LA BRIDE SUR LES GRANDS CRUS
Le vin, « c’est une valeur de la France. Il faut y prêter plus d’intérêt » , a déclaré François Hollande en visite au Salon de l’agriculture et, se voulant rassurant, il a affirmé qu’aucune disposition nouvelle ne serait prise en matière de publicité pour le vin dans le cadre de la loi de santé publique. En clair, pas question de rendre la loi Evin encore plus restrictive. Il faut dire que la France, pays du vin s’il en est, possède la loi la plus répressive en matière de communication sur le vin et les alcools. Pour un résultat sinon nul, du moins très contestable dans la lutte contre l’alcoolisme. Une loi aux contours mal définis, en outre, et qui, rédigée en 1991 par les tenants d’une ligne dure, a écarté toute possibilité d’éducation, à l’inverse d’autres pays comme l’Italie, l’Allemagne, l’Espagne. En France, on a préféré tout mélanger, l’alcool fort et bon marché et le gevrey-chambertin, qui subissent les mêmes interdits, notamment à la télévision. Depuis la mise en chantier de la nouvelle loi de santé publique, l’Association nationale de prévention en alcoologie et addictologie (Anpaa), héritière des vieilles ligues antialcooliques, est à la manoeuvre auprès des élus et, forte d’un budget annuel de 76 millions d’euros (argent public pour l’essentiel), exerce sur eux une forte pression, allant jusqu’à fournir au rapporteur de la loi des amendements rédigés et parfaitement mis en forme… Le monde viticole, jusque-là relativement passif face aux attaques de l’Anpaa, semble cette fois ne plus supporter d’être traité en « dealer », comme l’a déclaré devant des députés et sénateurs favorables à la cause du vin le président de l’interprofession bordelaise, Bernard Farges, au nom de l’ensemble des appellations contrôlées. « Vous aurez peut-être lu avec intérêt le récent entretien de M. Rigaud, président de l’Anpaa, dans lequel il propose, en somme, de limiter la communication pour le vin sur Internet au même titre que les sites pédophiles ou nazis… Le même nous a dit les yeux dans les yeux : en 1943, les vins français étaient réquisitionnés pour l’armée allemande. C’était une grande année pour la lutte antialcoolique en France ! »
UNE LOI AUX CONTOURS MAL DÉFINIS QUI A ÉCARTÉ TOUTE
POSSIBILITÉ D’ÉDUCATION.