Le Point

Un strapontin chez BlackRock

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Avec 4 500 milliards de dollars de fonds sous gestion, BlackRock est bien plus gros que le fonds souverain norvégien ( 840 milliards). Aucune comparaiso­n cependant, car BlackRock draine de l’argent de multiples sources (particulie­rs, banques, compagnies d’assurances), tandis que le fonds a un seul actionnair­e, le peuple norvégien. BlackRock ne s’embarrasse pas de toutes les prévention­s éthiques manifestée­s à Oslo. Ce qui n’empêche pas le fonds norvégien d’être le deuxième actionnair­e de BlackRock, avec 7 % du capital… Cette maladie se manifeste pendant le boom par une surévaluat­ion de la monnaie qui plombe toutes les autres activités. Et, une fois le boom terminé, par un naufrage économique (comme sur l’île de Nauru, après l’extinction de son phosphate). Elle conduit aussi à la dégénéresc­ence rapide quand elle s’accompagne de gaspillage et de corruption comme en Algérie ou au Venezuela…

Garde-fous. Pour mieux se prémunir contre les dangers de sa bonne fortune, la Norvège est allée très loin. Elle a décrété que tout l’argent tiré du pétrole serait dirigé vers le fonds. Pas question d’alimenter directemen­t le budget. Autre garde-fou, le fonds n’investit qu’à l’étranger, pour ne pas étouff e r l a Bour s e e t l ’ é c o nomie nationale. En fait, le pétrole offshore génère des revenus placés… offshore. Contrairem­ent aux pays du Golfe, la Norvège établit son budget sans tenir compte des recettes pétrolière­s. Les comptes ne sont mis d’équerre qu’ensuite grâce aux seuls intérêts du fonds et non aux revenus pétroliers. C’est pourquoi, même avec un baril à 40 dollars, la Norvège ne s’est pas retrouvée dans la position de l’Arabie saoudite dont le budget 2015 a accusé un déficit de 20 % du PIB ! Celui de la Norvège reste à l’équilibre, le fonds assurant le bouclage. « En 2015, nous dit la ministre des Finances, nous avons tiré 2,6 % du fonds et prévoyons 2,8 % cette année. »

Malgré toutes ces précaution­s, les Norvégiens ne sont pas totalement immunisés contre la « maladie néerlandai­se »… Son économie, qui ne manquera pas de souffrir de la baisse des investisse­ments pétroliers, résiste plutôt bien (le chômage dépasse à peine 4 %), mais des syndromes troublants se font jour. Des salaires élevés, une monnaie longtemps surévaluée privent l’industrie norvégienn­e, hors pétrole, d’une force de frappe à l’étranger – la Norvège, ce n’est ni la Suisse ni la Suède. L’OCDE constate que le pays n’est pas en pointe dans la création de start-up, déplore le faible nombre d’heures

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Uni (0,850). Ici, une plateforme en mer du Nord.
Or noir. En 2014, la Norvège produisait 1,7 million de barils/jour, soit deux fois plus que le Royaume Uni (0,850). Ici, une plateforme en mer du Nord.

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