Imiter Mathilde

Mathilde nous avait invités à prendre le café chez elle, comme souvent. Nous l’avons trouvée devant la grande table de sa salle à manger en train de trier des papiers. De plus près, c’était des enveloppes de toutes les couleurs et des cartes de voeux, très différentes les unes des autres. Elle nous a expliqué qu’elle avait décidé, pour cette année et les suivantes, de renouer avec la tradition d’envoyer ses voeux par la poste. Et pour cela elle avait utilisé ses talents pour imaginer, dessiner et imprimer une carte adaptée à chacun de ses destinataires. D’où leur diversité. Ses amis étant aussi les nôtres, elle nous a demandé de choisir, à partir de sa liste, quelle carte correspondrait le mieux à l’un ou à l’autre. Elle se réservait, bien entendu, celles destinées aux personnes qui l’entouraient ce jour-là.

Nous avons passé un agréable et joyeux moment à lui indiquer nos préférences en fonction du caractère de chacun, à échanger nos souvenirs sur l’un ou l’autre et nous avons beaucoup ri.

Enfant je voulais être aviateur. Et pas n’importe lequel. Dans l’aéropostale, du temps de Mermoz ou de Saint Exupéry à Toulouse. Avec leur devise «Le courrier doit passer». Traverser les mers, les déserts, franchir la Cordillère des Andes. Toute une littérature d’aventures nous en reste qui est devenue classique, comme «Le petit Prince».

Il y a quelques décennies, une lettre postée n’importe où sur le territoire et à destination de France était distribuée le lendemain.

Guetter le facteur peut-être porteur des nouvelles du bien-aimé parti au service militaire. Lire et relire ses mots doux et lui répondre. C’était une époque où on prenait le temps de se connaître avant de s’engager pour la vie. Et puis la lettre incontournable que les enfants envoyaient au Père Noël...

Les temps changent, mais on pourrait réinventer de s’écrire de vraies lettres : cela deviendrait tout à coup furieusement à la mode. Imiter Mathilde, une fois de plus.