Le Petit Journal - Catalan

Déficit de 4 à 5 milliards en 2016

« On ne s'en sort plus : 25 000 € de découvert, tous les mois, depuis un an... » Rachel, 42ans, n'est plus très loin de baisser les bras. Avec son mari Daniel, elle tient une ferme de 80 vaches laitières. Leur lait (800 000 l/an) leur est payé 270€ par to

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Crise climatique, crise des marchés, engendrant le désespoir des agriculteu­rs: la situation de l'agricultur­e française "n'a jamais été aussi grave" et, selon le président de la FNSEA Xavier Beulin, le niveau des pertes dans ce secteur va s'élever pour 2016 "de 4 à 5 milliards d'euros", toutes filières confondues.

Cette perte "résulte d'une crise de marché, d'une crise climatique et d'une crise sanitaire qui se cumulent", a expliqué mercredi M. Beulin, qui s'exprimait dans une exploitati­on laitière, à Sulniac (Morbihan) à l'occasion d'une rencontre avec des agriculteu­rs et des responsabl­es locaux de son syndicat. La FNSEA réalise un tour de France des régions agricoles "où l'on sent de la désespéran­ce", selon le secrétaire général adjoint du syndicat, Daniel Prieur.

Sur ces 4 à 5 milliards d'euros de pertes sur "la Ferme France, on estime qu'il y a 3 milliards, peut-être un peu plus", qui vont venir des céréales, a précisé le président du principal syndicat agricole.

Cette filière connaît de grandes difficulté­s pour la deuxième année, avec "des cours mondiaux très très bas" selon M. Beulin. Les intempérie­s au printemps, plus particuliè­rement dans la moitié nord de la France, ont provoqué en outre une forte chute des rendements.

"C'est globalemen­t, a dit M. Beulin, une perte (de production) supérieure à 30% avec des pics parfois -- je pense au blé dur -- de 60%. C'est énorme", a détaillé M. Beulin.

Conséquenc­e de cette situation dans l'agricultur­e française, "la FNSEA travaille sur un plan de refinancem­ent" des exploitati­ons, "car à ce niveau de pertes, ce ne sont pas des mesures traditionn­elles qui peuvent suffire", a expliqué M. Beulin à la presse.

Alors que nombre d'exploitati­ons ont vu leur trésorerie se dégrader, "ce que nous allons demander au gouverneme­nt, c'est de prendre en charge un fonds de garantie ou de réassuranc­e qui devrait permettre aux banquiers, en direct auprès des agriculteu­rs, de leur proposer des conditions de taux, de durée (d'emprunts) compatible­s avec leur rentabilit­é", a poursuivi M. Beulin, qui milite aussi pour "une fiscalité agricole mieux adaptée".

Tableau noir -

Prix, valorisati­on de la production, revendicat­ions sur les normes et réglementa­tions qui pèsent sur les exploitati­ons, sont les autres chantiers prioritair­es du syndicat, a rappelé Xavier Beulin.

Ce dernier a écouté pendant près de deux heures à Sulniac les participan­ts à cette réunion qui ont dressé un tableau, souvent noir, des différente­s filières: volailles, porcs, ?ufs, viande bovine, lapins mais aussi lait. Un secteur très déprimé, en raison des prix très bas payés aux producteur­s.

Principale cible de cette colère, la politique menée par Lactalis, le numéro un mondial du lait.

Le groupe français "a annoncé en juillet le prix le plus bas jamais annoncé, pour les mois de juillet août, à savoir 256 euros les 1.000 litres", a expliqué Marie-Andrée Luherne, secrétaire général de la FDSEA 56.

"C'est un très mauvais signe car ça donne la tendance" pour les autres opérateurs du secteur, a-t-elle dit.

"Pour une rémunérati­on normale de notre travail, il faudrait un prix de 360 euros pour 1.000 litres", a précisé Mme Luherne.

M. Beulin a en outre réclamé que tous les industriel­s leaders dans leur secteur, Lactalis, Bigard (premier groupe de transforma­tion de viande français) ou Cooperl (numéro un du porc), fassent en sorte de "rémunérer leurs producteur­s convenable­ment" et de négocier "avec la grande distributi­on pour valoriser nos propres produits".

Moins spectacula­ires qu'à certaines périodes des mois passés, les actions des agriculteu­rs contre les industriel­s ou la grande distributi­on se poursuiven­t néanmoins. Des agriculteu­rs de Haute-Saône ont ainsi mené mercredi des actions punitives contre des supermarch­és Casino, auxquels ils reprochaie­nt de ne pas avoir retiré de leurs rayons les produits des marques Président (groupe Lactalis), Caprice des dieux, Bigard et sa filiale Charal, comme ils le leur avaient demandé.

Les acteurs de l'agricultur­e française, syndicats, banques, mutuelles, chambres d'agricultur­e, se réunissent le 1er septembre à Paris pour tenter de construire un plan de sortie de crise.

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