Le « grand projet » (un peu) freiné dans son élan
Le « grand projet » des hôpitaux de Saint-Malo, Dinan et Cancale a avancé en 2023, ne serait-ce qu’avec le choix du site d’Atalante pour édifier le nouveau plateau technique. Mais il faut encore « rassurer » les services de l’État sur certains points.
e « grand projet » du territoire de santé était au coeur de la cérémonie des voeux qui s’est tenu le mardi 23 janvier à l’hôpital de Saint-Malo. Voici les points à en retenir.
LLes trois hôpitaux ont fusionné
Ne l’appelez plus Groupement hospitalier de territoire Rance Émeraude, mais Groupe hospitalier Rance Émeraude. Quelques syllabes de moins pour signifier que, depuis le 1er janvier 2024, les hôpitaux de Saint-Malo, Dinan et Cancale constituent une seule entité administrative.
Cette fusion, on en parlait depuis des années. « En 2019, il m’était déjà demandé de la faire, mais il fallait d’abord un projet médico-soignant partagé pour donner du sens à cette fusion », indique le directeur François Cuesta. Cela n’a pas empêché les personnels de Saint-Malo et Dinan de travailler ensemble sur plusieurs pôles, notamment celui des urgences, Smur et soins critiques, « où, à quelques exceptions près, tous les médecins partagent leur temps entre les deux établissements ».
Dans la perspective du « grand projet territorial »,
qui s’appuie sur le fameux projet médico-soignant partagé, la fusion administrative des trois hôpitaux publics s’est finalement concrétisé « en un temps record, grâce à un travail acharné en fin d’année ».
Comme convenu en 2020, la présidence du conseil de surveillance sera « tournante ». Et c’est le maire de Dinan Didier Lechien qui la lancera.
Le point sur le « grand projet »
En 2023, une zone de 11 hectares situés sur la zone Atalante, en périphérie de Saint-Malo, a été choisie pour édifier un nouvel hôpital qui concentrera chirurgie, réanimation, maternité, services d’hospitalisation de médecine polyvalente et spécialisée, plateau d’imagerie. L’hôpital François Broussais situé dans Saint-Malo sera reconverti en site « ville-hôpital », tandis que l’hôpital René Pléven à Dinan sera modernisé et restructuré, en y conservant service d’urgences et Smur 24h/24.
Tout cela coûtera plus de 400 millions d’euros. Pour valider le projet auprès de l’État, il y a plusieurs étapes à franchir, dont celle du Conseil national d’investissement en santé (Cnis) qui a rendu ses premières conclusions en décembre. « Il a jugé le projet d’une grande qualité tout en assortissant sa position d’un certain nombre de demandes complémentaires auxquelles il va nous falloir répondre dans les semaines qui viennent », indique Gilles Lurton, président du conseil de surveillance de l’hôpital et maire de Saint-Malo.
« Dois-je vous avouer ma grande déception quand j’ai eu connaissance de ces résultats juste avant Noël ? Cette première réaction passée, j’ai compris qu’il n’y avait pas de projet de cette importance sans qu’un certain nombre de précautions soient prises.
J’ai compris que l’État français ne pouvait pas investir autant d’argent - plus de 150 millions d’euros de subvention - sans s’assurer préalablement que toutes les conditions de réussite du projet étaient bien remplies. J’ai compris qu’il nous fallait encore rassurer sur un certain nombre de points. J’ai compris que rien n’était insurmontable. »
Il s’agit maintenant de répondre aux observations de la Cnis, qui sont essentiellement financières, « dans les délais les plus brefs ». Gilles Lurton précise au passage que le projet médico-soignant n’est « aucunement remis en cause ».
Le directeur François Cuesta reste lui aussi persuadé que le Groupe hospitalier saura « démontrer que ce projet est non seulement nécessaire, mais possible ». « Pour le réaliser, il devra être raisonnable et sobre, s’appuyer sur une logique médicale et mobiliser les ressources strictement nécessaires. »
Mi-mars a priori, le dossier sera présenté au Secrétariat général pour l’investissement, chargé d’en évaluer la cohérence. Ce sera « l’ultime étape avant le concours d’architectes ».
Plus de sobriété énergétique
De sobriété, il en est question sans attendre la concrétisation du « grand projet », même si celui-ci va résoudre le problème des « bâtiments vétustes ». Ils sont énergivores et compliquent aussi l’organisation du travail. Dans le premier bilan carbone réalisé à l’échelle du groupe, ils représentent le deuxième poste en matière d’émissions de gaz à effet de serre, le premier étant les achats et les soins. En multipliant les initiatives, cependant, l’objectif est de « diminuer nos émissions de 5 % par an », dixit François Cuesta.
Le Dr Taurin succède au Dr Bahu
Ça bouge du côté de la commission médicale d’établissement de Saint-Malo. Le Dr Philippe Bahu, qui en assurait la présidence depuis 2019, part en retraite. Ce chirurgien ORL avait rejoint l’hôpital de Saint-Malo en 1990, était devenu chef de service puis chef de pôle.
Son poste de représentant des médecins hospitaliers malouins l’a conduit à être aux avantpostes, avec son homologue dinannaise Chrystèle Le Bourlais, pour la construction du projet médico-soignant partagé et du grand projet territorial. « C’est un projet qui semble énorme pour un groupement hospitalier de notre taille, mais on va y arriver. Tout le monde est dans le sens de la marche. »
Il souligne aussi l’attractivité de l’hôpital malouin pour les médecins, dont les effectifs ont fortement augmenté ces dernières années (+ 9,1 % depuis 2021) : « C’est l’attractivité de la ville qui joue, mais pas seulement ça : il y a tout un environnement de travail qui inspire les jeunes médecins. »
C’est le Dr Grégory Taurin, neurologue arrivé en 2003 à Saint-Malo, qui succède à Philippe Bahu. « Le grand projet nous prend beaucoup de temps, avec des hauts et des bas, mais c’est normal d’avoir une maîtrise et un cap quand il s’agit d’investir 400 millions d’euros. » Il met en avant « la sobriété du projet » et « notre capacité à construire des parcours patients efficaces ».
L’activité de l’hôpital de Saint-Malo a fortement augmenté, selon les chiffres cités par Gilles Lurton. 53 040 hospitalisations ont été dénombrées en 2023, contre 40 783 en 2020, soit plus de 30 % d’augmentation. « L’hospitalisation de jour a presque doublé pour passer 8 401 à 16 560 sur la même période. »