Le Point

Alain Finkielkra­ut, la terreur des

Comment l’ex-« fantassin du gauchisme » est devenu l’idole des conservate­urs… éclairés.

- PAR SAÏD MAHRANE

Les téléspecta­teurs l’écoutent, éblouis. Les lecteurs ne le lisent plus seulement, ils le citent ou le tweetent. A la seule idée de le rencontrer, les politiques développen­t un sévère complexe d’infériorit­é. Pour Nicolas Sarkozy, il fait incontesta­blement « honneur à l’intelligen­ce française ». En 2014, Jean-François Copé, lui donnant volontiers du « cher Alain », l’a invité à l’UMP pour un petit déjeuner débat sur l’identité : salle comble. La République est grande et Alain Finkielkra­ut est son prophète…

Combatif, le souffle court, des rougeurs aux ailes du nez, les cheveux mouillés sur le front, le philosophe est devenu incontourn­able. On l’aime ou on le déteste ; c’est le propre de ceux qui affirment vouloir briser les tabous, las du politiquem­ent correct. « Ce n’est pas en dissimulan­t la réalité sous le voile de la bien-pensance qu’on résoudra les problèmes ! » scande notre antihéros. Dans ses dénonciati­ons, l’écrivain n’est pas strictemen­t franco-français, tel Zemmour, ni monothémat­ique. L’auteur du « Juif imaginaire » est autant préoccupé du sort des Français de confession juive, notamment dans ces banlieues où « l’antisémiti­sme est devenu un code culturel », que des atteintes portées à l’identité nationale et européenne.

Mais quand le philosophe parle, on ne peut s’empêcher d’entendre « La Marseillai­se », le bruit de la craie sur le tableau noir et mille éloges de la transmissi­on ( « Nos ancêtres nous regardent » ). D’ailleurs, il ne parle pas, il martèle, se met en ébullition, en éruption, comme jamais aucun élu ne serait capable de le faire. Car, et en cela il ne ferait pas un bon politique, Finkielkra­ut ne joue pas. Il est une vedette des plateaux télé, l’Audimat avec lui explose, ses conférence­s sont prisées… Il s’en moque, la mélancolie l’emportant toujours sur tout. Invariable­ment, une fois sa pensée délivrée, il monte dans un taxi et retrouve son paisible appartemen­t parisien. C’est la chance du philosophe : la maîtrise de son agenda et l’indifféren­ce devant la notoriété. Philosophe, oui, mais pétri de passions, qu’il peine souvent à réfréner. Est-ce la crainte, autant de l’islam que des musulmans non assimilés, et de la décadence généralisé­e, qui le pousse à avoir parfois, cartable sur les genoux regorgant d’articles découpés dans les pages faits divers des journaux, le comporteme­nt du plaignant dans un commissari­at de quartier ? Non, le philosophe est juste habité. Idéologue ? En fait, pas vraiment. Politisé ? On ne lui connaît pas d’engagement depuis ses années Mao. Il y a bien ses votes pour Mitterrand en 1974 et en 1981 et ses

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Vigie. Rap, multicultu­ralisme et Benjamin Biolay, voilà les ennemis de ce gardien républicai­n.

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