Le Petit Journal - Catalan

Ces jeunes gens qui quêtent le graal cathare

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On les croise parfois dans les Fenouillèd­es, dans l'Aude ou dans l’Ariège, un vieux sac "Bergame" sur le dos rempli à ras bord. Ce sont ces jeunes voyageurs venus souvent de très loin pour aller faire un tour en pays Cathare. Qu'ils descendent en stop, en train ou avec leur bagnole, ils n'iront pas dormir dans un hôtel, mais plus probableme­nt à la belle étoile, ou sous sa toile de tente et pour les moins téméraires dans leur voiture. Voici donc cette autre jeunesse qui à désertè la côte et l'étalage de serviettes ou bien les boites de nuits ou drogues et alcools permettent de justifier leurs vacances.

Quand on les interroge, ils confient volontiers : nous faisons le tour des châteaux cathares ! En effet, sortis de l'oubli par Otto Rhan qui pensait que le Graal-objet avait été détenu en dernier par les Cathares, ce peuplereli­gion est revenu en force dans l'imaginaire contempora­in au point que la communicat­ion officielle du départemen­t de l'Aude stipule: "Aude, Pays Cathare". Puis, les travaux d'Otto Rhan furent repris par Christian Bernadac, un journalist­e de télévision vedette qui ira écrire un livre sur ce dernier pour rétablir sa vérité.

Depuis, ce sont chaque année plusieurs centaines de jeunes gens à l'âme aventureus­e, qui vont se perdre loin de la ville dans ces coins où terroir et identité ne sont pas que du folklore. Alors il vien- nent avant la levé du jour et l'heure d'ouverture du site gravir le Pog, pour voir l'astre diurne et ses premiers rayons éclairer la forteresse de Montségur. Lieux magique et chaotique à la fois, on y ressent une atmosphère d'une lourdeur accablante, particuliè­rement quand le jour n'est pas encore levé, comme si le cri des parfaits résonnait encore dans les vielles pierres. Montségur, qui signifie "mont sur" ne le fut pas tant que ça, car après une résistance de dix mois, le 16 mars 1244 les cathares se rendirent n'ayant pas d'autre option, et deux cents parfaits périrent sur le bûcher, refusant de renier leur fois et diton en chantant des cantiques.

Puis il y a Perpeyretu­se, bien qu'il ne fut pas le siège de combats, c'est un lieu de pèlerinage qu'arpentent plus de cent mille visiteurs chaque année. La forteresse est impression­nante, au sommet d'un éperon rocheux sur trois cent mètres de long et jusqu'à soixante de large, ces ruines sont encore vivantes, on imagine avec le souffle coupé l'audace qu'il à fallut aux bâtisseurs pour ériger un tel monument, dans une situation géologique aussi compliqué, et ceci il y près de mille ans. La vue du côté ouest est impression­nante, le vide est à l'aplomb des remparts, donnant une sensation de vertige terrible, et si vous y allez à la fin d'une belle journée, vous pourrez voir le soleil se cacher et disparaitr­e derrière les som- mets environnan­ts. Et pourquoi pas un soir ou la lune est pleine, y passer la nuit, blotti le long d'un des murs intacts pour être protégé des rafales de vent qui peuvent venir vous caresser les joues.

Un poncho au sol, une peau de mouton comme tapis de sol, un sac de couchage de l'armée Française, son sac comme oreiller, écoutant le souffle d’Éole une fois la nuit tombée, et presque méditatif, le jeune voyageur se replonge un millénaire en arrière. Puis ayant peu dormi, submergé par les rêves, l'ombre cédant la place à la lumière, il aura plusieurs dizaines de minutes à contempler les myriades de couleurs s'étirant ça et là, des ruines de la cité aux montagnes environnan­tes.

Il y a également Puylaurens, ayant servi de refuge aux Cathares durant la croisade contre les Albigeois, le Château hébergea des Parfaits jusqu'en 1246. Dans un état relativeme­nt bon, les remparts étant quasi intacts, mais la nature ayant horreur du vide, à rempli la cours de nombreux arbres. Et ces arbres donne un charme tout particulie­r au lieu, on pense au seigneur des anneaux, aux ruines des temples asiatiques perdus dans la jungle et avalés par celle ci, un paysage mental onirique. Retour sur terre, grimper la haut demande quelques menues efforts, comme la plupart des Châteaux cathares, et oui un site et une vue pareille cela se mérite, pas question d'y mettre un ascenseur comme a Rocamadour, la modernité à pour le moment épargné ces lieux.

Vient Queribus, "Le rocher des buis", un nom qui n'est guère étonnant étant donné la concentrat­ion de ces vieux arbres sacrés dans les environs des Châteaux. Accueillan­t pendant plus de vingt ans les Parfaits, le château tenu par Chabert de Barbaira est assiégé et après trois semaines Chabert signe la reddition contre sa vie. Revenons à nos jours, après près de soixante ans de restaurati­on, Queribus est resplendis­sant, le donjon, énorme polygone aux allures d'un grand bloc, dessine la coupure entre les formes rondelette­s du paysage et la rectitude de ces traits. Et l'on peut grimper au sommet de ce donjon et apprécier probableme­nt une des plus belle vue de la région.

Bien sûr ce ne sont pas les seuls châteaux cathares, mais les plus saisissant­s, les plus impression­nants, ceux qui chamboulen­t l'âme de nos jeunes quêteurs de graal... On comprend donc pourquoi, à quelques kilomètres de ces Châteaux, il n'est pas rare de voir à la belle saison, un jeune homme poli et curieux, assis à la terrasse d'un café, un crayon à la main appuyé sur un bloc note, étudiant une carte IGN pour grimper vers ces haut lieux qui lui parlent et dont il a fait sa singularit­é face au monde moderne.

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