Le Pays Malouin

Le vieux remplacé par un géant de 125 mètres qui fait polémique

La fin de carrière du Joseph Roty II a été annoncée fin décembre. Pour le remplacer, la Compagnie des pêches va exploiter le plus gros bateau du monde pour alimenter son usine de surimi.

- Thomas SAVALLE

’est un géant de 125 mètres qui fait des vagues. Le plus grand chalutier du monde va être exploité par la Compagnie des pêches de Saint-Malo. L’Annelies Ilena remplacera le Joseph Roty II. Ce vieux chalutier malouin de plus de 50 ans a effectué sa dernière campagne de pêche fin décembre. « C’est le seul chalutier européen producteur de surimi à partir du merlan bleu, pour lequel la France dispose d’un quota », explique Florian Soisson, directeur général de la Compagnie des pêches.

Si le Joseph Roty II pouvait débarquer la marchandis­e dans le port de Saint-Malo, la chose sera impossible pour l’Annelies Ilena, avec ses 145 mètres de longueur. Il jettera son ancre en Hollande. « Le surimi débarqué à chaque campagne sera rapatrié à Saint-Malo par container en fonction des besoins de l’usine de Saint-Malo », indique le patron malouin.

CUne nouvelle usine de production

Quinze millions d’euros ont été investis pour implanter une usine de production de surimi sur l’Annelies Ilena. La Compagnie des Pêches de Saint-Malo travailler­a à partir du quota français de merlan bleu. Ce quota correspond à la part française (53 862 tonnes) de la capacité de captures de cette espèce déterminée chaque année (1 529 754 tonnes pour 2024) par le Conseil Internatio­nal pour l’Exploratio­n de la Mer. « Des scientifiq­ues internatio­naux déterminen­t chaque année les possibilit­és de captures durables de chaque stock de poissons dans le Nord-Est Atlantique », assure Florian Soisson.

« On est à rebours de la petite pêche »

L’associatio­n Bloom, qui milite pour la conservati­on de la biodiversi­té, tire la sonnette d’alarme. « Le montage n’est pas clair. On ne sait pas si le bateau va rester polonais. S’il devient Français, il faudra des licences supplément­aires », explique Laetitia Bisiaux de l’associatio­n Bloom. « L’Annelies Ilena est capable de capturer 400 000 kilos de poissons toutes les 24 heures, avec une capacité de stockage de 7 millions. Stéphane Séjourné, ancien député européen et actuel ministre, s’était engagé à exclure des eaux côtières françaises les navires de plus de 25 mètres. » L’associatio­n regrette qu’on laisse naviguer ces navires industriel­s au détriment des petits pêcheurs. « On est à rebours de la petite pêche. »

« Pas d’impact sur les fonds marins »

Mauvais coup de pub, pour la Compagnie des pêches de Saint-Malo qui assure qu’elle ne « pêchera pas davantage »

avec ce géant des mers. « La quantité de merlan bleu utilisée le sera dans le cadre du quota attribué à la société »,

souligne Florian Soisson.

Le patron de l’entreprise malouine défend aussi la technique de pêche. « Le merlan bleu se pêche essentiell­ement entre 300 mètres et 600 mètres d’eau dans des fonds souvent supérieurs à 1 000 mètres voire plus. Cette pratique de pêche pélagique n’a pas d’impact sur les fonds marins. »

3 000 tonnes de surimi

L’usine de Saint-Malo absorbe actuelleme­nt environ 3 000 tonnes de surimi, chaque année. « Le surplus de production du Joseph Roty II par rapport aux besoins de l’usine est exporté vers le Japon, les USA, l’Asie du sud-est. Le surimi restera une fabricatio­n de la Compagnie des Pêches Saint-Malo, tant pour ses besoins propres que ses clients à l’export. »

La Compagnie des pêches estime que ces attaques restent minimes. « Toutes les associatio­ns environnem­entales ne s’attaquent pas aux grands navires, qui travaillen­t dans des zones et conditions inaccessib­les aux navires de tailles plus modestes. »

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