Le Point

L’Etat légifère de plus en plus sur nos comporteme­nts. Jusqu’où ?

- PAR LAURENCE NEUER

Environ 15 000 incriminat­ions pénales, 3 400 articles dans le Code du travail, 807 406 pages publiées au Journal officiel entre 1974 et 2014… A chaque jour suffit sa loi. Au nom de la bonne cause : définir une politique de vaccinatio­n, interdire au conducteur de fumer en présence d’enfants ou instaurer le paquet de cigarettes neutre. Le législateu­r aime à nous materner, société du risque zéro oblige. La protection des faibles contre la violence et l’intoléranc­e engage même la loi à se glisser dans la vie familiale et l’intimité de chacun. Pour l’heure, l’éducation par la fessée est saine et sauve : cette n’entrera pas dans le Code pénal, comme l’a préconisé le Conseil de l’Europe. En revanche, l’ange gardien législatif est venu au secours des femmes victimes des diabolique­s méthodes d’amaigrisse­ment promues par les agences de mannequins et les sites « pro-ana ». Elles sont désormais punies d’un a n d ’ e mpris o nnement e t d e 10 000 euros d’amende au titre du délit d’apologie de l’anorexie.

Au coeur de ce texte de la loi Santé clouant au pilori le milieu de la mode et ses vénales exigences de minceur, c’est la dignité humaine qui est en jeu. « Les pouvoirs publics se sont approprié ce concept dont le Conseil d’Etat a même dit, dans un autre contexte [l’affaire des spectacles de “lancer de nains”], qu’il ne se monnayait pas, souligne l’écrivain et professeur de droit Fabrice Defferrard. Or la dignité est une notion floue et peut donc être instrument­alisée au nom d’intérêts personnels ou d’une idéologie. » A commencer

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