Le Petit Journal - du Tarn-et-Garonne
Les Républicains espagnols crient au scandale
Un projet de porcherie qui fâche
Au camp de concentration de Judes à Septfonds, un projet de porcherie industrielle souille les Mémoires.
Un «crime de lèse-mémoire» se prépare contre le lieu où l’armée républicaine espagnole a été emprisonnée par la 3ème République entre le 5 mars 1939 et fin 1940, des militaires Polonais et aussi des juifs en transit pour les «camps de la mort».
Déjà le 29 novembre en 1993, le propriétaire des lieux (site du camp de Judes qu’il acheta en 1971 en toute connaissance de cause, averti qu’il était de son histoire !)avaitdéposé«undossier de demande d’autorisation d’exploiter une porcherie de 140 truies et 1000 places d’engraissement ». Un tollé avait mis à mal le projet et abouti à la création d’un mémorial !
De manière prémonitoire, le Préfet de l’époque écrivait (cf : Mémoire Zorzin, §4, p 65 et suivantes) : « la limitation [souligné par nous] d’une extension future de l’exploitation (...) devrait faire l’objet d’une réflexion spécifique, afin d’en établir les bases juridiques ».
Ce sont 6500 porcs qui sont aujourd’hui évoqués comme résultat de cette extention industrielle
On comprend l’émotion soulevée et sans doute attendue puisque l’enquête «publique» a été bien discrête au point que seulement 4 personnes s’y sont exprimées : Merci monsieur le Maire !
Lors de l’examen du projet en conseil municipal, 11 élus ont voté « pour», 4 se sont abstenus et 3 ont sauvé l’honneur en votant «contre». Qu’ils en soient ici remerciés !
Ajoutons qu’en 1993 le site n’était pas inscrit au Patrimoine, ce qui est le cas aujourd’hui, grâce à l’opiniatreté de MER82, de l’amicale des Anciens Guerilleros Espagnols en France-ffi (AAGEF-FFI) et des associations parties prenantes dans le CIIMER (Centre d’investigation et d’interprétation de la Mémoire de l’espagne Républicaine) dont le siège est à la gare de Borredon et que préside Carmen Negrin, petitefille du dernier président du Conseil de la République espagnole.
La présence de milliers de cochons, la puanteur de leurs déjections, leur condition concentrationaire d’élevage, ne peuvent que souiller, auprés des touristes visiteurs de France, d’espagne et de toute l’europe, la mémoire des disparus, en portant ainsi atteinte à la dignité des lieux comme à celle de leurs descendants.
Comment pourrait-on accepter que là où nos pères ont souffert et sont mort des conditions mêmes de leur détention, soit répandu du lisier ? Le dire suffit à en mesurerl’ignominie !
Ajoutons qu’envisager ce projet, symbolise à lui seul le manque de connaissance et de reconnaissance relatives à ce pan de l’histoire. Il prolonge grossièrement les autres formes d’édulcoration de la Mémoire que sont :
• Les données et les dates trés approximatives que présente la «Maison de la Mémoire» de Septfonds concernant la Guerre d’espagne.
• Les dénominations de ces camps qui sont colportées, confondant volontairement les destinations successives de ces lieux de souffrance et de mort («internement», «hébergement», «triage», «sélection», «camp hôpital» parfois même «camp d’infortune» ou tout autres termes employés par les bourreaux, occupants nazis ou collabos pétainistes) avec leur dénomination historique et officielle de «camps de concentration» que portent les documents d’époque.
• Les erreurs historiques entretenues, traitant ces gens de «Miliciens», alors que les «milices populaires» n’existaient plus en Espagne dès la mi-1937, dissoutes qu’elles furent pour créer l’armée Populaire de la République (Ejercito Popular de la Repùblica – EJR). Ce sont les soldats de cette armée anti-fasciste qui périrent dans ce camp et reposent aujourd’hui dans mal nommé «cimetière des réfugiés espagnols»
C’est dans un certain effacement de la mémoire, dans des «a-peu-près» de la transmission de l’histoire et dans un négationnisme rampant, que se trouve la source de l’idée indécente que l’on pourrait répandre des déjections de porcs sur un terrain où, pour l’heure, personne n’est en mesure d’assurer que des corps ne gisent pas encore sur ces terres de souffrance !
Au-delà des problèmes écologiques, économiques, environnementaux, le simple et nécessaire respect des victimes devrait conduire a plus de retenue.
Lajoutons que les riverains qui se sont mobilisé par une distribution de tracts ont dû subir des insultes et des menaces à peine voilées. Nous voilà donc confrontés à plusieurs questions :
Retrouvera-t-on le chemin de la dignité ?
Ce chemin passera-t-il par Septfonds et ses édiles !
A quel niveau devronsnous élever la protestation ?
La présence de milliers de cochons ne peuvent que souiller la mémoire des disparus