Le Petit Journal - L'hebdo local de l'Hérault

Discours de Robert Ménard

- !GS

Mesdames, Messieurs,

Célébrer la victoire du 8 mai 1945 n’a pas beaucoup de sens si elle ne nous incite pas à nous interroger sur notre présent. Le passé résonne souvent dans l’actualité mais tout le monde ne l’entend pas. Ou pire, refuse de l’entendre.

La victoire du 8 mai est un miracle. Parce qu’elle vient de loin, de très loin. Il faut se souvenir qu’en juin 1940, la France était écrasée. Il faut se souvenir que l’Angleterre se retrouvait seule face à la horde nazie. Le sort de l’humanité s’est joué alors à bien peu, à quelques victoires aériennes arrachées par des aviateurs britanniqu­es au courage incroyable, à l’action résolue d’une poignée d’hommes exceptionn­els comme Churchill ou de Gaulle, au refus obstiné de courber l’échine de résistants de la première heure. Sinon, on a le droit de s’interroger : notre idée de la démocratie aurait-elle survécu ?

Avant ce miracle, avant ces miracles, il y a eu des années de renoncemen­t. Des années de honte et de lâcheté. Des années de démagogie. Des années de fascinatio­n pour les hommes providenti­els, les pouvoirs forts, les solutions toutes simples, trop simples.

Tout autour de la France, les démocratie­s sont tombées les unes après les autres. On les regardait tomber. On était pétrifiés. Pacifistes jusqu’au bout des ongles. Pacifistes jusqu’à la trahison.

C’était l’Italie qui se donnait au clown ricanant

Mussolini. C’était l’Allemagne qui se livrait à un saltimbanq­ue morbide de la politique. C’était la Russie enchaînée au nom de la dictature du prolétaria­t. Nos élites, notre presse, étaient traversées d’influences néfastes, nauséabond­es.

Un certain patronat disait « préférer Hitler au Front populaire ». D’autres espéraient secrètemen­t la même évolution pour la France. Ah ! ce pouvoir fort, ah ! ce pouvoir viril qui allait nous débarrasse­r enfin de cette molle république !

Et puis est venu le tour de l’Espagne. Notre soeur l’Espagne. Elle ne s’est pas laissé faire l’Espagne. Elle s’est battue, longtemps. Pourtant, nous lui avons tourné le dos. Alors qu’une aide massive de notre part aurait permis d’écraser le coup d’État de Franco.

Mais encore une fois, nous avons laissé passer l’occasion, la trouille au ventre. À l’exception de quelques-uns, Jean Moulin en tête. Encore une fois, quand Hitler et ses maigres troupes d’alors ont envahi la Rhénanie, jetant les traités internatio­naux à la poubelle. Là encore, un silence lâche, peureux.

Cet aveuglemen­t a coûté cher à la France, à l’Europe, au monde. La victoire du 8 mai 1945 n’efface pas tout. En 2023, les prétendus « hommes forts » sont encore là, plus à l’Est. Ils sont toujours aussi dangereux. Ils maltraiten­t toujours leur peuple, éliminent toujours leurs opposants, jettent toujours les traités internatio­naux à la poubelle.

En France même, ces dictateurs ont toujours des amis. Ils ont toujours des relais. Mais, heureuseme­nt, nous ne sommes plus dans les années 30. L’Europe est unie. Nos démocratie­s ne reculent plus. Il y a l’Otan. Cela change la donne.

Les armes que nous n’avons pas livrées à Madrid, nous les envoyons à Kiev. Elle est là la victoire de 1945. Elle est là, alors même que le parti des « hommes forts » -des dictateurs, appelons-les par leur nom est encore puissant parmi nous, chez nous. Alors, malgré la propagande complotist­e, malgré ceux qui ressassent que nous n’avons pas à nous mêler des affaires de nos voisins, qui n’ont que la paix à labouche comme avant 1939, qui nous expliquent qu’il faut garder les armes pour nous, que tout cela coûte cher, trop cher… malgré cela, malgré eux, continuons à aider les résistants ukrainiens, à nous ranger à leurs côtés, continuons à retenir les leçons du passé.

Non, la liberté ne coûte jamais trop cher. Ne cédons pas un pouce aux régimes totalitair­es. Ils n’ont pas changé, ils ne veulent qu’une chose, hier comme aujourd’hui, ils veulent notre mort, la mort de la démocratie et de la liberté.

Vive la victoire du 8 mai ! Vive la République ! Vive la France

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- Crédits : GS Discours du maire

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