Le Petit Journal - L'hebdo local de l'Aveyron
Il est temps de replacer l’alimentation au centre de nos décisions politiques
Secrétaire général des Républicains et député du Lot
Quelques semaines de confinement ont suffi à ébranler nos certitudes, bouleverser nos pratiques et composer avec des contraintes jusqu’ici inconnues. Par le confinement, nous avons fait l’expérience de la simplicité. Nous sommes revenus à l’essentiel, pour forger de nouvelles habitudes et notamment prendre conscience de la valeur intrinsèque de la nourriture. La planification des courses, le temps consacré à la cuisine et le choix de produits de qualité pour préserver sa santé ont à l’évidence permis de réveiller les consciences et de mettre en lumière les vertus du circuit-court. Il ne s’agit plus de courir après le superflu, les produits transformés et importés mais bien de penser l’alimentation de qualité pour tous comme la clé d’une société juste, équilibrée et souveraine. La France a prouvé durant cette crise qu’elle était capable de s’auto-suffire dans beaucoup de productions, là où l’importation est reine habituellement (notre pays achète pour 38.4 milliards d’euros de produits alimentaires à ses voisins européens, en augmentation de + 24% sur sept ans). La France doit aujourd’hui s’imposer comme le pays victorieux d’une agriculture de qualité. Il faut donc délaisser la course effrénée au caddie toujours moins cher et à l’addition toujours plus salée pour le producteur, souvent néfaste à la santé de chacun et à notre environnement. Souvent épuisés, parfois bafoués, nos agriculteurs ont fait preuve d’un dévouement sans pareil durant la crise sanitaire. Sans eux, nous n’aurions pas passé le cap de la crise et du confinement. Là encore, le rôle stratégique de l’alimentation et de ceux qui la produisent s’est réaffirmé, comme toujours en temps de "guerre". Le métier d’agriculteur, métier indispensable et noble, reste en manque profond de reconnaissance. Plus encore, cette crise aura un peu plus fragilisé leurs revenus et leurs situations. Faible rémunération, conditions de travail difficiles et suprématie de la grande distribution affaiblissent un secteur majeur de notre économie française. Après la crise, nos agriculteurs continuent à souffrir. Il est temps de replacer l’alimentation au centre de nos décisions politiques. Il est temps de répondre à la pauvreté alimentaire qui s’enracine. Il est temps de relever ce défi inéluctable de notre siècle : assurer une garantie alimentaire à chacun des Français. Pour ce faire, nous devons ancrer l’agriculture française au coeur de nos consciences collectives et lui accorder une pleine confiance. Nous devons achever la quête d’une autosuffisance assumée. L’agriculture doit devenir un secteur stratégique assumé par la Nation et par l’Etat. Nous devons assumer que l’économie de l’alimentation ne peut pas être soumise, comme beaucoup d’autres, au libre-échange sans règle et la financiarisation aveugle. L’alimentation n’est pas une production comme une autre. Elle doit bénéficier de règles particulières, transparentes, encadrantes.
Face à ces défis, nous proposons trois voies qui pourraient permettre d’avancer vers une garantie alimentaire à tous les Français :
- Baisser la TVA et instaurer un plafond de marge sur un panel de produits alimentaires référencés. Il ne s’agit pas d’un blocage de prix inopérants mais bien d’un meilleur et ferme encadrement des pratiques commerciales pour protéger les producteurs et les consommateurs. De nombreux pays le font. Avec succès. La France a suffisamment hésité.
- Créer un chèque alimentation bonifié pour permettre aux Français les plus modestes un accès à une alimentation saine et de qualité. En deux générations, la part de dépense d’un ménage français consacrée à l’alimentation a été divisé par deux. Des dispositifs incitatifs innovants doivent permettre aux français d’augmenter leurs dépenses alimentaires, comme cela a été le cas tout au long du confinement. Nous devons faute preuve d’imagination et d’audace pour faire de l’alimentation une nouvelle priorité.
- Réviser en profondeur les critères d’attribution du code de la commande publique (ex : ajouter un critère sur l’origine ou la situation géographique sur les denrées alimentaires et s’assurer de la qualité des aliments consommés dans la restauration collective pour soutenir les producteurs locaux et s’engager à ce que 100% des aliments consommés en restauration collective soient prioritairement issus de la production locale et nationale). Avec une solide volonté politique, nous pouvons relever ce défi.
Une France forte s’accompagne de valeurs fortes. La souveraineté alimentaire, la justice alimentaire et la sécurité alimentaire sont de belles et grandes ambitions nationales. L’alimentation est aujourd’hui un des plus grands défi politique qui nous attend. Relevons-le sans trembler.