Logement : le plan du gouvernement passe mal
Le plan du gouvernement pour le logement vise à « construire plus, mieux et moins cher ». Mais certaines mesures passent mal, accusées de faire des économies sur le dos des ménages les plus modestes.
« Notre stratégie poursuit trois objectifs : construire plus, mieux et moins cher ; répondre aux besoins de chacun et protéger les plus fragiles ; améliorer le cadre de vie. » Jacques Mézard, ministre de la Cohésion des territoires, et Julien Denormandie, secrétaire d’Etat en charge
du Logement, plantent le décor : « La demande de logements ne cesse d’augmenter, surtout dans les centres-villes et les métropoles. Cette pénurie de logements éloigne de l’emploi les moins privilégiés et freine la mobilité sociale et géographique. Or, une politique de mobilité implique une politique du logement : libérer la construction, lever les freins, libérer le foncier et raccourcir les procédures sont autant d’objectifs à mettre en oeuvre. » Parmi les propositions phares figurent un abattement sur les plus-values pour inciter les propriétaires à vendre leur terrain dans les zones tendues afin de permettre la construction rapide de logements, la simplicification des réglementations existantes dans la construction (par exemple l’adaptation des logements au handicap) et des sanctions accrues pour les recours abusifs, la création d’un bail mobilité sans dépôt de garantie pour les jeunes et la construction de 60 000 logements pour les étudiants. Mais cette stratégie reste « indissociable de la recherche d’économies pour le budget 2018 » , souligne Ouest-France. En effet, la réduction des allocations personnalisées au logement (APL) est confirmée, pour une économie attendue de 1,4 milliard d’€. Elles seront désormais calculées en fonction des revenus de l’année en cours et devraient être compensées par une baisse du prix des loyers dans le logement social, en contrepartie pour les organismes HLM de conditions d’emprunt plus favorables, notamment via le gel du taux du livret A. « Le problème, ce n’est pas le montant des APL, c’est le montant des loyers » , assure Julien Denormandie. D’autre part, le prêt à taux zéro - octroyé sous conditions de ressources pour la première acquisition d’une résidence principale - ne sera plus accessible dans les zones rurales dès 2018, ni dans les zones périurbaines en 2019. Des restrictions de périmètre très contestées par les professionnels. « Je suis abasourdi : on sacrifie les ménages modestes qui construisent sur 85% du territoire, où vit 60% de la population ! Ces gens qui n’ont pas les moyens d’acheter en centre-ville, ne pourront plus construire non plus à la périphérie de Brest, Angers, Le Mans, Besançon ou Valence » , tonne dans SudOuest, Patrick Vandromme, président des constructeurs et aménageurs au sein de la Fédération française du bâtiment. « C’est
du court-termisme budgétaire » , dénonce son confrère, Dominique Duperret, dans Le Moniteur. Les bailleurs sociaux et les associations d’aide aux mal-logés sont également très remontés. « Les locataires du parc HLM, les demandeurs d’un logement social, les collectivités locales et les entreprises du bâtiment seront les grands perdants de cette réforme » , regrette l’Union sociale de l’Habitat (USL) qui a finalement claqué la porte des discussions au nez
du gouvernement. « Cette mécanique de baisse parallèle des APL et des loyers dans le parc social n’est pas soutenable et n’améliorera en rien le pouvoir d’achat des locataires bénéficiant de l’APL. Il s’agit d’une mesure dictée par la volonté de baisser les dépenses de l’État en s’attaquant aux plus faibles. Un projet bâti à la hâte, techniquement, économiquement et socialement inepte ! » Plus mesuré, Christophe Robert de la Fondation Abbé Pierre, souligne les avancées intéressantes du plan, sur le logement des jeunes notamment, mais se déclare néanmoins « très préoccupé » au micro de FranceInfo : « Les APL et le logement social sont les réponses à ceux qui n’arrivent pas à se loger dans le marché : les pauvres, les sans-abris, les retraités modestes, les femmes seules avec enfant. Ce sont les instruments de la solidarité qui sont directement mis en cause. » Pour l’association Droit au logement, il s’agit d’une « attaque historique contre les locataires et le logement social, en faveur des nantis et des spéculateurs » . Le DAL lance un appel à la mobilisation le 14 octobre.