Le Point

Rosebud moldave

Après « Le fils perdu », Olivier Barrot part en quête de ses racines.

- PAR CLAUDE ARNAUD

Cela fait vingt-cinq ans qu’Olivier Barrot loue les livres d’autrui, chaque jour de la semaine, avec un enthousias­me intact. Autant d’années qu’il écrit des précis sur le cinéma, le théâtre et les pays qu’il sillonne – l’avion est son cabinet de lecture préféré. Un tel appétit d’histoires et de lieux ne s’entend pas sans un ressort caché : le passeur incarnant la culture française, pour une partie de la planète audiovisue­lle, a toutes ses racines dans les bourgades juives de la Bessarabie moldave.

Son père ne lui en avait rien dit – voir « Le fils perdu » (2012) –, sa mère non plus. Comme tant de juifs fuyant les pogroms, ses grands-parents avaient délaissé leur langue et leurs coutumes pour se faire résolument français. Ses fantômes d’une vie antérieure parlant yiddish lui ont pourtant légué une fascinatio­n constituti­ve pour la Mitteleuro­pa. Dès les années 60, il multiplie les voyages en Allemagne de l’Est, dans les pays Baltes, en Hongrie et en Roumanie, qu’il retrace ici avec un appétit intact : après avoir éveillé les soupçons des Vopos gardant le mur de Berlin, sa 2 CV manque passer sous un char soviétique venu écraser le printemps de Prague. Après dix détours insolites, le voilà qui s’approche enfin d’Ataki, le village source, vrai rosebud, mais la frontière moldave lui reste fermée…

A rebours de tant de ceux qui redécouvre­nt leur foi ou leur tribu, Barrot ne sacralise pas ses racines. Il est de ces diasporiqu­es heureux qui préfèrent le chemin au but, la terre au ciel et la tombe de Kafka

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Olivier Barrot

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