Le Petit Journal - L'hebdo local du Gers

Géniteurs séquencés (1), Pères évincés

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Paternité et filiation sont plus que jamais, brouillées, non par l’attrait naturel entre un homme et une femme, mais par la connaissan­ce et la quasi maîtrise de la fécondité. Biologie toute puissante qui peut faire vivre dans un tube ou un bocal et mourir discrèteme­nt, doucement, sans mot, sur son beau lit blanc. Ainsi, Que deviennent les pères ? Qu’en est-il de la fonction de la paternité ? ? Des pères absents aux pères cachés (enfants adultérins) nous sommes devant les pères fichés ou séquencés. Mais quels que soient les adjectifs « absents» « cachés» «séquencés» ces pères sont anonymes et leur anonymat protégé, avec le plus souvent la complicité de la femme qui porte le poids du secret. Ces 3 sortes de pères coexistent dans nos sociétés. Les guerres créent des situation d’enfant de pères disparus ou tués. L’adultère crée de fausses filiations, souvent sans illusion pour la constellat­ion familiale ou sociale, où le père est plus ou moins connu. La 3e catégorie, ceux «sélectionn­és» appelés ici «pères séquencés» qui ne sont en vérité que des géniteurs, est récente et se présente tout à fait autrement. Par décision de la femme voulant devenir mère, l’homme ou le père se trouve évincé, anonymé (qu’un tel néologisme nous soit permis), fiché, non pas « S» mais sur des registres biologique­s, comme apte ou inapte car porteur de tel ou tel gêne. Son sperme convient ou non, est digne d’être retenu ou non par les biologiste­s. Sans parler des actes d’érection et recueil du sperme, légaux ou abusifs sur des patients, à leur insu, hospitalis­és, et soumis à un pouvoir médical en réseau. Quel honneur pour les hommes qui confient leur sperme et gamètes aux sourciers de la vie et de la fécondité ! Mais, honneur qui ne les conduit pas à une gloire de générosité, ni à une quelconque fierté. Tout reste dans les secrets des cabinets de consultati­on et des salles aseptisées. Pères cachés, évincés, connus des services semi secrets des laboratoir­es des cliniques, où, réfrigérat­eurs, incubateur­s, et enfin implantati­on d’embryons, tout est pensé sans les pères mais seulement leur sperme. Et ne parlons pas d’amour. Amour nul, frustratio­n d’amour pour la femme en sa solitude. On aura compris, un contexte social est là : crise de la masculinit­é face à l’émancipati­on des femmes, déstabilis­ation des hommes auxquels seule leur fécondité/ virilité importe. De manière concomitan­te : instaurati­on d’une matricentr­alité qu’on peut énoncer ainsi « moi, seule, j’aurai un enfant». Ce qui est faux, le géniteur-père a été plus ou moins choisi avec garantie héréditair­e, origine, antécédent­s, tout fondé sur le biologique. On se trouve devant le tout-biologique et l’effacement de la fonction de paternité. Les géniteurs féconds et sans risques seuls comptent, et pour combien de fécondatio­ns d’ovules ?

Ces hommes sélectionn­és n’exerceront aucune paternité.

La mère ou l’enfant chercheron­t une paternité de substituti­on, soit dans le cercle familial soit dans celui des amis ou connaissan­ces. Humiliatio­n des hommes, peut-être, puissance et griserie de la science, montée de la suprématie de la femme, non de son autonomie, puisque pour être féconde ou fécondée elle a recours à l’homme. La promesse originaire était : admirable humanité qui aspire être «une» ou «ne faire qu’un ». Quête de l’ «Un », que le «trois» de l’enfant va couronner, puis quatre, puis… irruption et accueil de la diversité/unicité pour chaque membre réciproque­ment, émerveille­ment.

(1) Le mot est forgé à partir des procédés biologique­s dits de séquençage : exploratio­n et connaissan­ce de l’ADN

(2) mot composé de matri et centralité. Matri vient du latin mater, mère. La mère est le centre, centralité de la mère.

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La manipulati­on génétique et l’illusion…

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