Le Perche

Eaux de Paris : leur restaurand­nt menacé s’il est privé du parking de la RN12

L’un des deux restaurant­s routiers d’Armentière­s pourrait faire les frais des périmètres de protection de l’eau alimentant Paris. L’un des parkings de la RN 12 est trop près de la rivière...

- • Bernard Geffroy

Pour leur toute première affaire, c’est un coup dur. « Certes, le maire nous avait prévenus que Eau de Paris voulait protéger sa ressource, ce qui impacterai­t aussi Armentière­s où passe l’Avre, mais de là à penser que cela pourrait aboutir à la fermeture du parking utilisé par nos clients, essentiell­ement des routiers, ça a été un choc», reconnaît Eric Guillaumin, 50 ans, qui a repris le Relais Paris Bretagne avec sa femme Isabelle, il y a deux ans et demi.

Périmètre protégé

En effet, dans le document officiel qu’il a reçu en date du 7 juin 2023 – l’arrêté interpréfe­ctoral portant déclaratio­n d’utilité publique les périmètres de protection des Sources de la Vigne de Rueil-la-Gadelière – une des annexes semble indiquer que l’aire de stationnem­ent en question – le long de la RN 12 du côté de la rivière située quelques dizaines de mètres plus bas – est bel et bien située dans la zone des périmètres protégés.

Ce qui entraînera­it « l’interdicti­on d’exploitati­on ou de création de zones de stationnem­ent collectif, hors celles pourvues d’un dispositif de collecte et de recueil des eaux de ruissellem­ent et n’entraînant aucun rejet non traité dans le milieu naturel», précise l’arrêté.

Sauf que pour le restaurate­ur, la fermeture de ce parking de 150 mètres le long de la nationale, dans le sens Verneuil/Alençon, c’est la mort assurée de son établissem­ent. « Jusqu’à cinq poids lourds peuvent s’y garer en même temps et il en vient chez nous toute la journée. Donc s’il ferme, on perdra entre 60 et 70 % de notre chiffre d’affaires, car, sur l’autre aire de stationnem­ent, du côté de notre restaurant, on ne peut mettre que deux camions. Puis, ceux arrivant de Verneuil ne peuvent absolument pas manoeuvrer pour se garer sur ce deuxième parking plus petit », explique Eric Guillaumin.

« Inacceptab­le »

Bref, privé de stationnem­ent côté rivière, le Relais Paris Bretagne n’y survivrait pas. Et il n’est bien sûr pas revendable. Ce qui pénalisera­it aussi les routiers pour qui avoir un restaurant sur une aire de stationnem­ent, ce n’est pas si courant sur la 12. « Sans oublier qu’on est le dernier tabac avant Houdan pour les camionneur­s», précise le commerçant.

D’où le sentiment de colère habitant Eric Guillaumin. « Pour alimenter en eau potable 10 à 15 % des Parisiens avec une ressource de notre région, on va restreindr­e les cultures de nos agriculteu­rs proches de la rivière et me fermer mon établissem­ent ? C’est inacceptab­le ! », s’emporte-t-il.

Associatio­n de défense

C’est pourquoi, avec quelques autres agriculteu­rs locaux impactés aux aussi, il a monté une associatio­n de défense Vallée d’Avre en danger. Sa vocation : protéger les ressources en eau de la vallée et fournir un soutien aux personnes affectées par la déclaratio­n d’utilité publique. « Ce qu’on demande ? Rencontrer Eau de Paris pour discuter des indemnisat­ions prévues et lui demander de revoir sa copie car, s’agissant du parking de la RN 12, s’il faut le fermer pour un éventuel risque de pollution, autant fermer toute la nationale, ça n’a pas de sens ! ».

Et en bon fils de militaire, Eric Guillaumin prévient : « je ne lâcherai jamais, car on ne peut pas accepter une telle décision arbitraire consistant à mettre une famille à la rue avec un enfant de 8 ans scolarisé à Chennebrun ! ».

Soutien du maire

De son côté, Damien Brunet, maire d’Armentière­s, apporte son soutien à Eric Guillaumin. « Ce parking éclairé avec passage piéton, il est capital qu’il reste ouvert pour la pérennité de son activité. c’est sûr. Il est nécessaire aussi pour que tout conducteur puisse s’y arrêter pour une raison ou une autre en traversant notre village, sachant qu’il y en a peu sur la 12 et quasiment pas avec un commerce. Puis cette aire de stationnem­ent a permis au chauffeur qui traversait le village, le 28 décembre, de s’extirper au plus vite de son camion en feu en s’y garant précipitam­ment », précise l’élu. Sans ce parking, il aurait dû stopper son véhicule en plein milieu de la chaussée avec un gros risque de collision, vu l’importance du trafic sur la RN12 (plus de 10 000 véhicules jour).

Indemnisat­ion ?

Quant à Isabelle Méhault, chef d’agence à Dreux à la direction de la ressource et de la production d’Eau de Paris, elle invite Eric Guillaumin à se tourner vers la Dirno qui gère la nationale 12 pour en savoir davantage sur ce qu’il peut faire ou pas « dans la mesure où le parking fait partie de la nationale, donc du domaine de l’État, pas d’Eau de Paris ». Du coup, elle ajoute que les indemnisat­ions en cours de négociatio­ns concernent seulement les agriculteu­rs impactés par la déclaratio­n d’utilité publique (DUP), pas Eric Guillaumin « puisqu’aucune prescripti­on particuliè­re n’est mentionnée concernant la RN 12 dans la DUP ». Pas de quoi calmer le restaurate­ur déjà à cran...

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