnementales jugées trop strictes. Qu’en pensezvous en tant qu’agriculteur bio ?
Ce n’est pas notre combat. Nous, les bio, on sort aussi dans la rue parce que l’Europe ne nous protège pas assez. On subit le dumping social. Cette pratique est devenue courante dans le secteur agricole, Beaucoup de productions font appel à de la main d’oeuvre à bas salaire avec un coût de production trois à quatre fois moins cher. Encore une fois, c’est de la concurrence déloyale.
4. Que pensez-vous de l’annonce de Gabriel Attal de débloquer 50 millions d’euros pour la filière bio ?
50 millions ? Ce n’est rien du tout. C’est comme si, après une grève, on donnait 100€ à un salarié. C’est ridicule. De toute façon, la filière bio ne réclame pas des aides d’urgence mais des débouchés. On préfère que les collectivités territoriales reprennent le principe de la loi Egalim qui prévoit d’introduire au moins 20 % de produits bio dans les restaurants scolaires. On s’est convertis et, en pleine course, on nous annonce que finalement, on ne peut pas l’imposer à toutes les cantines.
5. Le mouvement va t-il perdurer ?
Pour l’instant, on n’en sait rien. On sent que le gouvernement prend les choses très au sérieux. On ne veut pas être violent, néanmoins on exerce une pression en bonne intelligence.