UNE MARÉE NOiRE EsT POssiblE
Le risque zéro n’existe pas, même en Méditerranée
Il y a 40 ans, en mars 1978, se produisait en Bretagne la pire marée noire que l’Europe ait connue et l’une des plus grandes catastrophes écologiques de tous les temps des situations à risques qui se produisent en Méditerranée.
Depuis 1978, les pouvoirs publics n’ont eu de cesse d’augmenter leur niveau d’exigences. Et la réglementation internationale est allée dans le même sens. Cela a permis notamment d’en finir avec les pétroliers à simple coque comme l’étaient l’Amoco Cadiz et l’Erika. Le dernier grand pétrolier de ce type a d’ailleurs été démantelé en 2015.
Cela a permis aussi de mettre en place des contrôles portuaires très poussés et harmonisés au niveau européen. Reste le plus important qui est de prévenir les accidents de mer. Pour cela, le préfet maritime a mis en place différentes réglementations dont la principale a eu pour effet d’éloigner à plus de 7 milles (13 km) des côtes, les navires de fort tonnage. D’autre part, la France impose aux capitaines, sous peine de sanctions lourdes, de signaler tout incident ou accident de navigation survenant dans ses eaux territoriales ou sa zone économique exclusive (ZEE). Grâce àquoi, en cas de crise, le préfet peut prendre toutes les dispositions nécessaires. D’autant que le droit international lui permet d’agir dès qu’une menace pour l’environnement se fait jour dans la ZEE. Cette menace -un pétrolier victime d’une avarie, par exemple- fait alors l’objet d’une analyse approfondie, suivie de mises en demeure de l’armateur.
On peut ainsi l’obliger à être escorté, à rejoindre un port, à quitter les eaux françaises ou encore à ac- cepter des actions d’office.
Un autre dispositif récemment mis en place concerne le canal de Corse où une séparation du trafic permet de prévenir le risque de collision entre navires de fort tonnage navigant entre l’île de Beauté et la Sardaigne.
Enfin , pour surveiller, anticiper et agir au mieux, le préfet maritime s’appuie sur les 19 sémaphores de la Marine répartis le long du littoral. Et si, en Méditerranée comme sur les autres mers, le risque zéro n’existe pas, tout est fait pour le prévenir, en commençant par disposer des moyens d’intervention adaptés
Le préfet maritime de la Méditerranée dispose de trois navires dédiés à l’intervention en haute mer: le remorqueur d’intervention, d’assistance et de sauvetage Abeille Flandre et les bâtiments de sauvetage et d’assistance hauturier Jason et Ailette.
Il peut également mobiliser des remorqueurs portuaires, en affrètement ou sur réquisition. Il peut aussi compter sur les moyens européens gérés par l’Agence européenne de sécurité maritime (EMSA).
Tous sont susceptibles de mettre en oeuvre du matériel de lutte antipollution dont le stock principal se trouve sur la base navale de Toulon et le reste en Corse. Le préfet maritime bénéficie aussi de l’appui du centre d’expertises pratiques de lutte antipollution (Ceppol) de la Marine nationale qui peut dépê- cher ses experts sur les théâtres de pollution marine. Il peut compter d’autre part sur les experts militaires ou civils constituant l’équipe d’évaluation et d’intervention (Eei). En alerte 24 h sur 24, cette équipe peut être déposée par hélicoptère à bord d’un navire en difficulté.
Une coopération avec l’Espagne
Enfin , toutes les administrations disposant de moyens aériens ou nautiques peuvent apporter leur concours. C’est le cas de la douane qui dispose d’aéronefs spécialisés dans la détection de la pollution marine.
Une coopération spécifique a été mise en place au niveau régional. Elle s’est concrétisée dans les années 90 et 2000, par deux accords signés l’un avec l’Espagne (Lion plan) et l’autre avec l’Italie et Monaco (plan Ramogepol). Tous deux permettent de mutualiser les moyens de lutte et d’obtenir une harmonisation des procédures et une coordination des moyens. Des exercices interrégionaux ont d’ailleurs lieu chaque année. Ces entraînements vont de pair avec une politique de répression des rejets illicites développée par le biais d’opérations communes de détection et de répression.
Ces opérations "coup de poing" baptisées Oscar Med sont réalisées annuellement avec des moyens français, italiens et espagnols, en complément de la surveillance quotidienne assurée par chaque État.
Tous les ans des situations à risque se produisent en Méditerranée. On y relève en moyenne une dizaine de cas d’assistance à navire en difficulté qui nécessitent la mobilisation d’une cellule de crise en préfecture maritime et l’activation de moyens.
Néanmoins, les infractions sérieuses sont très faibles en nombre. C’est le résultat du travail du Cross Med et des sémaphores qui permet de les prévenir par contact radio avec les navires sur le point d’en commettre. Concernant les pollutions, il faut dissocier les simples reports de pollution, des pollutions confirmées nées d’un rejet illicite.
Le nombre de reports est en nette hausse compte tenu de l’accroissement de nos moyens de recueil d’informations, tel le système de détection satellitaire européen Clean Sea Net.
En revanche, le nombre d’affaires de rejets illicites est en baisse. Nous n’en avons eu aucune en 2017. Les opérations de surveillance semblent donc porter leurs fruits mais la vigilance doit être maintenue.
L'accroissement du trafic maritime et la modification des routes de circulation posent de nouvelles menaces et constituent de nouveaux défis qu'il ne faut pas ignorer ou sous-estimer.