Le Petit Journal - du Tarn-et-Garonne
LE VRAI ENJEU ?
Qu’est ce qui se joue vraiment derrière les mobilisations contre la loi El Khomri ? Un pari politique en forme de va tout de la part du pouvoir ? Un réflexe de survie sur fond de colère sociale pour la CGT ? Les deux mon général ! Obsédé par son agenda, chaque camp durcit ses positions, obéissant à des logiques internes qui n’ont plus rien à voir avec le débat sur la réforme du code du travail. Après avoir multiplié les maladresses, le gouvernement y voit l’occasion d’opérer une grande clarification entre deux gauches qu’il juge désormais irréconciliables. Fragilisées dans les entreprises par une série de défaites aux élections professionnelles, incapables de mobiliser dans les cortèges, les centrales syndicales CGT en tête ont fait entrer leurs bastions d’extrémistes dans la danse pour tenter de mettre le pays à l’arrêt et de prouver qu’elles sont toujours la. L’opinion publique, plutôt défavorable à un projet de loi qu’elle n’a généralement pas lu, ferait bien d’y regarder à deux fois. Car derrière ces considérations tactiques, c’est un changement de société qui est à l’oeuvre. Amorcé déjà depuis quelques années et notamment depuis le début du quinquennat de Hollande, ce mouvement marque un accouchement douloureux, celui d’une démocratie sociale à la française, ou l’employeur et l’employé parviendraient à s’entendre et à fixer des règles sans s’en remettre systématiquement à l’état. De ce point de vue, la vraie révolution de la loi El Khomri réside dans ce que les juristes appellent l’inversion de la hiérarchie des normes. C’est-à-dire la possibilité de coller au plus près aux attentes et aux besoins du terrain. Autrement dit, faire confiance aux hommes ! Pour la gauche, qui a longtemps estimé que le rapport de force était, par nature, défavorable aux salariés et fait primer la loi sur le contrat, c’est un sacré aggiornamento. Mais ce pari ne peut fonctionner qu’avec un dialogue social constructif et donc avec des partenaires sociaux à la fois représentatifs et soucieux de l’intérêt général. Hélas, nous en sommes encore loin lorsque l’on voit l’attitude de la CGT aujourd’hui. D’autant que le taux de syndicalisation en France est le plus faible d’europe. Aussi bien coté salarial que patronal. Lequel reste sans doute le plus archaïque du monde, comme en témoignent les provocations répétées du Président du Medef Pierre Gattaz. Contrairement a ce qui se passe en Allemagne, aux Pays Bas, dans les pays scandinaves ou ailleurs….la tradition du rapport de force, l’obsession de la victoire ou de la défaite l’emportent sur la recherche du compromis, synonyme pour beaucoup de compromission. La majorité silencieuse et les leaders de droite qui comptent les points, devraient être plus attentifs sur ce qui est en train de se jouer ! L’avenir, ce n’est pas Hollande, il est cramé, c’est un enjeu de société. Trouver le courage nécessaire pour rétablir la confiance plutôt que la confrontation, comprendre les mutations du monde du travail, reconnaitre les contraintes des chefs d’entreprises et favoriser la reconnaissance du fait syndical. Parlons-nous nom de Dieu…