Le torchon brûle entre Tokyo et Séoul
Les deux voisins ont toujours étaient en froid. Cette fois, ce sont les Sud-Coréens qui boudent massivement les produits japonais, pour dénoncer le blocage de matériaux essentiels à leur industrie numérique.
Du fait de sa position géostratégique, la Corée du Sud a subi à plusieurs reprises des agressions extérieures et le Japon a été son principal persécuteur.
Il a envahi et occupé toute la péninsule coréenne (la colonisation a débuté en 1905). Il a aussi réduit en esclavage le peuple coréen, pour le faire travailler de force dans ses usines ou recourir à des « femmes de réconfort » dans ses bordels militaires, pendant la Seconde Guerre mondiale.
Mais pour les Japonais, ces exactions du passé ne sont pas aussi graves que le prétendent les Coréens ; que le Japon a déjà expié ses torts et indemnisé les victimes. En effet, un accord, signé avec l’ancienne administration conservatrice sud-coréenne, était censé régler ce problème. Mais l’opinion publique l’a rejeté, ce qui a contribué à la chute du gouvernement conservateur (de Park Geunhye, en 2017). Depuis lors, il y a régulièrement des manifestations antijaponaises, des veillées autour des statues de « femmes de réconfort », des procès envers des entreprises japonaises accusées d’avoir réduit des Sud-Coréens en esclavage pendant la guerre.
Le gouvernement coréen actuel a construit son capital politique sur la « normalisation » du Japon, ce qui est interprété par beaucoup comme un retour à l’affirmation de sa position nationaliste.
Tokyo a prétexté d’une perte de confiance et de préoccupations liées à la sécurité nationale pour imposer un embargo commercial contre la Corée du Sud. Face à ces mesures, la réaction de Séoul était inévitable.
Il semble que les contremesures sud-coréennes ont déjà fait légèrement vaciller le Japon : il vient d’approuver l’exportation d’un matériau de haute technologie vers son voisin, pour la première fois depuis l’imposition de restrictions plus sévères. Malheureusement, l’atmosphère reste chargée et chacune des parties veut sortir la tête haute, ce qui complique tout.
Ainsi plus de 60 % des Sud-Coréens tournent désormais le dos à ce qui provient de l’archipel.
Devant les réfrigérateurs vides, ce panneau : « Veuillez nous excuser, nous ne vendons plus de bières japonaises. Le Japon dehors ! » Le secteur brassicole est l’un des plus lourdement touchés par le boycott.
« Nous sommes aussi affectés », déplore un officiel du groupe japonais Nissan Korea. Les ventes de voitures du groupe ont diminué de 19,7 % en juillet par rapport à juin. Le plongeon est de 32 % toutes marques japonaises confondues.