Le Petit Journal - du Tarn-et-Garonne
Le long retour d’un «aller simple»
« Un aller-retour ? Non, un aller simple, je reviendrai à pieds ! » . « Prends-moi pour une dinde », doit se dire la guichetière de la gare de Montauban en toisant le vieux monsieur qui lui demande un billet pour le Mont Saint-michel…
Avec délectation, l’abbé Veyrac rapporte à l‘auditoire venu assister samedi, en l’église de Molières, à la projection des images de son dernier pèlerinage en direction de Saint-jacques-decompostelle, ce préambule savoureux d’un périple de 1800 kilomètres par le chemin de l’atlantique…
Le public, d’avance conquis, est nombreux : plus une place sur les bancs, comme à chaque rendezvous proposé par André. De quoi donner des complexes aux organisateurs de soirées à thème et autres animations culturelles qui peinent à rassembler plus de 50 spectateurs…
« Qu’est-ce que je suis venu chercher ? » s’interroge, le 5 septembre 2017, cet infatigable marcheur de 75 ans, au départ de son incroyable périple qui, 72 jours plus tard, l’aura conduit au saint des saints du pèlerinage mondial… Une question qui ne doit rien à l’alzheimer mais qui lui permet de se recentrer sur l’essentiel : l’incroyable exploit sportif, certes, défi à l’usure du temps qui passe, mais également le rendez-vous avec les chers disparus qui peuplent ses souvenirs, l’occasion d’enrichissantes rencontres et, également, dira sans ambages notre abbé retraité, le souci d’oublier pour un temps sa colère contre une église qu’il ne comprend plus, un diocèse qui le déçoit. Et, par-dessus tout, la recherche du beau témoignée, en fin de reportage, en superbes images d’une nature toute simple, peuplée de fleurs, d’arbres et d’animaux. Une ode très Hugolienne dans ce rapport à Dieu :
« Moi, je vais devant moi ; le poète en tout lieu se sent chez lui sentant qu’il est partout chez Dieu...»
proclamait le grand écrivain qui ajoutait : « le dogme et les pratiques ne sont que des lunettes qui font voir l’étoile aux vues courtes, moi je vois Dieu à l’oeil nu…»
Clap de fin pour le conteur à l’impressionnant kilométrage (32000 bornes) ? «C’était mon dernier pèlerinage, je vais devenir enfin raisonnable», lâche André au terme de sa conférence, avant de rajouter tout aussitôt «peut-être», justifiant la moue dubitative de ceux qui le connaissent un peu, à l’annonce de cette hasardeuse promesse…