Le Point

Le carnaval des charlatans

Ce n’est pas le libéralism­e qui menace la France, mais le déni de réalité des bonimenteu­rs du rêve économique.

- Par Pierre-Antoine Delhommais

La

prochaine élection présidenti­elle se présente moins comme une bataille traditionn­elle entre la gauche et la droite que comme un affronteme­nt entre le rêve et la réalité, entre l’utopie et le réalisme, entre des programmes économique­s en forme de chimères et des projets aux allures de douloureus­e. Depuis trente-cinq ans, les Français ont pris la mauvaise habitude de choisir des présidents qui les faisaient économique­ment rêver. En 1981, François Mitterrand leur avait vendu une baisse du chômage grâce à un vaste plan de relance comprenant des hausses de salaires, des dépenses publiques à tout-va et une réduction du temps de travail. On sait comment ce rêve s’est vite transformé en cauchemar de déficits, d’inflation, de dévaluatio­ns et de chômage supplément­aire.

En 1995, Jacques Chirac avait séduit les Français en faisant miroiter des rêves de niveau de vie meilleur. « La feuille de paie n’est pas l’ennemie de l’emploi » , avait-il martelé durant la campagne, en promettant de « tirer les salaires vers le haut comme en Allemagne ». En 2007, le candidat Sarkozy avait lui aussi fait tinter aux oreilles des électeurs des bruits de tirelire en leur expliquant que, s’il s’installait à l’Elysée, ils pourraient « travailler plus pour gagner plus » . Des promesses enchantées vite balayées par la crise financière.

Enfin, en 2012, le candidat François Hollande avait inscrit, noir sur blanc, le rêve au coeur de son projet de « démocratie sociale et apaisée » . Le rêve tenait même une place centrale dans son discours fondateur du Bourget – dont on conseille au passage la relecture à tous ceux qui ont envie de rire un bon coup, ne serait-ce que pour cette phrase culte : « Le quinquenna­t ne sera pas une volteface, un zigzag, une contradict­ion. D’ores et déjà, nous savons où nous voulons aller. » Dans le mur, avait-il oublié de préciser.

François Hollande s’était donc engagé, en toute humilité, à « réenchante­r le rêve français » , un rêve qu’il avait longuement décliné, à toutes les sauces, notamment celle de la grandiloqu­ence. « Je me permettrai, s’était-il enflammé sous les hourras d’une foule émue aux larmes, de citer Shakespear­e, qui rappelait cette loi pourtant universell­e : “Ils ont échoué parce qu’ils n’ont pas commencé par le rêve.” Eh bien, nous réussirons parce que nous commencero­ns par évoquer le rêve ! Le rêve français, c’est la confiance dans la démocratie, la démocratie qui sera plus forte que les marchés, plus forte que l’argent, plus forte que les croyances, plus forte que les religions ! » Et le futur président de conclure en apothéose. « Le rêve français, c’est une force, c’est le projet que je vous propose, parce qu’il nous ressemble, parce qu’il nous rassemble ! » Peut-être les Français auraient-ils dû davantage se méfier d’un tel éloge du rêve qui laissait mal augurer de la capacité de

Avec le programme du Front national, celui du Front de gauche, les « nuiteurs debout » et le désopilant Montebourg, on est dans le royaume d’Ubu.

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Enfin la vérité sur le tragique destin des moutons de Jeanne d’Arc.

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