Le Pays Malouin

« Fermer cette route pour la biodiversi­té »

Les jours de la route côtière D 201, qui longe l’anse du Guesclin à Saint-Coulomb, sont à l’évidence comptés. Mais l’associatio­n Bretagne Vivante aimerait accélérer sa fermeture, car sa présence « balafre » la dune et pénalise la faune et la flore.

- Bernadette RAMEL

n plein été, elle voit passer jusqu’à 4 000 véhicules par jour. Mais il faut se faire à l’idée : la route D 201 qui longe l’anse du Guesclin, à Saint-Coulomb, fermera un jour ou l’autre. Parce que la mer ne cesse de gagner du terrain.

Amplifié par la montée des eaux et le dérèglemen­t climatique, le recul du trait de côte y est impression­nant : un mètre tous les cinq ans, voire un mètre par an à certains endroits. Et, au gré des tempêtes, la départemen­tale a été ensablée et fermée provisoire­ment huit fois en 2023 ! Et elle l’était encore la semaine dernière à cause de la tempête Pierrick et des grandes marées...

N’en jetez plus ? Si, justement. Bretagne Vivante entend bien faire entendre sa voix pour réclamer, voire accélérer la fermeture de cette route et des aires de stationnem­ent qui vont avec. Car, dit-elle en substance, elles pèsent bien lourd sur la faune et la flore du site.

EUn site très modifié par l’homme

« Les enjeux de préservati­on de la biodiversi­té y sont très importants et méritent qu’ils soient pris en charge par les collectivi­tés locales et départemen­tale à la même hauteur que les enjeux de sécurité routière et de tourisme », affirme l’associatio­n de protection de la nature.

Sans parler même de l’endiguemen­t et de la route, l’anse du Guesclin a été largement transformé­e par l’homme : le marais a été drainé pour l’agricultur­e dès les années 50, du sable dunaire a été allègremen­t prélevé pour la constructi­on de l’usine marémotric­e de la Rance dans les années 60. Il a fallu attendre les années 2 000 pour que la « renaturati­on » du site soit engagée.

Une dune « corsetée, balafrée et dépouillée »

Il n’empêche : aujourd’hui, la dune y est à la fois « corsetée, balafrée et dépouillée », estime Gérard Prodhomme, référent Bretagne Vivante sur le territoire Rance Émeraude. La route, prenant de la place et bloquant l’apport de sable, empêche la partie « dune grise » de vivre. « Il n’y a donc pas la végétation qu’on est en droit d’attendre. »

Mais une zone renaturée avec succès

Par contre, sur la partie est du site, proche du ruisseau La Trinité, la biodiversi­té se déploie plus librement grâce aux travaux menés par le Départemen­t au titre de ses espaces naturels sensibles. Les zones humides sont préservées, les habitats diversifié­s. La prairie humide permet la reproducti­on des amphibiens. Autre exemple, « les roselières permettent à des oiseaux en migration de se nourrir et de nidifier, comme la Rousserole effarvate ou la Phragmite des joncs. On y voit aussi des Bruants des roseaux toute l’année », signale Véronique Babut, référente ornitholog­ie de l’antenne de Bretagne Vivante.

Il faudrait renaturer aussi l’exutoire et une partie du cours du ruisseau La Trinité, pour qu’il retrouve son espace d’échanges avec la mer. Mais, là encore, cela nécessiter­ait la suppressio­n de la route et des parkings...

La biodiversi­té plutôt que la voiture

Si Bretagne Vivante monte au créneau pour l’anse du Guesclin, c’est aussi parce qu’un groupe de pilotage associant État et collectivi­tés a été mis en place sur le devenir du site et qu’elle aimerait y être étroitemen­t associée. Aussi parce que deux parkings en retrait du littoral vont être expériment­és cet été : « C’est une réponse à l’anarchie du stationnem­ent en haute saison, mais cela ne change rien aux problèmes posés par la route », s’agace Gérard Prodhomme, qui aimerait que la biodiversi­té prime sur la voiture. David Haydocq, habitant de Saint-Coulomb et aussi membre de Bretagne Vivante, constate que les véhicules qui fréquenten­t le site sont souvent immatricul­és 35.

« La solution est donc bien en Ille-et-Vilaine. Pour qu’il y ait moins de voitures, il faut augmenter la fréquence des TER le week-end entre Rennes et Saint-Malo et améliorer la desserte du bus N°9. » Et aussi faire une plus grande place aux vélos : un aménagemen­t cyclable est programmé entre la gare de La Gouesnière et Cancale. « On attend sa réalisatio­n et un projet entre Cancale et Saint-Malo. »

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