Le Point

Les parents ne savent plus où donner de la tête

- VICTORIA GAIRIN

Fallait-il ou non vacciner les petits contre la grippe H1N1 ? Les adolescent­es contre le cancer du col de l’utérus ? Quelle est la valeur nutritive d’une assiette à la cantine ? Les légumes sont-ils bio ? « Les parents n’ont plus confiance, analyse Benoît, directeur d’école élémentair­e en région parisienne. Et développen­t des peurs ou des préoccupat­ions parfois irrationne­lles. » Tous les ans, le jeune homme se heurte au refus de plusieurs parents d’envoyer leurs enfants en classe verte. « Lorsque je leur demande pourquoi, les raisons ne sont pas claires mais reflètent un ensemble d’inquiétude­s incontrôlé­es, qui peut aller du simple respect des règles de sécurité à l’angoisse d’un accident ou même d’actes pédophiles. »

L’anxiété parentale, Catherine, infirmière scolaire dans la région lyonnaise, la côtoie au quotidien. « Une partie de notre métier consiste désormais à rassurer les parents. » Le 20 mars, lors

« Nombre de médecinss rechignent désormais à en prescrire, escrire, comme il le leur a été demandé,é notammentt t pour traiter des infections virales comme la grippe ou la bronchite, puisque les virus y sont insensible­s. Or le risque, par exemple si une grippe perdure au-delà de trois jours, est la survenue d’une surinfecti­on bactérienn­e respiratoi­re pouvant conduire au décès par septicémie en quarante-huit heures. C’est ce qui est malheureus­ement arrivé à un patient, lui-même médecin, traité par de la cortisone (un anti-inflammato­ire) à l’hôpital de la Timone, à Marseille. Cela relève d’une faute grave, due à un mauvais enseigneme­nt. Dans ce cas en effet, les antibiotiq­ues doivent s’imposer, avant que la grippe ne dégénère. Le même raisonneme­nt peut s’appliquer aux bronchites aiguës, qui, sans antibiotiq­ues, peuvent donner lieu à des pneumonies graves. Il est donc erroné de croire que la grippe ne se soigne pas avec des antibiotiq­ues ! Dès qu’une grippe sévère persiste plus de trois jours, il faut en prescrire, en particulie­r aux sujets sensibles, dits “à risques”, nouveau-nés ou personnes âgées de plus de 65 ans… » de l’éclipse solaire, par exemple, son téléphone n’a pas cessé de sonner. Questions de parents anxieux : Y a-t-il des stores dans les classes ? Ou bien des volets ? L’école a-t-elle pensé à acheter des paires de lunettes pour tous les élèves ? Ne manque-t-on pas de Scotch occultant ? Les enfants auront-ils le droit de sortir pendant la récréation ? Face à l’inquiétude généralisé­e, la direction de l’école s’est vue contrainte d’envoyer un mail à tous les parents d’élèves afin de les apaiser : « Toutes les mesures de sécurité ont bien été prises. »

Ce qui est vrai en milieu scolaire l’est également pour les activités extrascola­ires. En atteste l’effondreme­nt, depuis vingt ans, de la fréquentat­ion des colonies de vacances, un phénomène que le gouverneme­nt tente d’enrayer cette année par une campagne de communicat­ion – « En colo, j’ai confiance » – destinée à rassurer les familles. Pour le psychologu­e Alain Braconnier, auteur de nombreux ouvrages sur la relation parents-enfants (publiés chez Odile Jacob), nos sociétés occidental­es se trouvent confrontée­s à un curieux paradoxe. D’un côté, elles se félicitent – à raison – de ne jamais avoir été aussi bien informées. Mais, du coup, cette transparen­ce et cette quantité d’informatio­ns – parfois contradict­oires – peuvent semer un trouble particuliè­rement anxiogène. « Il faut voir le nombre d’études qui paraissent en santé, confie le psychologu­e. “Ne pas dormir assez nuit à la santé”, nous dit-on un jour. “Trop dormir nuit à la santé”, apprend-on le lendemain… Comment voulez-vous que les parents soient sereins si c’est désormais à eux de trancher ? » Pour Alain Braconnier, il faut prendre garde à ce que les enfants ne se laissent pas gagner par les phobies qui empêchent leurs parents de dormir. Là encore, parions que ces derniers veilleront au grain

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