Le Petit Journal - L'hebdo du Lot-et-Garonne
Ouvrir la porte aux dialogues
Exit la Préfecture des Hautes-Pyrénées. Béatrice Lagarde a pris ses fonctions de Préfète de Lot-et-Garonne le 10 décembre dernier à minuit, succédant pour la seconde fois à Patricia Willaert. Après la cérémonie traditionnelle d’installation, organisée lundi dernier, place Armand Fallières, Madame la Préfète s’est entretenue avec les médias départementaux dans son bureau, lundi aprèsmidi. Changement de ton, d’approche, Béatrice Lagarde apporte une signature revitalisante à une fonction qui interroge parfois.
Pour Béatrice Lagarde, ce sera Madame la Préfète puisque depuis 1999, l’Etat accepte la féminisation de noms de métiers, de titres ou de fonctions, même si les puristes grincent parfois des dents et considèrent qu’une préfète est avant tout l’épouse du préfet. Autres temps, autres moeurs et Béatrice Lagarde fait partie de ces femmes avant-gardistes qui ont dû s’imposer dans un univers à dominante masculine. La Préfète a le verbe haut et annonce d’emblée qu’elle préfère les discussions franches et constructives. Dont acte. Fille d’un viticulteur, éleveur et céréalier, Béatrice Lagarde a grandi dans une exploitation de 30 hectares à Grézac (Charente Maritime) qui lui fait ressentir « un très grand respect pour ce monde-là », un monde où suivre des études n’allait pas de soi. Mais c’était sans compter la farouche détermination - qui la caractérise toujours - de la jeune fille de l’époque qui se lancera à corps perdu dans des études de magistrature très ségrégatives puisque seulement 4 % d’enfants d’ouvriers ou d’agriculteurs y accédaient. Qu’importe. A force de pugnacité, Béatrice Lagarde intègre la magistrature
dès 1989 en tant que substitut du procureur de la République de Saint-Malo, puis d’Angoulême en 1992. Sa carrière est lancée.
Le Lot-et-Garonne est un territoire qui lui est familier.
« J’ai eu l’occasion d’y venir, il y a 35 ans, lorsque j’ai obtenu le concours de la magistrature car j’ai effectué une partie de mes stages administratifs ici, à la protection Judiciaire de la Jeunesse à Agen, au sein des deux établissements pénitentiaires (Maison d’Arrêt d’Agen et Centre de détention d’Eysses) ainsi qu’à la Brigade territoriale de gendarmerie de Mézin ».
OUVERTE AUX DIALOGUES
Cela fait plusieurs semaines que Béatrice Lagarde étudient les dossiers lourds du territoire comme UPSA, la RN 21, le lac de Caussade, l’école Langevin ... La crise des gilets jaunes ? Béatrice Lagarde y a été confronté de plein fouet à Tarbes où 200 manifestants, dont une cinquantaine particulièrement virulents, « inscrits dans une violence radicalisée » dixit la Préfète, ont essayé de desceller les grilles de la Préfecture et ont lancé des chaises, des poubelles et des pavés, entre autres projectiles, par-dessus les grilles. « Le mouvement est plus pacifique, plus organisé et plus idéologique dans le 47 . Je suis prête à rencontrer les gilets jaunes s’ils sont structurés » assure Béatrice Lagarde. Premier sujet brûlant : le lac de Caussade, autrement dit, la création d’une retenue d’eau de 920 000 m3 que Serge Bousquet-Cassagne désire aménager mais qui n’a pas reçu l’aval de Didier Lallement, préfet de la région Nouvelle Aquitaine. Les travaux ont débuté malgré l’absence d’autorisation . « La justice est saisie, les procédures ont été engagées via le préfet de région, explique Béatrice Lagarde. Les travaux illégaux ont vocation à s’arrêter. C’est le temps judiciaire qui comptera. L’eau est un sujet majeur. Je me tiens prête et ouverte pour pouvoir aider, accompagner et se remettre autour d’une table. Ce n’est pas moi qui ait les outils. Il faut une avancée de dossier pour créer un événement nouveau ».
Concernant la RN 21, « les élus considèrent que le projet
avance » annonce-t-elle. La problématique liée à la volonté de la Municipalité de construire la nouvelle école Langevin au parc Mathieu, considéré comme zone inondable a pris des proportions insoupçonnées mais « je suis disposée à en discuter,
affirme la Préfète. Il faut faire évoluer les cartographies. Il n’y a pas de connaissances suffisamment précises sur la cartographie en matière de risque ». Au sujet du rachat d’UPSA, « je n’ai pas de contacts particuliers sur ce sujet. Le dossier mobilisera toute mon attention le moment venu, promet Béatrice Lagarde. On doit se montrer facilitateur en terme de réglementation
». La Préfète s’entretiendra prochainement avec Yvon Setze, président de la Chambre de Métiers et de l’Artisanat, soucieux du devenir de l’établissement, vétuste, qui a besoin d’un souffle nouveau pour satisfaire à la fois ses 750 apprentis et les entreprises qui lui accordent leur confiance, des travaux dont le coût est estimé à 4 millions d’euros mais l’Etat fait grise mine pour assurer leur financement, jugé pourtant indispensable. Béatrice Lagarde a du pain sur la planche et n’aura que peu de temps à consacrer à sa vie de femme et de mère auprès de sa fille de 26 ans travaillant dans la restauration à Arcachon et d’un fils de 28 ans, effectuant son internat en médecine à la Réunion, Béatrice Lagarde est aussi une épicurienne, se qualifiant elle-même d’ « impénitente gourmande », passionnée de jardins et d’architecture du Xiiie siècle. Quand au rugby, il ne faudra pas espérer l’apercevoir dans les tribunes lors de chaque match toutefois, assure-telle non sans un brin d’ironie, « je suis malade mais je me soigne »! VD47