Lyme : quand les tiques attaquent
Le Perche, ses forêts et la maladie de Lyme. Transmise par les tiques, cette maladie handicapante voit le nombre de malades augmenter sensiblement dans le département.
C’est en se promenant que cet habitant de Courgeon a été piqué par une tique. Si la maladie lui laisse quelques répits, Bernard Riant vit un cauchemar qu’il ne souhaite à personne. Pourtant, de plus en plus de cas sont détectés. Le Perche n’est pas épargné.
Handicap. La vie de Bernard Riant de Courgeon, 67 ans, a basculé le 21 juin 2014 lorsqu’avec sa femme Bernadette ils décident d’aller se promener sur la voie verte. « Il faisait très beau ce jour-là. On s’est arrêté avec ma femme pour prendre des cerises et c’est à ce moment la que j’ai été piqué. J’ai senti la morsure, donné un coup sur la tique et elle est tombée » , raconte Bernard. Le couple part en vacances mais Bernard ne se doute pas qu’une semaine après il aurait 38,5 de température pendant trois jours. Un mal qui se déplace dans tout le corps
Courbatures, problèmes pour marcher et mal de tête… Le médecin sur son lieu de vacances voit l’anneau rouge autour de la morsure mais ne « tique » pas tout de suite. « Je l’informe que ça doit être la maladie de Lyme et il me répond : « Vous n’allez pas m’apprendre mon métier ! » ».
Pourtant, les symptômes empirent une fois qu’ils reviennent dans le Perche. Un matin, le bas de son visage commence à se figer. Sa femme pense à un AVC, direction les urgences d’Alençon. Le résultat est sans appel : méningite, excès de sensibilité au bruit, à la lumière… Après une batterie de test, on lui diagnostique formellement la maladie de Lyme et il reste hospitalisé un mois. Les malades désarmés
Bernard avait pourtant été sensibilisé sur cette maladie dès les années 90. Déjà, il avait été piqué par des tiques et avait traîné des douleurs pendant plusieurs années sans que les médecins ne trouvent quelque chose. Il a passé des dizaines d’examens mais rien de concluant. « C’est une maladie qui se déplace. Un jour on a mal au cervicales, le lendemain aux épaules, au dos… », raconte le sexagénaire.
Aujourd’hui Bernard Riant va mieux. Quand on lui parle, il ne paraît pas malade. Fini la paralysie, même si les douleurs persistent : « Il y a des matins où je me lève et je sais que ma journée est foutue » . Douleurs musculaires et grosses fatigue continuent de lui pourrir la vie. « J’ai la maladie à vie. Elle peut redémarrer brutalement » , affirme le sexagénaire.
Surtout, l’absence de diagnostic précis et l’absence de symptômes visible rendent la maladie « désarmante » pour les personnes qui sont atteintes. Certaines personnes se verront attribuer des maladies mentales… « On ne peut pas leur jeter la pierre. Les médecins ne sont pas formés pour cette maladie » , regrette Bernard Riant. Régime alimentaire et mentalité de guerrier
Sur conseil de son médecin, il s’impose un régime alimentaire strict sans gluten, sans sucres, agrumes… « Si on ne s’en prive pas, ça nourrit la maladie » , affirme-t-il. Il suit aussi un traitement, non remboursé intégralement par la sécurité sociale car la forme chronique de la maladie n’est pas reconnue. « Au début, sur 350 € de médicaments par trimestre, seul 6,90 € étaient remboursés ! », raconte le sexa- génaire.
Bernard Riant a eu de la chance. Sportif, l’habitant de Courgeon aime le combat. « Il faut avoir la rage. Il faut se battre contre cette maladie, il faut s’accrocher ! » , affirmet-il. Paralysé du visage il s’efforçait de se rééduquer, se forçait à marcher dans les couloirs à l’hôpital d’Alençon… La personne atteinte de la maladie de Lyme dans la même pièce que lui restera plusieurs mois avant de sortir. Le fait de rester actif lui a permis de récupérer plus vite.
Comme pour un cancer, on ne parle pas de guérison mais de rémission. « La bactérie reste dans l’organisme. On ne peut pas garantir aux gens de guérir » , explique Sophie Dubé, présidente de la section Orne de l’association France Lyme. Mais pas question de se laisser abattre : « Il y a vraiment l’espoir d’aller mieux ! On peut vivre une vie normale » . 20 000 nouveaux cas par an en France
Transmise par les tiques, la maladie, autrefois cantonnée dans l’est de la France, l’Allemagne et les États-Unis, s’est propagée sur toute la France. « J’ai vu la première maladie de lyme en 1988. Depuis j’en suis à une trentaine de cas plus ou moins important par an », raconte Jean-Louis Rougeyron, médecin à Solignyla-Trappe depuis 40 ans. On estime aujourd’hui à 20 000 le nombre de nouveaux cas par an en France.
Pour lui, la propagation de la maladie est due à un mauvais entretien des sous-bois et une augmentation sensible de personnes allant dans les forêts. « Les gens n’ont pas pris l’habitude de regarder si ils ont été piqués par des tiques en rentrant de forêt ». Aussi, les tests de détection ne sont pas fiables à 100 % et la multiplication des symptômes complique le diagnostic du médecin.