Quand Michel Jazy affolait les chronos à Melun
Fondeur de talent, Michel Jazy nous a quittés en ce début février. Seine-et-Marnais durant près de trente ans entre Ozoir et Lésigny, il inscrit l’une des plus belles lignes de sa carrière à Melun, lorsqu’il bat un nouveau record du monde en 1965. Rétrospective.
C’est un grand nom de l’athlétisme français qui s’en est allé. Michel Jazy, vice-champion olympique du 1 500 m en 1960, est mort à 87 ans, le 1er février dernier.
Spécialiste du demi-fond, l’homme aura marqué plusieurs générations d’athlètes. Il faut dire qu’il a régné d’une main de maître sur sa discipline l’espace d’une décennie. Seine-etMarnais de coeur - il habitait à Ozoir-la-Ferrière puis à Lésigny - Michel Jazy a notamment écrit une de ses plus belles lignes du côté du stade de Melun, en 1965. Mais avant de revenir sur cet exploit, revenons quelques années en arrière, histoire de bien connaître à qui on a affaire.
Double record du monde à Melun
Né dans le Pas-de-Calais en 1936, Michel Jazy commence sa relation avec le sport de haut niveau de façon plutôt insolite. Car avant de devenir un crack sur les pistes, c’est au sein du plus grand quotidien de sport français, L’Equipe, que travaille Michel Jazy. Il signe un premier contrat comme ouvrier typographe.
En parallèle de ses activités professionnelles, il s’entraîne et atteint le haut niveau. C’est aux Jeux olympiques de Rome en 1960 qu’il se révèle. Il remporte la médaille d’argent du 1 500 mètres derrière le grand favori australien, Herbert Elliott.
Deux ans plus tard, il enrichit son palmarès avec un sacre de champion d’Europe, toujours sur 1 500 mètres. Il se paie même le luxe d’établir un record du monde. Son premier d’une longue liste.
Engagé sur les JO de Tokyo en 1964, l’athlète de 28 ans passe cependant à côté de son objectif de titre.
Pis, il se classe en quatrième position.
Cet échec sonne le glas de sa carrière olympique, mais pas pour autant de son règne sur le demi-fond. Car l’année qui suit s’annonce riche en performances. Durant l’été 1965, il bat notamment quatre records du monde, dont deux à Melun. Un exploit.
C’est ainsi que les 23 et 24 juin 1965, la nouvelle coqueluche de l’athlétisme français se présente sur la piste de Melun. Au programme de ces deux journées : le 3 000 mètres et le 2 000 miles. Après le record du monde sur le 3 000 m, Michel Jazy s’avance au départ du 2 000 miles, avec pour objectif annoncé : « battre le record du monde de l’Américain Bob Schul », comme l’affirment les journalistes de l’époque dans la Rep du 21 juin 1965. Dossard 25 épinglé sur le torse, il s’élance sur la piste « un peu lourde » de Melun, comme il l’expliquera après coup, encore essoufflé par l’effort. Dans son sillage, le solide Australien Ron Clarke. Les deux hommes vont imprimer un train d’enfer en se relayant. « Ron Clarke a courageusement et admirablement joué le jeu ! », poursuivait Michel Jazy après course.
C’est le plus beau record de ma vie
Sous les yeux de plusieurs centaines de personnes et de Joseph Malléjac, son entraîneur, le binôme gagne en vitesse avant que le Français ne se détache et coupe la ligne en 8 minutes et 22 secondes, soit 4 seconde de mieux que le précédent record du monde ! « Au sixième tour, j’avais quatre secondes de retard sur le temps de passage. Lorsque je suis parti aux 800 mètres, les spectateurs y croyaient-ils encore ? Moi oui ! En tout cas, c’est le plus beau record de ma vie », a-t-il notamment soufflé, alors qu’il était littéralement « happé par d’enthousiastes et délirants ‘Jazyttistes’ », notent les reporters de l’époque.
La folle aventure de Michel Jazy se poursuivra quelques semaines plus tard, du côté d’Helsinki. Un nouvel exploit pour le Seine-et-Marnais, durant cette course que certains ont baptisée, humblement, la « course du siècle ».