Les nouveaux puritains
Ces bien-pensants qui veulent nous rééduquer
Pédagogistes fous de l’école, obsédés de la repentance, hygiénistes anti-vin, intégristes du genre, maniaques de la novlangue...
Il la contemple, l’air consterné. Pourquoi diable n’a-t-elle rien dans le ventre ? S’il n’était pas chef de parti et ancien président de la République, il lui aurait bien asséné un coup du plat de la main en plein estomac. Mais un peu de retenue s’impose. Il tourne les talons pour ne plus la voir, passe les lourdes portes vitrées de la cafétéria installée au rez-de-chaussée du siège de l’UMP et file, par l’ascenseur, au huitième étage. Il déboule à grandes enjambées dans le bureau du directeur général, Frédéric Péchenard. « On a un souci. La machine à sandwichs est vide ! » Fichtre ! Sarkozy, l’adepte des en-cas sans graisse, voudrait-il soudain s’offrir ce genre de casse-croûte ? Jamais. Mais la présence de cet objet abandonné donc improductif fait partie des choses qui l’agacent, des choses « déconnantes » dans ce parti qui, il en est convaincu, a été géré par-dessus la jambe par ses prédécesseurs. On n’attire pas des visiteurs à la buvette avec une machine qui crie famine. Surtout, « on ne gagne aucune guerre sans le souci du détail » , tranche Péchenard.
Malgré le peu de doutes des observateurs et des responsables politiques sur l’envie de revanche sarkozyste, rares sont ceux qui imaginaient, quelques mois plus tôt, un Sarkozy aussi impliqué dans ses nouvelles fonctions de patron de l’UMP. On le disait incapable de se courber pour passer la petite porte du bureau de chef de l’opposition, lui qui venait de claquer (par force) celle, monumentale, de l’Elysée deux ans auparavant. « C’est mal le connaître, souffle aujourd’hui l’un de ses fidèles. C’est un homme de parti, quand il était président de la République, il se faisait envoyer les chiffres des nouveaux adhérents. Il les considère comme le réacteur de la fusée. »
Officiellement, l’UMP revendique 260 000 cartes. « Plutôt 130 000 à jour de cotisation », chuchote un cadre. C’est donc pour les bichonner et atteindre l’objectif démesuré des 500 000 adhérents en 2017 qu’il prend soin, depuis son arrivée en décembre, de jeter un oeil perçant dans chaque recoin de l’imposant bâtiment de la rue de Vaugirard. « Aucun sujet ne lui est étranger, affirme, lui-même surpris, le vieil ami Roger Karoutchi. Pas une décision n’est prise sans son accord, ce n’est pas un président extraterrestre. » Et le sénateur des Hauts-de-Seine