A quoi sert le ministre de la Santé ?
Surexposé, risqué, le poste de l’Avenue de Ségur a déjà brisé pas mal de carrières.
Comment expliquer que tant de scandales sanitaires, depuis v i ngt - c i nq a ns , s e mblent échapper aux ministres de la Santé successifs ? Quoi qu’il fasse, le locataire de l’Avenue de Ségur est le ministre le plus exposé de la République. « Même à l’Education nationale, l’autre domaine sensible dans le coeur des Français, on n’a pas vu, sur la même période, de ministre condamné par la justice à cause d’un scandale » , résume Didier Tabuteau, responsable de la chaire santé à Sciences po. La liste est longue des personnalités politiques ou des directeurs d’administration sanitaire sacrifiés. On se souvient de Jean-François Mattéi taillé en pièces pour sa gestion d’une canicule imprévisible mais surtout pour être apparu à la télévision un soir d’août, en polo noir, bronzé, bref en vacances dans sa maison du Var, alors que des Français mouraient dans des services d’urgences saturés. Et personne n’a oublié le sang contaminé, le scandale majeur, la bombe atomique qui dévasta l’administration sanitaire à partir de 1991. Huit ans plus tard, la Cour de justice de la République condamna un ministre pour la première fois, celui de la Santé, Edmond Hervé, Georgina Dufoix et Laurent Fabius restant à jamais flétris par cette affaire, le boulet passant très près de beaucoup d’autres.
C’est à partir de cet événement fondateur que la politique de sécurité sanitaire fut construite en France. « Avant, c’était indigent. Quand on pressentait un problème, on réunissait trois médecins hospitaliers connaisseurs du sujet et on tentait de le gérer. En 1985, les activités de la transfusion au ministère de la Santé étaient suivies par un seul agent, et encore à temps partiel. Il n’y avait ni agences sanitaires ni spécialistes regroupés pour faire face aux risques ou les pressentir » , ajoute Didier Tabuteau. A l’époque, la santé