Start-up et grandes entreprises investissent des millions d’euros dans le téléchargement de notre mémoire. Glaçant.
Une gueule d’acteur : Josh Bocanegra, la trentaine ténébreuse, a les yeux plongés dans une succession de schémas lorsqu’on le rencontre dans un Starbucks sur Hollywood Boulevard, à Los Angeles, à 200 mètres de son bureau. En sortant du café, il évoque Jessica Alba – « une amie et une entrepreneure hors pair » –, alors que sous ses pieds des étoiles dorées rendent hommage à Orson Welles, David Bowie, Madonna, Faye Dunaway ou Charlie Chaplin… Peu importe si la plupart de ces stars ne sont plus de ce monde. Bocanegra envisage bientôt la possibilité de leur redonner vie, tout comme il espère être à même un jour d’animer les statues de cire du musée Madame Tussauds, à 200 mètres de là.
Humai, la start-up dont il est à l’origine, est une pionnière du « mind uploading » , le téléchargement de l’esprit. Pas très clair ? L’entreprise s’apprête, par exemple, à dévoiler une application désarçonnante, dont le nom de code est « Soul » . Sur la (glaçante) vidéo de présentation, une jeune femme qui vient de perdre son compagnon reçoit soudain des SMS de l’être reg r e t t é . Pui s un c o up d e f i l . Commence alors une conversation du troisième type avec une voix recréée par ordinateur qui a… le même timbre, la même intonation et le même humour que le disparu.
L’idée de Humai est simple : votre téléphone portable est votre meilleur confident. Il sait tout de vous. L’endroit où vous vous trouvez, la liste des amis à qui vous répondez sans attendre, ceux avec qui vous souriez sur les photos, à quel rythme vous courez lors de vos entraînements, sur quel site vous achetez une paire de chaussettes… En compilant ces milliards de données – grâce au stockage et au big data –, Humai peut reconstituer un « autre vous », plus vrai que nature. A terme, il sera également possible de faire revivre virtuellement des célébrités disparues, comme dans le film « Her », où le héros, Theodore Twombly (incarné par Joaquin Phoenix), peut converser avec son écrivain préféré un soir de déprime. Bocanegra ambitionne même – d’ici 2045 – de télécharger un esprit numérisé dans un corps bionique…
Ils sont nombreux à pointer le caractère aventureux du serial entrepreneur Bocanegra, déjà instigateur d’un site de rencontres controversé baptisé « Loveroom ». Sur cette plateforme aujourd’hui fermée, les personnes jugées « attirantes » se voyaient offrir des nuits chez l’habitant. Mais avec Humai, Josh Bocanegra s’engage dans une aventure autrement plus porteuse, aujourd’hui, dans la Silicon Valley : l’« immortalité numérique ».
Il existe un vrai fourmillement sur ce créneau aussi prometteur que dérangeant. Eterni.me, une start-up de Walnut, en Californie, propose déjà d’enregistrer vos meilleurs souvenirs en ligne, Dmitry Itskov Le tycoon russe de 35 ans veut transférer notre esprit dans un corps bionique : c’est le projet « 2045 Initiative » Itskov a déjà fait modéliser un avatar à son image