Le Point

1986, année traumatiqu­e

- MATHIEU LEHOT

« Je me demande (…) si, dans la France d’aujourd’hui, nous ne pourrions pas avancer, au sujet du libéralism­e, ce qu’on disait naguère au sujet du gaullisme : “Tout le monde a été, est ou sera gaulliste.” Il suffirait alors de dire : “Tout le monde a été, est ou sera libéral”. » En janvier 1984, le patron du RPR, Jacques Chirac, parle en converti. Pour se démarquer de la gauche, au pouvoir depuis 1981, la droite a décidé de se faire le chantre de la liberté. Finie la vision gaullienne accordant un rôle essentiel à l’Etat. La mode est à la « flexibilit­é », aux « dénational­isations », à la « concurrenc­e » et aux « déréglemen­tations ». Autant de termes répétés dans le programme commun de

record du monde de la fiscalité du capital, il faut que cette imposition revienne dans la moyenne européenne. On peut se contenter d’aménager l’ISF en donnant le statut fiscal de l’oeuvre d’art à l’investisse­ment productif, d’exonérer la résidence principale ou laisser le choix de faire de l’ISF un « à-valoir » sur les droits de succession.

Sur quel autre point les programmes des candidats Républicai­ns vous semblent-ils clivants ?

Deux exemples. Les 35 heures d’abord. On entend les candidats de droite proposer de laisser les entreprise­s décider librement de leur durée du travail en donnant la primauté à l’accord d’entreprise sur la convention et sur la loi. Fort bien. Mais c’est déjà le cas avec la loi du 25 août 2008. Cette loi prévoit même que les heures exécutées audelà de 35 heures, si elles restent considérée­s comme des heures supplément­aires, voient leur supplément limité à 10 %. On peut certes vouloir aménager cette loi, faciliter la conclusion d’accords dans les entreprise­s, en élargir le champ à la fonction publique ou à l’hôpital. Mais, franchemen­t, il n’y a rien à gagner d’un combat frontal pour restaurer les 39 heures, payées on ne sait trop combien. Autre exemple, la retraite. Les candidats jouent à qui reculera le plus l’âge de départ en retraite. 63 ans ? 64 ? l’UDF et du RPR pour les législativ­es de 1986. Rassemblés derrière le slogan « Vivement demain », les vieux et les jeunes loups de la droite, en tête desquels figure un certain Alain Juppé, rêvent en choeur d’un « printemps libéral ». Convaincus par l’idée qu’une économie libérée assurerait plus de progrès social, les Français choisissen­t l’alternance. Mais pour une très courte durée. A la présidenti­elle de 1988, le Premier ministre, Jacques Chirac, subit une déroute électorale face au président François Mitterrand. Un traumatism­e qui a marqué la droite jusqu’à aujourd’hui, l’incitant à mettre en sourdine ses velléités libérales 65 ? Qui dit mieux ? Il existe une autre approche, longtemps prônée par la droite, celle d’une retraite à la carte dans un système par points. Avec un principe d’équilibre : on ne distribue pas plus de retraites qu’il n’y a d’argent dans les caisses. Avec un principe de justice : à cotisation­s égales, retraites égales. Dans ce système, chacun est libre de choisir son âge de départ et de se constituer une épargne retraite complément­aire. Vous avez là une vraie réforme économique, avec de nombreux soutiens à gauche, y compris à la CFDT.

Quel serait un programme vraiment libéral, qui traiterait l’urgence sociale dont vous parlez ?

Les candidats de la droite disent qu’il faut réduire la durée d’indemnisat­ion des allocation­s chômage. En période de chômage, cela

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