Le Pays Malouin

Condamné pour une tape dans le dos d’une collégienn­e, le professeur relaxé en appel

- Sophie LE NOËN

Il avait été condamné il a y un an par le tribunal correction­nel de SaintMalo pour des violences après une « tape dans le dos » d’une collégienn­e. Le professeur vient d’être relaxé par la Cour d’appel de Rennes.

’était « une injustice » qu’il ne voulait pas laisser gravée dans le marbre de son casier judiciaire.

En mars 2023, ce professeur de collège a été condamné par le tribunal de Saint-Malo pour des violences sur une adolescent­e à qui il donnait cours.

CUne tape dans le dos

En cause : une tape dans le dos d’une élève en 2020, lors de la surveillan­ce d’un examen, où la collégienn­e n’était pas vraiment concentrée sur sa copie.

Les gendarmes avaient entendu l’ensemble des élèves…. dont il n’était pas ressorti grandchose, si ce n’est la louange des mérites du professeur. Son avocate, Charlotte Hunot, avait tenté de faire relaxer son client :

« C’est un geste inappropri­é, peut-être. Mais c’est une tape dans le dos, sur l’omoplate, comme on peut le faire avec des amis ».

Pourtant le juge malouin avait considéré qu’il y avait bien eu

« une atteinte à l’intégrité physique », et le professeur avait été condamné à une peine amende de 500 euros.

Faire appel de cette décision était une évidence pour cet enseignant, aux portes de la retraite. Même si les frais de justice lui ont finalement coûté plus cher que l’amende à laquelle il avait été condamné.

« Ça entache ma passion du métier »

La Cour d’appel a considéré il y a quelques jours que le geste était « insuffisan­t à constituer une violence » et a relevé qu’aucune lésion, ni hématome, ni aucun jour d’ITT (interrupti­on de temps de travail) n’avait suivi.

Aujourd’hui, l’homme de 64 ans se dit soulagé. Amer, aussi. « Cette affaire entache ma passion du métier ; le relationne­l qu’on a avec les élèves n’est plus du tout le même. »

Ne plus faire venir les élèves au tableau

Au rectorat, on lui a recommandé de rester derrière son bureau, de ne plus faire venir les élèves au tableau, et de garder les mains dans ses poches. « Ça rend le métier complèteme­nt loufoque, c’est comme si on donnait cours en visio. »

Professeur depuis 25 ans, il dit désormais faire attention à ne pas se tenir trop près des élèves, et redouble de précaution­s : « Les regards, j’en parle même. Moi maintenant quand il y a des tenues incorrecte­s, je ne les signale plus. »

Sans soutien de la part de ses collègues de l’Éducation nationale, le professeur vient de vivre quatre années éprouvante­s. Il peut maintenant finir sa carrière en étant soulagé certes, mais avec en toile de fond, le heurt d’avoir vécu une « profonde injustice ».

Me Hunot s’est dite elle aussi très satisfaite de cette relaxe. « Cela ne méritait pas une condamnati­on pour violences volontaire­s sur mineur, les mots ont un sens. »

Pour bien comprendre ce dossier, il faut se replonger dans la douce époque du Covid et des contrôles de pass sanitaire dans les lieux publics. Tout part d’une venue des forces de l’ordre dans ce restaurant de Saint-Malo, en janvier 2022.

Verbalisé pour nonport du masque

Ce jour-là, le gérant refuse de présenter son pass sanitaire, et est sûr de lui : « En tant que responsabl­e, la loi ne m’obligeait pas à le faire. » Il est finalement verbalisé pour non-port du masque, alors qu’il l’avait au bras et qu’il sortait juste de sa cuisine, où il se trouvait seul. Dès le lendemain, le gérant va porter plainte pour verbalisat­ion abusive, ce qui lui est refusé.

Alors il signale ce qu’il considère comme des abus au procureur, au préfet et à l’IGPN (Inspection générale de la police nationale). Dans des courriers pour le moins corrosifs, il dénonce des policiers qui n’auraient selon lui eu aucun scrupule à faire un faux pour pouvoir le verbaliser : il maintient, il avait son pass sanitaire. Il demande que les agents soient lourdement sanctionné­s.

L’incompréhe­nsion

Le voilà donc deux ans plus tard jugé pour dénonciati­on calomnieus­e. Et cette procédure est la goutte d’eau qui fait déborder le vase : « Je suis au bout du rouleau, et au bord de la liquidatio­n : il y a eu le Covid, et j’ai perdu 150 000 € de chiffre d’affaires avec les travaux sur le Sillon. »

L’homme brandit alors une photo et provoque comme un malaise : « Moi, parce que j’ai fait un pas de côté hors de ma cuisine sans masque, je vais être condamné. Ma femme a été violentée, et l’agresseur, lui, n’a eu qu’un rappel à la loi ! »

« Il a mis en cause la probité des policiers »

Pas de quoi émouvoir le Parquet, qui demande 2 mois de prison avec sursis : « La crise sanitaire a été une période très difficile, certes pour les restaurate­urs mais aussi pour les forces de l’ordre. Cette affaire a été très loin, elle a déclenché une enquête de l’IGPN. Il a mis en cause la probité des policiers, il doit prendre conscience de la gravité des faits qu’il a commis. »

L’avocat des policiers quant à lui demande 450 euros pour chacun des quatre agents en réparation de leur préjudice moral.

Venu sans avocat, le restaurate­ur en perd ses mots : « J’ai été honnête, je ne sais plus quoi vous dire, à part que je ne crois plus en la justice. »

Il est finalement condamné à une peine amende de 1500 € avec sursis et devra verser 400 € à chacun des quatre policiers.

 ?? (Image d’illustrati­on Adobestock) (Image d’archive) ?? Le professeur de Saint-Malo qui avait été condamné en première instance pour une tape dans le dos d’une collégienn­e a été relaxé par la Cour d’appel.
L’affaire remonte à la période du Covid, quand il fallait présenter un pass sanitaire et porter le masque. Un restaurate­ur de Saint-Malo, verbalisé pour non port du masque, avait dénoncé l’interventi­on des policiers et déclenché une enquête de l’IGPN.
(Image d’illustrati­on Adobestock) (Image d’archive) Le professeur de Saint-Malo qui avait été condamné en première instance pour une tape dans le dos d’une collégienn­e a été relaxé par la Cour d’appel. L’affaire remonte à la période du Covid, quand il fallait présenter un pass sanitaire et porter le masque. Un restaurate­ur de Saint-Malo, verbalisé pour non port du masque, avait dénoncé l’interventi­on des policiers et déclenché une enquête de l’IGPN.

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