En Mars, travaux de jadis

Morte centenaire une vieille Mountcuquiole gardait le souvenir des temps anciens où l’on sarclait les blés en mars pour en retirer les Herbes dites Mauvaises. Encore vers 1950 en Mars-Avril «calio escàwcir lou blat», arracher les chardons poussant dans le blé, avec une sarclette de forme spéciale, lou médàmmé . On n’utilisait alors comme désherbants que le couteau — un bon paysan ne sortait jamais sans son couteau— la sarclette et, tout simplement, les mains! Les herbes arrachées, séchées comme du foin, permettaient à une femme payée à la journée, de constituer en un printemps une réserve de fourrage suffisante pour nourrir une à trois brebis toute l’année. La plupart de ces Herbes, adventices des cultures, étaient d’excellentes médicinales, certaines peuvent être mangées en légumes, quelques-unes, toxiques, telle la Mercuriale tueuse de lapins ou le Bouton-d’Or, étaient rejetées. Sur chaque parcelle cultivée tout paysan faisait ainsi deux récoltes pour le prix d’une: la culture principale et celle des herbes commensales naturelles des cultures. Ces adventices, mauvaises pour qui n’en connaît pas les usages, restituent les conditions du milieu naturel primitif des plantes cultivées. Au Proche-Orient, berceau des céréales, on trouve encore des colonies d’orge, d’avoine, de blé sauvages formant de vrais champs spontanés dans des paysages communs à tout le pourtour de la Méditerranée. Les causses du Quercy par leur flore sauvage et leur sol nous en offrent une certaine image avec, vers Villesèque, Bagat, Las Bouygues, leurs dolines à terres rouges, cloups de terres noires, tertres arides de terros blanquos et rocs des arapéndîés. Jadis divisés en multiples petites parcelles closes de murs de pierres sèches et arborées de fruitiers amoureux de chaleur et de soleil, nos causses étaient voués aux vignes et vergers complantés de légumes de primeurs à sarcler tout le printemps: fèves, pois, carottes, salades. Ces petits champs en Càncés, Joualles, cultures mixtes, avec caselles et gariottes, marquetaient une contrée vouée aux céréales, blats, et, en vallées au maïs, lou Milh. Le Quercy-Blanc produisait depuis toujours 15 quintaux de blé par hectare. On parlait, en mesures de Montcuq, de Cartàyràdos, 44 ares, et de sestàyràdos, 88 ares. Unités de surfaces que restituent dans les déserts des causses et leurs mas et capmas médiévaux, tel le Siériéyjol à Pechpeyroux, les vieux champs ayant conservé leurs limites et leurs murs de clôture.