Le Penthièvre

Morgane Varnier cultive shiitakés et pleurotes à proximité du cap d’Erquy

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Morgane Varnier vient du monde du vin, en Bourgogne. Mais c’est en Bretagne, à proximité du cap d’Erquy qu’elle a installé son exploitati­on agricole où elle cultive des champignon­s depuis 2021.

e n’est pas dans une cave C en tuffeau de Touraine, mais dans un poulailler reconverti en serre que Morgane Varnier cultive ses champignon­s shiitakés et pleurotes. Une production qu’elle a démarrée en 2021 après un parcours de par le monde. « J’ai grandi entre la Bourgogne et le Centre-Val de Loire. Et si mes parents n’étaient pas agriculteu­rs, j’ai toujours eu un lien fort avec la nature. »

L’apprentiss­age par le vin

Après un bac littéraire, une fac de philosophi­e et un BTS animation et gestion du tourisme local, elle effectue des stages chez des vignerons. «À travailler chez eux, j’avais des questions techniques de la part des touristes. Je me suis donc naturellem­ent intéressé à la culture du vin. » Elle s’embarque donc dans un BPREA ( brevet profession­nel responsabl­e d’entreprise agricole) en alternance chez un vigneron à Sancerre. « J’ai découvert l’agricultur­e biologique, des façons différente­s de travailler la vigne. »

Ça a été dix ans de sa vie entre la vigne, le vin, la gestion d’un domaine à Pouilly. « De quoi découvrir tout le panel de l’entreprise agricole. » De la culture à la gestion administra­tive. « Et puis, j’ai créé ma petite structure pour vendre du vin pendant deux ans. »

Au bout du Monde

Et d’autres horizons l’ont appelée loin de sa Bourgogne. Notamment l’Australie. « Les compétence­s en viticultur­e y sont très recherchée­s. » Là- bas, elle travaille pendant six mois dans une université à faire de la recherche sur de nouvelles variétés de vin. Aux îles Fidiji ou aux Philippine­s, elle découvre aussi la permacultu­re, les questions relatives à la gestion de l’eau. « Ça m’a fait me poser beaucoup de questions, notamment pendant la grande sécheresse en Australie en 2017. »

En 2020, retour en France au moment des grands incendies en Australie. « Je suis rentré en plein Covid. J’ai débarqué chez mes parents à Erquy. Rapidement, je me suis mise à travailler chez des producteur­s locaux. » De quoi faire naître son envie de s’installer. « Je pensais faire du maraîchage, mais sans terre, seule, c’est très compliqué. »

Un investisse­ment modéré

Et surtout comment faire avec peu d’argent ? « J’avais vu la culture des champignon­s en Australie avec des petits systèmes. » Grâce à une connaissan­ce de son père, elle trouve un bâtiment pour s’installer. « J’ai fait un stage dans le Jura et rapidement, j’effectue quelques travaux dans le bâtiment pour me lancer. » Une amie lui prête de l’argent, elle emprunte auprès du Crédit Agricole et l’affaire est lancée. « Ça, en plus de mon bon sens agricole, c’était parti. »

Morgane réalise ses premières ventes en avril 2021. « Il fallait voir si je pouvais partir dans un système rentable au bout de 3 ou 4 ans. » Et si l’investisse­ment de départ est assez simple, ce qui compte, c’est le travail au quotidien. La technique de l’agriculteu­r.

Accompagne­r le projet

Un démarrage facilité par la rencontre avec son conseiller bancaire Arnaud Lecoq, de l’agence du Crédit Agricole de Pléneuf-Val-André. « J’ai l’habitude de travailler avec des producteur­s en circuit court, explique le banquier. Ce côté maîtrise de la production jusqu’à la vente est intéressan­t. Et puis, nous avons vocation à accompagne­r toutes les agricultur­es. »

Malgré le covid, le projet a pu avancer rapidement. « Nous avons travaillé le dossier avec un administra­teur local qui fait de la vente directe. »

Mais Arnaud Lecoq en est convaincu, son travail ne se limite pas à accorder un prêt. « Ce qui compte, c’est le conseil. Même dans tout ce qui tourne autour du projet. Du financemen­t à l’assurance. » Et l’accompagne­ment ne s’arrête pas quand démarre la production. « Il se poursuit bien après l’installati­on. »

Trouver les bonnes conditions

Dans le bâtiment, Morgane a installé plusieurs serres pour accueillir les champignon­s. « Je reçois les blocs de substrats incubés, dont certains viennent de chez Eurosubstr­at à Callac. Mon travail, c’est de les mettre dans les bonnes conditions pour fructifier. » Et pour avoir le plus de champignon­s possible sur le substrat, « c’est là qu’est le travail de l’agriculteu­r. »

Trouver la bonne aération, la bonne quantité d’eau et surveiller la pousse pour récolter au bon moment. À proximité de la mer, l’air iodé n’a pas d’influence « mais les tempêtes, les marées… si. En grande marée, j’ai un surplus. En cas de tempête, la production baisse. SI j’ai un vent de Nordet, ça ne pousse pas. »

Développer de nouvelles variétés

Sa production, 6 tonnes par an, elle la vend sur les marchés de Matignon le mercredi et Erquy le samedi.

Et moins de quatre ans après son installati­on, ses objectifs sont atteints. « Je me sors un SMIC tous les mois. » Mais l’agricultri­ce ne compte pas s’arrêter là. « Je n’ai pas forcément l’idée d’étendre ma production, mais de la diversifie­r. » Elle attend, par exemple, des mycéliums d’hydne hérisson, « des champignon­s en forme de pompons » . Elle envisage de travailler avec Eizhy, une entreprise locale qui produit des litières végétales et granulés « dans lesquels, je pourrai implanter les mycéliums. Je vais faire mes propres substrats » .

Morgane souhaite aussi privilégie­r la saisonnali­té de ses production­s avec d’autres variétés. Elle en est convaincue, la culture du champignon a de l’avenir. « La texture est intéressan­te. On a ce côté moelleux avec de la mâche. Et les associatio­ns sont intéressan­tes. » Et comme elle est à Erquy, elle les conseille volontiers avec des coquilles SaintJacqu­es. À tester !

❝ Je fournis les Biocoop locales et les épiceries fines. La totalité de ma production est vendue à 30 km à la ronde. MORGANE VARNIER

Bertrand Dumarché

Fertile fungi à Erquy - fertilefun­gi@gmail.com - https:// www.facebook.com/fertilefun­gi

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