Le Petit Journal - Catalan

Brasillach, écrivain cata

-

Robert Brasillach, notre grand écrivain perpignana­is, est lié à son poteau, très droit, la tête levée et fière. Au-dessus du cache-col rouge, son visage apparait très pâle. Le greffier lit l’arrêt par lequel le pourvoi est rejeté. Puis d’une voix forte, le perpignana­is crie au peloton : «Courage !...» Et les yeux levés : «Vive la France !» Le feu de salve retentit. Le haut du corps se sépare du poteau, semble se dresser vers le ciel. La bouche se crispe. Le maréchal des logis se précipite et donne le coup de grâce. Le corps glisse doucement jusqu’à terre. Il est 9h38, le 6 février 1946. Le fusillé a trentesix ans et une apparence d'étudiant. Naturellem­ent, vu l'ampleur de son oeuvre, la profondeur de sa culture et surtout la puissance de son style, Robert Brasillach était et demeurera pobablemen­t à jamais le plus grand écrivain enfanté par la petite préfecture des Pyrénées Orientales. Né le 31 mars 1909 à Perpignan dans la maison familiale du quai Vauban, Brasillach est un pur catalan français. Ses parents sont tous deux d’origine catalane. Son père prénommé Arthémile est lieutenant dans l’infanterie coloniale, militaire de carrière tout comme l’était son aïeul. Sa mère Marguerite (née Reno) a fait des études d’infirmière. Leur mariage pour le meilleur et pour le pire fut célébré en février 1908 à Perpignan cheflieu de la Catalogne française. Suzanne, la s?ur de Robert vit le jour un peu plus tard 29 avril 1910. Puis la famille se transporta à Rabat au Maroc ou Arthémile Brasillach fut promu au grade de capitaine. C’est au cours d’une embuscade près de Khenifra que le père de Robert et de Suzanne trouva la mort le 13 novembre 1914.

Pupille de la nation à l’âge de 5 ans, Robert Brasillach ainsi que sa s?ur et sa mère retournère­nt ainsi à Perpignan. Marguerite Brasillach, ses deux enfants étant scolarisés, s’engagea dans l’aide aux blessés de la Grande Guerre avec un grand dévouement. C’est dans ce cadre qu’elle rencontre le médecin militaire Paul Maugis. Leur mariage le 11 février 1918 transporta Robert, alors âgé de neuf ans, vers Sens (départemen­t de l’Yonne).

Au lycée de Sens où il a pour professeur Gabriel Marcel, Robert Brasillach est, après trois ans de classe préparatoi­re littéraire au lycée Louis-le-Grand — où il côtoie Maurice Bardèche, Thierry Maulnier, Paul Gadenne, José Lupin, Jean Martin et Paul Arrousseau —, admis à l'École normale supérieure en 1928, période qu'il décrira longuement dans les premiers chapitres de Notre avant-guerre, livre de mémoires écrit en 1939-1940.

À 16 ans, le jeune Brasillach fait ses premiers pas dans l’écriture et se fait remarquer par son premlier article publié dans les colonnes du Coq catalan, l'hebdomadai­re "littéraire, satirique et sportif" d'Albert Bausil qui sera aussi le protecteur de Charles Trenet.

Brasillach est très tôt fasciné par le cinéma : de 1922 à sa mort, il rend compte avec enthousias­me de l'actualité cinématogr­aphique. Le fruit de cette passion, outre de nombreuses chroniques dans les journaux, est son "Histoire du cinéma" publiée pour la première fois en 1935 et qui fera l'objet d'une nouvelle édition en 1943 en collaborat­ion avec son beau-frère Maurice Bardèche. Contrairem­ent aux critiques de l'époque, Brasillach adopte sur le cinéma un point de vue politiquem­ent neutre, hormis quelques rajouts antisémite­s de circonstan­ce en 1943. Sa soif de cinéma l'amène à fréquenter assiduemen­t Henri Langlois au Cercle du cinéma. Bien qu'enthousias­te sur les classiques (Charles Chaplin, Georg Wilhelm Pabst, René Clair, Jean Renoir...) et les films hollywoodi­ens ( John Ford, Frank Borzage, King Vidor...), il fait preuve de goûts originaux et montre une insa- tiable curiosité pour les cinémas étrangers. Il est ainsi le premier à parler en France du cinéma japonais et notamment de Yasujiro Ozu, Kenji Mizoguchi et Heinosuke Gosho. En prison, il travaillai­t à la troisième édition de son Histoire du cinéma et préparait une adaptation de Falstaff, qu'il espérait tourner avec Raimu.

À Paris, Robert Brasillach s’inscrit au lycée Louis-leGrand où il prépare le concours d’entrée à l’École normale supérieure de la rue d’Ulm. Il a comme camarade de classe Maurice Bardéche, son futur beau-frère. Son amour de la littératur­e française amène Brasillach à écrire un premier roman – Fulgur – qui sera publié en feuilleton dans La Tribune de l’Yonne en 1926 pour lequel Robert Brasillach rédige également ses premiers articles. Paraissent alors La Femme du médecin et La Tramontane, puis il se consacre à son roman Les Vacances qui décrit la France après la Grande Guerre.

Admis à l’école normale en 1928, Robert fait la connaissan­ce de futures célébrités comme la philosoiph­e Simone Weil que Bardéche appellera « la Vierge rouge ». Mais également de Jacques Soustelle, d’Henri Queffélec et de René Clair.

Le romancier Robert Brasillach est à la fois poète, essayiste, auteur de théâtre, historien, critique littéraire et journalist­e. Il publie Présence de Virgile. C’est l’évocation du devenir d’un homme du présent, tout comme l’était le grand poète de l’Antiquité avec ses racines paysannes et la disparitio­n douloureus­e de son père.

Alors qu’il accomplit son service militaire à Lyon en 1932, Robert Brasillach publie Le Voleur d’étincelles et Le Procès de Jeanne d’Arc. Dans ces ouvrages, on retrouve l’influence charnelle de Colette, mais également les racines familiales chères à Maurice Barrés...

Brasillach est devenu entretemps maurassien et royaliste d'Action Française. Aussi, à partir de ses années étudiantes à la fin des années 20, jusqu'en 1937, Brasillach assura une chronique littéraire dans le quotidien L'Action française, le journal le plus intelligen­t et le plus violent de son époque. En accord avec la germanopho­bie répandue au sein de l'Action française, il est à cette époque extrêmemen­t sceptique vis-àvis de l'hitlérisme. Après avoir lu Mein Kampf, il écrit en 1935 : « C'est très réellement le chef-

 ??  ?? Persuadé de la justesse de ses idées comme au premier jour, Brasillach réclame un fascisme à la française, qui soit allié au nazisme mais qui ne soit pas un simple calque ; partisan zélé de la victoire de l'Allemagne nazie, il la juge de moins en moins probable et refuse de mentir en l'annonçant comme certaine à un public qui n'y croit plus.
Persuadé de la justesse de ses idées comme au premier jour, Brasillach réclame un fascisme à la française, qui soit allié au nazisme mais qui ne soit pas un simple calque ; partisan zélé de la victoire de l'Allemagne nazie, il la juge de moins en moins probable et refuse de mentir en l'annonçant comme certaine à un public qui n'y croit plus.

Newspapers in French

Newspapers from France