Le Perche

Acheter des colis perdus : la grande mode qui fait les affaires d’Elodie et Aurélien

La revente de colis perdus ou notifiés NPAI (N’Habite Pas à l’Adresse Indiquée), connait un boom sans précédent. Près de Mortagne-au-Perche, une société a décidé de surfer sur cette vague. Et ça marche fort.

- • Vincent GUERRIER

Nous sommes en décembre 2023. Au début du mois, il faut déjà penser aux cadeaux. Pour certains, c’est une corvée. Avoir des idées, être inventif, ne pas décevoir… Trouver le bon cadeau est toujours un défi. Mais cette année-là, ils seront nombreux à faire le choix…de ne pas faire de choix. La mode des colis mystères s’est répandue comme une trainée de poudre dans toute la France.

Ces colis, commandés sur internet, sont soit abandonnés par leurs propriétai­res qui ne vont jamais les réclamer, soit ils ne trouvent jamais la bonne adresse de livraison. Plutôt que de les détruire, comme ce fut longtemps le cas, certains ont eu l’idée de les acheter au poids, pour les revendre ensuite.

L’explosion

Encore dans leur emballage, l’effet de surprise fait le reste : sur 10 kilos de colis achetés, les clients ont l’espoir de trouver la perle rare : un produit hi-fi qu’ils pourront soit garder, soit revendre et ainsi se faire une petite marge. « Je compare toujours aux jeux à gratter. L’avantage des colis perdus, c’est que vous êtes sûr d’avoir toujours quelque chose. Si rien ne vous convient dans le lot, vous pouvez toujours tout revendre et vous faire un petit bénéfice, à réinvestir pour tenter d’avoir un meilleur lot. »

Aurélien Jaeg s’est engouffré dans la brèche du colis perdu en avril 2023, en lançant Perche Shop. « On en avait entendu parler en 2022. J’ai toujours été négociant, en volaille par exemple. Je voulais ouvrir un magasin de déstockage. Mais quand j’ai entendu parler de cette mode, j’ai sauté dessus. »

Il commence alors chez lui, et se fait livrer des palettes qu’il commande directemen­t via des logisticie­ns, en contact direct avec les grandes plateforme­s de livraisons de colis. Bonne surprise, l’affaire est florissant­e, et Aurélien est rapidement dépassé. « J’avais des colis partout chez moi, et je manquais de place pour répondre à la demande. Alors à l’été 2023, j’ai loué l’ancien garage de Saint-Ouen-de-Sécherouvr­e. Le bâtiment offre un espace de stockage important, et la proximité avec la D932, idéale pour faire venir les nombreux semiremorq­ues qui déchargent la marchandis­e.

« Du long terme »

Sur son site internet, les commandes affluent par dizaine. Plusieurs palettes peuvent se vendre en une seule journée. A Noël, la demande est telle que l’arrivage se fait au compte goutte. « Entre les particulie­rs sur le site et en boutique, et les profession­nels qui nous prennent des colis pour des animations en supermarch­é notamment, nous avons eu du mal à répondre à tout le monde, car il y a de plus en plus de monde sur le marché, et donc les logisticie­ns ont un peu moins de stock», confie Aurélien Jaeg. Il embauche tout de même Elodie Vinette, pour l’épauler, notamment dans le service client. «J’ai envie de penser à long terme avec cette société, et il faut y aller étape par étape. J’aimerais bien essayer de trouver un local plus près de Mortagneau-Perche, et pourquoi pas embaucher, en fonction de la demande. »

Le gérant ne voit pas cette mode passer telle une comète. « Nous avons des clients qui reviennent chaque semaine nous prendre des colis. C’est la preuve qu’ils y trouvent leur compte. Je pense que ça va perdurer », croit-il.

20 % de high-tech

Bien sûr, qui dit surprise dit parfois déception. « Évidemment nous avons des gens déçus. Il faut savoir que 90 % des colis achetés sur le net viennent de Chine. Et ils ne veulent pas récupérer ces colis perdus pour des questions logistique­s. Donc ces produits ne correspond­ent pas toujours aux attentes. On estime que dans les lots, il y a 70 % de vêtements, 20 % de high-tech, et 10 % d’accessoire­s en tout genre. »

En boutique, le gérant permet aux clients de choisir les colis, et de payer au poids, selon leurs envies. Sur internet, les achats se font par 5, 10 ou 15 kilos. De quoi avoir, au moins, ce petit frisson à l’ouverture.

■ Pratique

Perche Shop à Saint-Ouende-Sécherouvr­e. Ouverture sur rendez-vous, le mercredi et vendredi en boutique. https://percheshop.com/

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Elodie Vinette s’est installée avec Aurélien Jaeg dans un ancien garage, à Saint-Ouen-de-Sécherouvr­e, entre Moulins-la-Marche et Mortagne-au-Perche. Vincent GUERRIER
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Perche Shop reçoit des colis par centaine. « Entre 5 et 20 tonnes par semaine ». Les clients peuvent venir se servir au magasin. Vincent GUERRIER
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Vincent GUERRIER
Elodie Vinette, au magasin Perche Shop. Vincent GUERRIER

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