Le Petit Journal - L'hebdo local du Gers

Vous avez dit écolo ?

- Alain Paga

Mathilde fait ses courses dans une supérette à trois cents mètres de chez elle. Certes il y a moins de choix que dans un hypermarch­é de la zone industriel­le et on dit que les produits sont plus chers. Mais elle peut y aller à pied (cela lui fait faire de l’exercice), elle restreint ses achats (elle ne peut remplir que son cabas), elle piétine moins (le magasin n’est pas grand) et elle connaît tout le monde, du patron aux caissières. Ce jour-là, elle a choisi de passer avec une nouvelle afin de faire connaissan­ce. Mal lui en a pris. Comme elle sortait de sa poche un sachet en plastique qu’elle y garde en permanence afin d’y placer ses légumes pour ne pas salir son sac, la jeune fille lui a reproché d’agir contre l’environnem­ent. Les vieux ne ne soucient guère de sauvegarde­r la nature et ce sont les jeunes génération­s qui paieront pour leur négligence.

Mathilde a répondu de sa voix la plus douce que, en effet, les vieux de son âge ignoraient la tendance «verte», dans leur jeunesse.

- Je ne vous le fais pas dire !

- C’est vrai. De mon temps, on ne se souciait pas de l’environnem­ent. Mais, les bouteilles en verre de lait, de vin, de bière ou d’eau minérale (on buvait d’ailleurs l’eau du robinet ou celle du puits qui était délicieuse) consignées contre quelques centimes, étaient ramenées chez le commerçant et retournées à l’usine pour être reconditio­nnées et revendues. On n’avait pas encore inventé les bouteilles en plastique. Il n’y avait ni escalator, ni ascenseur. On montait les escaliers à pied. On n’utilisait pas d’énormes véhicules 4x4 pour conduire les enfants à l’école, au cours de musique, de danse ou de sport. On marchait à pied ou à vélo. On lavait les couches de bébé qui n’étaient pas jetables. On faisait sécher le linge dehors sur une corde. Pas dans une machine vorace en électricit­é. On «recyclait» systématiq­uement les vêtements qui passaient d’un frère ou d’une soeur à l’autre jusqu’à usure complète. Il y avait des habits du dimanche, des habits pour l’école, des habits pour les vacances.

C’est vrai. De mon temps, on ne se souciait pas de l’environnem­ent. On n’avait qu’une télé (s’il y en avait une) dans la maison. Pas un poste dans chaque pièce. Dans la cuisine, on se servait d’huile de coude pour préparer les repas. Pas de tous ces appareils électrique­s bruyants pour tout faire sans effort. Dans le jardin, pas de tondeuse électrique ni de motoculteu­r. On se dépensait physiqueme­nt sans avoir besoin d’aller dans un club de gym, courir sur des tapis roulants électrique­s. On n’avait aucun problème de sommeil ni de «stress». On apprenait un métier à 14 ans avec un CAP et on recevait un salaire dès 17 ans. L’effort n’était pas une torture.

Mais, vous avez raison. De mon temps, on ne se souciait pas de l’environnem­ent. On était écolo sans le savoir.

Alors foutez-moi la paix, et apprenez à réfléchir avant de parler. Je vous souhaite une bonne journée».

 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from France