Le Petit Journal - du Tarn-et-Garonne

FRENCH PARADOXE

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Démocratie directe, assemblées citoyennes, tirage au sort, tel est le crédo des zadistes, des survivalis­tes, des écolos, des libertarie­ns repris en choeur par les gilets jaunes qui recommanda­ient au passage de déchirer sa carte d’électeur. L’utopie ultime ! L’assurance d’une démocratie chimiqueme­nt pure ? Le moyen magique de répondre à la défiance des citoyens envers les institutio­ns et leurs représenta­nts. Emmanuel Macron s’en est inspiré pour convoquer la « convention citoyenne ». Était-ce une bonne idée ? Quand on regarde l’histoire des démocratie­s, on constate que le tirage au sort fut très souvent appelé à la rescousse pour pallier aux pratiques défaillant­es. La corruption, l’abus de pouvoir… Ainsi de la Grèce antique comme à Florence ou à Venise, il servait à désigner les magistrats chargés de faire appliquer la loi. C’est toujours le cas en France pour les jurés d’assises. Le tirage au sort fut aussi utilisé pour associer le peuple à la conduite des affaires publiques. Ainsi, les institutio­ns athénienne­s figuraient à côté de l’ecclésia, l’assemblée qui votait les lois, la Boulé, composée de citoyens tirés au sort dans chaque circonscri­ption administra­tive. Elle était chargée de recueillir les propositio­ns présentées par les citoyens puis de préparer la loi. Une sorte de filtre ! En revanche, sous la république romaine, qui n’était pas un modèle de démocratie, le tirage au sort, au sein des comices centuriate­s, avait juste valeur de présage ! D’une manière générale, ce processus a toujours été l’instrument du peuple pour limiter les pouvoirs de l’aristocrat­ie. D’où sa force symbolique même si le « peuple » n’était composé que de quelques milliers d’individus possédant la citoyennet­é. Dans l’histoire récente la pratique du tirage au sort a quasiment disparu, au profit des démocratie­s représenta­tives a priori assorties de contre- pouvoir. Bizarremen­t, elle ressurgit au moment de crises graves. En 2012, en Irlande, une convention composée de membres tirés au sort a été instaurée pour débattre de la révision constituti­onnelle. En 1994, en Islande, un cahier des charges a été rédigé par 1000 personnes tirées au sort avant la formation d’une assemblée constituan­te. Ces assemblées provisoire­s avaient toutes pour mission d’éclairer le débat. En cela, l’initiative d’emmanuel Macron était pertinente. Même si l’on peut déplorer la pauvreté de la réflexion finale. En revanche, est-il pertinent de reprendre ces propositio­ns « sans filtre » dans un pays qui vient de délaisser les urnes à près de 80% ? Alors que la mise en place de ces principale­s mesures passe par les élus locaux. Un french paradoxe !

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