Tocqueville amoureux
Roman. 1831 : un jeune juge auditeur marche dans les rues de Paris avec deux amis. L’un d’eux, Gustave de Beaumont, évoque les prisons françaises, usines à récidive. Aux Etats-Unis, paraît-il, des expériences sont menées. Le jeune juge y voit une porte de sortie. En France, le nouveau régime de Louis-Philippe ne lui est pas favorable et ses origines légitimistes lui font du tort. Il a déjà lu tant de livres sur le Nouveau Monde, dont les ouvrages d’un de ses oncles, Chateaubriand. Il s’intéresse au système politique, à cette démocratie dont on fait grand cas. Allez, c’est décidé, il partira pour en étudier les prisons, mais aussi les institutions.
1835 : quatre ans plus tard, Alexis de Tocqueville publie « De la démocratie en Amérique ». Le premier tome est un best-seller, Chateaubriand lui-même, qui l’ignorait jusque-là, vient le féliciter, il est fêté par Mme Récamier. Entretemps, Christine Kerdellant nous aura emmenés sur les pas d’un Tocqueville reçu avec un enthousiasme délirant par des Américains ravis que des Français viennent les prendre pour modèle. On avait, comme Daumier jadis, la vision très cérébrale d’un apôtre du libéralisme sans vie, sans amour. Le voilà en chair et en os. Il se bat en duel. Il ferraille avec sa famille. Il manque se noyer dans le Mississippi. Très épris, il conquiert de haute lutte sa future épouse, une Anglaise. Ce « roman d’apprentissage » parfaitement documenté est une découverte. Et une réussite « Alexis, ou la vie aventureuse du comte de Tocqueville », de Christine Kerdellant (Robert Laffont, 480 p., 22 €).