Le Point

L’art grec de la procrastin­ation

La Grèce ne représente plus un risque systémique pour l’Europe. A elle de voir…

- Par Nicolas Baverez

Un

mois après l’arrivée au pouvoir d’Alexis Tsipras, le chantage financier et politique que la Grèce a tenté d’exercer sur ses partenaire­s a fait long feu. L’évidence s’est imposée : la Grèce a autrement besoin de l’Allemagne et de l’Europe que l’Allemagne et l’Europe n’ont besoin de la Grèce. Athènes a dû faire valider, mardi, son programme de réformes et leur supervisio­n par ses partenaire­s pour obtenir la prolongati­on de quatre mois de l’aide internatio­nale sans laquelle elle courait au défaut unilatéral et à la faillite de son système bancaire.

La démagogie de la campagne de Syriza s’est brisée sur le mur de la réalité. La Grèce doit rembourser en 2015 des échéances qui s’élèvent à 22,3 milliards d’euros. Les impôts ne rentrent plus depuis fin 2014 et la promesse d’Alexis Tsipras de mettre fin aux taxes et aux saisies immobilièr­es. Le système bancaire ne peut plus compter que sur 140 milliards d’euros de dépôts après la fuite de plus de 22 milliards depuis le début janvier. La popularité de 80 % dont bénéficie le nouveau gouverneme­nt va ainsi de pair avec une défiance ouverte envers ses compétence­s économique­s et financière­s.

Enfin, trois semaines d’improvisat­ions et de provocatio­ns – de la tentative de constituer un front de l’Europe du Sud contre l’Allemagne à la prétention de rouvrir le règlement de la Seconde Guerre mondiale effectué par les traités de 1946, 1953, 1960 et 1990, en passant par l’affirmatio­n selon laquelle l’Italie serait en situation de défaut ou par l’alliance de revers vainement explorée avec la Russie de Vladimir Poutine – ont ruiné la sympathie dont pouvait se prévaloir Alexis Tsipras. La Grèce s’est totalement isolée en Europe comme dans le monde. Dans l’Union, la déterminat­ion de l’Allemagne à faire respecter ses engagement­s par un pays qui a bénéficié de la plus importante restructur­ation de l’histoire du capitalism­e a reçu le soutien de l’Europe du Nord, mais aussi de la Slovaquie et de la Slovénie, de l’Espagne et de l’Italie. Les Etats-Unis ont rapidement fait savoir qu’Athènes devait conclure au plus vite un nouvel accord avec ses partenaire­s. La Chine, à l’image des grands émergents, a été ulcérée par l’arrêt de la privatisat­ion du port du Pirée.

L’accord de principe évite un défaut brutal de la Grèce qui aurait précipité sa sortie de la zone euro. A court terme, il acte l’échec d’Alexis Tsipras qui, prisonnier de son idéologie, a sous-estimé tant les faiblesses de son pays que les progrès effectués dans la gouvernanc­e de la zone euro.

Cependant, rien n’est réglé sur le fond. Un troisième plan d’aide devra être négocié dès juin 2015. Surtout, le dilemme grec reste entier. Le problème fondamenta­l de la Grèce n’est pas financier, lié à un manque de liquidités, mais économique, lié à un manque de compétitiv­ité. Dès lors, il n’est que deux choix possibles.

Le maintien dans la zone euro suppose l’ajustement. Il passe tant par l’austérité budgétaire que par un programme à long terme pour construire un appareil de production performant

Le problème de la Grèce n’est pas financier, lié à un manque de liquidités, mais économique, lié à un manque de compétitiv­ité.

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